Depuis 2007, les opticiens-lunetiers sont autorisés à renouveler et adapter les verres correcteurs à partir d’une ordonnance médicale initiale. Aujourd’hui, 15% des lunettes seraient renouvelées directement chez l’opticien, et 20% de celles-ci seraient adaptées par lui au plan réfraction. Le SNOF a dressé un bilan de la situation en menant une étude inédite auprès des ophtalmologistes*. Les résultats montrent que la grande majorité des ophtalmologistes (81%) est favorable au renouvellement des lunettes chez l’opticien. Néanmoins, l’étude révèle que plus de 80% des opticiens, d’après les ophtalmologistes, ne s’acquittent pas ou rarement de l’obligation d’information au prescripteur lors d’un renouvellement de verres correcteurs avec adaptation. Un manque de coordination qui nuit au suivi médical des patients et que les ophtalmologistes déplorent.
Le Dr Thierry Bour, président du SNOF déclare : « Le renouvellement des verres correcteurs par les opticiens est une solution pertinente pour réduire les délais de délivrance des équipements optiques à condition que son cadre soit respecté. Le retour d’information vers l’ophtalmologiste est obligatoire, mais l’étude nous montre que plus de 8 opticiens sur 10 ne s’acquitteraient pas de cette obligation, alors qu’elle est essentielle dans l’intérêt de la santé du patient. Le taux d’adaptation chez l’opticien devrait augmenter à partir de 2020 dans le cadre de la réforme « 100 % santé ». Nous serons donc attentifs à ce que cette réforme « 100% santé » s’accompagne de mesures efficaces afin de rendre effective la transmission des données des adaptations des opticiens. Nous invitons les opticiens à prendre leurs responsabilités. »
Les ophtalmologistes favorables au renouvellement des lunettes chez l’opticien
Selon l’étude du SNOF*, 81% des ophtalmologistes sont favorables à la possibilité donnée aux patients de renouveler leurs lunettes chez l’opticien à partir d’une ordonnance médicale valide. Les oppositions au renouvellement chez l’opticien, inscrites sur l’ordonnance, sont peu fréquentes de la part des ophtalmologistes : 95% d’entre eux n’indiquent jamais la mention « non renouvelable », sauf si l’état clinique du patient le justifie. Ce dispositif participe à la réduction des délais de délivrance des équipements, mais doit être sécurisé pour le patient. Ils restent donc très attachés à l’obligation d’ordonnance qui permet un examen médical régulier de la population pour dépister et prendre en charge les pathologies oculaires accompagnant les évolutions réfractives des patients. Ces pathologies évoluent fréquemment à bas bruit pendant de nombreuses années, sans que le patient ne s’en rende compte.
Par ailleurs, l’étude indique que 44% des ophtalmologistes pensent que moins d’un tiers de leurs patients sont favorables au renouvellement des verres correcteurs chez l’opticien. En cohérence avec une précédente étude qui dévoilait que 9 Français sur 10 considéraient l’ophtalmologiste comme le plus compétent pour dépister d’éventuels problèmes oculaires : l’ophtalmologiste doit donc rester le garant de la filière visuelle.
Un retour d’information de la part des opticiens vers les ophtalmologistes nettement insuffisant
Alors que les oppositions au renouvellement chez l’opticien sont rares de la part des ophtalmologistes, le faible taux de retours des opticiens vers les ophtalmologistes se confirme. Ce retour d’information vers le médecin est pourtant indispensable pour la santé du patient et la coordination des acteurs du parcours de soins. Les ophtalmologistes révèlent recevoir moins de 10 messages par trimestre. Ils estiment que plus de 8 opticiens sur 10 ne transmettent pas d’information au prescripteur lors d’une modification de verres correcteurs, et ce malgré leur obligation d’information et le risque d’amende. Pourtant, les ophtalmologistes tiennent particulièrement à ce retour et 76% d’entre eux consignent systématiquement cette information quand elle existe. Ce déficit d’échange de la part des opticiens peut expliquer que 60% des ophtalmologistes ne souhaitent pas l’augmentation du taux de renouvellement et jugent à 42% que les opticiens sont insuffisamment formés pour l’effectuer.
Les ophtalmologistes sont également opposés, à 86%, à la suppression de l’obligation d’ordonnance pour avoir droit au remboursement des verres correcteurs, laquelle serait le signe d’une démédicalisation de la filière, dangereuse pour les patients et la prévention. Les jeunes ophtalmologistes (moins de 50 ans) y sont encore plus défavorables, à 96%.
Le Dr Thierry Bour explique : « Les ophtalmologistes se mobilisent pour simplifier le parcours de soins oculaires dans l’intérêt du patient. Cet effort ne doit cependant pas être à sens unique : les opticiens doivent prendre leurs responsabilités. Alors que la majorité des médecins sont favorables à cette pratique, il ne faudrait pas que la délivrance de matériel optique entraîne une démédicalisation au détriment de la santé du patient. C’est pourquoi des efforts doivent être faits pour renforcer l’information vers les ophtalmologistes, garants de la filière visuelle. L’accélération de la numérisation du parcours de santé est une opportunité pour améliorer la coordination et la transparence entre les acteurs, au bénéfice des patients. »
*Enquête SNOF menée auprès de 716 ophtalmologistes du 19 au 30 avril 2019.
Résultats analysés par J. Raynaud, docteur en géographie de la santé.
Disponible sur simple demande en cliquant ici.
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