Hier, lundi 3 juin 2019, le Sénat a adopté un amendement au Projet de Loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé obligeant les internes à effectuer la dernière année de leur formation en ambulatoire en autonomie complète, essentiellement dans les zones sous-denses. Cette disposition ubuesque vaudra pour la Médecine Générale et quelques autres malheureuses spécialités comme, par exemple, l’ophtalmologie ou la pédiatrie.
Pour rappel, six semestres de stages sont nécessaires à la formation en Médecine Générale : un premier stage en ambulatoire chez le médecin généraliste, dit de niveau 1, un stage dans un serviced’urgence, un en santé de la femme, un en santé de l’enfant, un dans un service de médecinepolyvalente et enfin un semestre professionnalisant en autonomie supervisée chez un médecin généraliste dit SASPAS. Tous ces stages sont indispensables pour acquérir les compétences nécessairesà l’exercice de cette spécialité complexe. Avec cette mesure, l’internat de Médecine Générale de 3ans se voit privé par les sénateurs d’une de ses années de formation, au mépris de tout principe pédagogique nécessaire à une prise en charge complète et optimale de la population.
Pour toutes les spécialités, les maquettes de formations ont été construites pour permettre une autonomisation progressive de l’étudiant avec l’aide et l’encadrement de leurs enseignants. Le but de la formation d’un futur médecin étant une autonomisation progressive pour qu’elle soit totale à lafin de la dernière année d’internat. Mais le Sénat balaie ces nécessités pédagogiques.
Où se trouve la place dans les maquettes pour une soudaine année en complète autonomie sans aucune supervision et sans la moindre plus-value pédagogique ? Quels stages seront remplacés par cette année d’exercice autonome ? Qui portera la responsabilité de ces étudiants livrés à eux-mêmes et parachutés sur un territoire ? Le Sénat veut-il revenir sur les textes définissant la Médecine Générale comme une spécialité ? Cette décision entraînerait un bond de 20 ans en arrière, quand la Médecine Générale était apprise uniquement sur le tas, sans formation dévolue.
Non, notre formation de futurs médecins ne peut pas être ainsi amputée d’une de ses années ! Nous rappelons à l’ensemble des parlementaires qu’il est nécessaire aux futurs médecins d’avoir une formation de qualité pour bien prendre en charge leurs patients dans l’exercice de leur futur métier !
Il est inacceptable de brader la formation des futurs médecins pour répondre aux problématiques d’accès aux soins, engendrées par des erreurs politiques d’il y a 30 ans.
Il est incompréhensible de proposer à une partie de la population française, en guise de médecins, des étudiants encore en formation. Les Sénateurs souhaitent-ils une médecine à deux vitesses dans laquelle les patients des zones les plus en tension n’auraient pas la même prise en charge que les autres ?
Cette mesure qui viserait à favoriser la découverte des territoires et du monde libéral va au contrairedévaloriser encore plus l’exercice de la Médecine Générale et détourner les internes de l’exerciceambulatoire. Il faut au contraire favoriser les installations des jeunes professionnels en revalorisant cet exercice qu’ils découvrent déjà au cours de leur formation d’internes.
Le Sénat semble avoir travaillé de façon quasi unanime sur ce sujet, mais il a omis deux éléments essentiels dans son projet hautement démagogique : proposer des éléments cohérents et concerter les étudiants qui n’ont pas été sollicités !
L’ensemble des jeunes et futurs médecins somment le Parlement de revenir à la raison et de prendrede vraies mesures, comme nous le lui demandons depuis le début de l’examen de ce Projet de loi,plutôt que de perdre son temps à proposer des mesures inapplicables, incompréhensibles et délétères pour la formation des médecins et donc pour la santé des français !
Impliqués dans leur formation et plus que conscients des enjeux pour l’avenir de l’accès aux soins, l’ensemble des jeunes professionnels s’oppose fermement à cette décision et continuera de se mobiliser pour faire valoir des mesures censées, construites dans l’intérêt des patients, sans nuire à la qualité des soins.
Contacts presse :
- Clara BONNAVION, Présidente de l’ANEMF, president@anemf.org
- Lucie GARCIN, Présidente de l’ISNAR-IMG, president@isnar-img.com
- Antoine REYDELLET, Président de l’ISNI, president@isni.fr