Alors que la France accueillera la conférence de reconstitution du Fonds mondial en octobre, la lutte contre le VIH/sida se trouve à un tournant crucial. Si les efforts ne s’intensifient pas, en particulier en direction des jeunes femmes et des adolescentes, les progrès obtenus pourraient être considérablement remis en question. La France, qui met en avant sa “diplomatie féministe”, doit jouer un rôle moteur pour trouver des réponses concrètes à cet état de fait.
Depuis près d’une vingtaine d’années, la lutte contre le VIH/sida a suscité une mobilisation internationale sans précédent, notamment via la contribution des États au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme. Néanmoins, les progrès demeurent insuffisants pour mettre un terme à la pandémie à l’horizon 2030. Le VIH/sida est encore la première cause de mortalité dans le monde chez les femmes de 15 à 49 ans[1]. Dans la région d’Afrique subsaharienne, 75% des nouvelles infections touchent les jeunes femmes de 15 à 24 ans. Ce chiffre est particulièrement significatif pour le futur de la lutte contre le VIH/sida, puisque l’Afrique sub-saharienne concentre 70% des personnes vivant avec le VIH/sida et 66% des nouvelles infections annuelles, et que la population jeune y est en pleine expansion[2].
Plusieurs facteurs entrent en jeu, au premier rang desquels les inégalités liées au genre, qui limitent le pouvoir décisionnel des femmes et des filles dans tous les domaines, à commencer par la sexualité. Mariages précoces, violences, tabous liés à la sexualité, manque d’accès à l’éducation et à l’information, lois coercitives, sont autant d’obstacles à la négociation du port d’un préservatif ou à l’accès aux services de santé.
Mais des solutions existent à travers, tout d’abord, l’adoption d’une approche basée sur les droits humains afin de lutter contre ces inégalités et de lever les barrières législatives et normatives à l’accès des femmes et des filles à la santé et à l’autonomie. A l’heure actuelle, les efforts en matière de santé sexuelle et reproductive et de lutte contre le VIH/sida sont souvent menés séparément. Il s’agit ensuite de proposer une offre de soins intégrée (éducation complète à la sexualité, prévention et prise en charge des grossesses non désirées et des IST/VIH, soins de santé maternelle et prévention de la transmission mère-enfant, accouchement assisté, accès aux traitements, lutte contre les violences) pour toutes les femmes. Ces approches doivent répondre aux besoins des jeunes femmes et des adolescentes dans toute leur diversité, y compris les plus exposées au risque de contamination par le VIH/sida (telles que les travailleuses du sexe, les femmes transgenres, et les usagères de drogues par voie intraveineuse).
Le rôle de la France : assumer une diplomatie « féministe »
En érigeant l’égalité femmes-hommes au rang de priorité lors de la présidence du G7 2019 et en accueillant également la conférence de reconstitution des ressources du Fonds mondial le 10 octobre prochain à Lyon, la France est doublement attendue. Le Président français se verra en effet confier la tâche de mobiliser ses homologues dans la lutte contre les pandémies afin d’intensifier substantiellement leur implication politique et financière.
La France, qui affiche une diplomatie “féministe”, doit assumer sa position en promouvant et en finançant des politiques appliquant l’approche genre, notamment en matière de lutte contre le VIH/sida, avec l’objectif de transformer la société et d’agir sur les rapports de pouvoir inégalitaires entre les femmes et les hommes.
L’implication de la société civile, en particulier féministe, est primordiale pour répondre à ces enjeux. Sa présence dans tous les processus de gouvernance est essentielle, à commencer par la Présidence française du G7 et la reconstitution du Fonds mondial.
[1] UNAIDS, 2017
[2] UNAIDS 2018 http://www.unaids.org/sites/default/files/media_asset/unaids-data-2018_en.pdf
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