« L’Académie nationale de Pharmacie dans son rôle de défense de la Santé publique et des patients, exprime soninquiétude concernant le projet de loi Accélération et simplification de l’action publique, qui prévoit d’assouplir les conditions d’ouverture de sites de vente en ligne des médicaments de prescription médicale facultative.
Elle rappelle qu’il est important pour les patients de leur donner accès à ces médicaments tout en prévenant les problèmes de surdosages et les effets indésirables (cf. origine de la décision récente concernant paracétamol, anti- inflammatoires non stéroïdiens…) ; leur bon usage est assuré par le dialogue avec le pharmacien (large réseau depharmacies sur l’ensemble du territoire).
En conséquence l’Académie nationale de Pharmacie considère que :
- pour éviter des dérives, il est indispensable de conserver l’obligation d’autorisation préalable par les Agences régionales de santé (ARS) pour la création de sites internet de commerce électronique de médicaments. Àl’occasion de cette autorisation, les ARS doivent s’assurer que la distance entre l’officine et le local destockage des médicaments permet au pharmacien d’officine de vérifier la qualité et la sécurité de ce stockage ;
- il faut éviter toute autorisation de local déporté qui constitue une porte ouverte à la création de grandes plateformes mutualisant les stocks de plusieurs officines, non contrôlables par chaque pharmacien titulaire, ce qui pose le problème de la responsabilité pharmaceutique et du contrôle de la qualité de la dispensation parl’équipe pharmaceutique ; le contrôle effectif du stockage par le pharmacien d’officine a contribué à éviter jusqu’à présent tout problème de falsification en France alors que cette nouvelle mesure risque de remettre en cause cet acquis ; il est aussi nécessaire de prévoir que les sites agréés par les ARS continuent à être dûment enregistrés par l’Ordre national des Pharmaciens pour permettre aux patients de vérifier la légalité des sites utilisés ;
- comme l’indique le Conseil d’État, l’activité de vente en ligne de médicaments doit conserver un caractère complémentaire à la vente au comptoir de l’officine pour préserver une répartition équilibrée des officines depharmacie sur le territoire et assurer ainsi un approvisionnement de l’ensemble de la population enmédicaments sûrs et de qualité, y compris dans les parties du territoire jugées non attractives (CE, 26 mars 2018, n° 407289) ;
- tout doit être au contraire mis en œuvre pour permettre aux pharmaciens d’officine de conserver le dialogue avec les patients, y compris pour les médicaments de prescription médicale facultative. Comme le soulignel’Ansm à propos de la délivrance de ces médicaments, il convient de renforcer le conseil du pharmacien pours’assurer que les conditions d’utilisation sont appropriées à l’état clinique du patient et à ses traitements en cours ; le pharmacien doit pouvoir mieux suivre la situation des patients par l’enregistrement des dispensations dans le Dossier Pharmaceutique.
En outre, le projet de loi qui réduit potentiellement le nombre de pharmaciens adjoints est en contradiction complète avec le développement des nouvelles missions du pharmacien (conseil, vaccination, dépistages …)prévues dans la récente loi Ma Santé 2022.
En conclusion, l’Académie nationale de Pharmacie, au regard des inconvénients majeurs qu’apporte ce texte sur leplan de la Santé publique, ne voit pas quelles pourraient être les conséquences bénéfiques pour les patients. Leseul intérêt parait n’être qu’économique. Comme la Ministre de la Santé, notre Académie défend en priorité la santé du patient et la Santé publique. »