À compter du 1er juillet 2018, en application d’une ordonnance de novembre 2017, si les pouvoirs publics retirent leur agrément à des assurances qui couvraient la responsabilité civile professionnelle des praticiens de santé libéraux, le Fonds de garantie des accidents médicaux (FADPS), financé par les seuls professionnels de santé libéraux, devra se substituer aux assureurs défaillants.
Pourtant les pouvoirs publics refusent que ce même Fonds couvre les praticiens de santé libéraux pour des sinistres déclarés avant 2012, lorsque leur couverture d’assurance est épuisée ou expirée. L’application combinée des lois des 4 mars et 30 décembre 2002, dites, respectivement, « Kouchner » et « About », avait fait naître des « trous » dans la couverture d’assurance des médecins du fait des risques d’expiration et d’épuisement des garanties. Ainsi, les médecins qui avaient régulièrement payé leurs assurances « responsabilité civile professionnelle » (RCP) couraient désormais le risque de n’être pas couverts au-delà d’un certain délai ou d’un certain montant de garanties.
Le risque était particulièrement élevé pour les obstétriciens car, en cas d’accident lors d’un accouchement, les dommages-intérêts définitifs ne sont fixés qu’à la majorité de la victime et pour une durée potentiellement très longue. Compte tenu des sommes en jeu, une dizaine d’obstétriciens étaient ainsi menacés de ruine par le seul effet des lois de 2002 et alors qu’ils avaient régulièrement payé leurs primes d’assurance RCP.
Il fallut attendre la loi de finances pour 2012 pour que soit créé un « fonds de garantie des dommages consécutifs à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins dispensés par les professionnels de santé exerçant à titre libéral » (article L 426-1 du code des assurances). Financé par “une contribution forfaitaire annuelle à la charge des professionnels de santé » exerçant à titre libéral, ce fonds doit intervenir quand les garanties assurancielles commerciales sont expirées ou épuisées.
Mais le législateur a eu la malignité de limiter l’intervention du fonds aux cas des sinistres faisant l’objet d’une réclamation « mettant en jeu un contrat d’assurance conclu, renouvelé ou modifié à compter du 1er janvier 2012 ». Cela signifie que, pour l’heure, le fonds ne peut pas intervenir lorsqu’une plainte a été portée avant 2012. Contre toute logique et équité, les pouvoirs publics refusent aujourd’hui encore d’étendre le champ d’intervention du fonds au profit de ceux pour qui il avait été précisément créé, au prétexte que le risque serait d’épuiser le fonds. L’argument perd toute crédibilité puisque les pouvoirs publics mettent aujourd’hui à sa charge la couverture d’assurances défaillantes.
Un détournement qui profite aux assureurs
En effet, l’ordonnance n° 2017-1609 du 27 novembre 2017 charge le fonds, à partir du 1er juillet 2018, « d’indemniser les bénéficiaires des contrats souscrits par les professionnels de santé exerçant à titre libéral, conformément à l’article L. 1142-2 du code de la santé publique, en cas de retrait d’agrément des entreprises d’assurance opérant en France. » (paragraphe II de l’article L 426-1 C. ass.). En clair, cela signifie que les praticiens libéraux paieront deux fois : une fois par les primes qu’ils versent aux assurances ; une autre fois par leur contribution au fonds qui prendra le relais des assureurs qui auront encaissé les primes avant de se voir retirer leur agrément par les pouvoirs publics.
Et une dizaine d’obstétriciens resteront menacés de ruine parce que les pouvoirs publics leur refusent le bénéfice de l’intervention d’un fonds qui a été créé pour couvrir un risque juridique et financier que les lois de 2002 ont créé.
Contacts presse : Emeline Barbé – emeline@eb-conseil.net