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Ségur de la Santé : « les étudiants en médecine demandent un nouveau souffle » (Lettre ouverte de l’ANEMF à Olivier Véran)

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La lettre ouverte de l’ANEMF, représentative de l’ensemble des étudiants en médecine de France, adressée ce jour au Ministre des Solidarités et de la Santé, Olivier Véran, appelle à « un nouveau souffle pour les soignants, étudiants, et pour le système de santé de demain. Les étudiants en médecine refusent d’hériter d’un système de santé éreinté, demandent le respect de leurs droits et la revalorisation de leur rémunération (actuellement d’1,29€/h) » :

Fait à Paris, le 19 mai 2020, Objet : Ségur de la Santé : les étudiants en médecine demandent un nouveau souffle

Monsieur le Ministre des Solidarités et de la Santé,

Le 25 mai prochain, votre Ministère lancera le Ségur de la Santé qui fait le voeu de poser les premières pierres de la refondation du système de santé de demain. Lors des concertations, les questions d’attractivité, d’investissement, de gouvernance et d’approche territoriale seront débattues. L’ANEMF accueille positivement ces annonces et demande à être intégrée aux concertations. Afin de dessiner le paysage de la santé de demain, les attentes des futurs médecins doivent impérativement être écoutées.

À bout de souffle. Les soignants ne cessent d’alerter depuis de nombreuses années sur l’état déplorable de l’hôpital public que la crise sanitaire du CoViD-19 n’a fait qu’empirer.

À bout de souffle. De récentes études1 le montrent : un médecin sur deux est victime de souffrance au travail. Du côté des étudiants, le constat est tout aussi alarmant : 24 % des répondants de l’Enquête Santé Mentale Jeunes Médecins2 ont déclaré avoir eu des idées suicidaires au cours de leur formation. La souffrance des professionnels de santé ne doit plus être réduite à des séries de promesses sans concrétisation. Le recrutement de plus de personnel soignant, la modification des pratiques managériales, l’accès aux services extra professionnels assuré pour l’ensemble des personnels, dont les étudiants, sont nécessaires pour restaurer la qualité de vie au travail des soignants. L’accompagnement des étudiants doit être enfin une priorité par un investissement suffisant et durable dans le Centre National d’Appui à la Qualité de Vie des Étudiants en Santé et dans le déploiement de structures d’accompagnement locales.

À bout de souffle. La gestion administrative des moyens financiers, humains et matériels a mis à mal la qualité des soins et la sécurité du personnel. Nous appelons à repenser la gouvernance hospitalière à la faveur d’un système respectueux de l’avis des professionnels médicaux, paramédicaux, des représentants des étudiants et des usagers, symbole d’une véritable démocratie sanitaire. La question de l’attractivité des carrières hospitalières devra être posée sur la table des concertations. Il faut permettre une valorisation salariale des missions d’enseignement, d’encadrement et de recherche ainsi que du travail en équipe pluridisciplinaire. Cette valorisation devra s’accompagner de la création d’équipes universitaires au sein des territoires permettant le partage de ces missions essentielles à la santé et la formation des professionnels de santé de demain.

À bout de souffle. Les économies sur le dos de la santé de la population et des soignants ne seront plus acceptables. Un réel investissement est indispensable pour permettre à notre système de santé de se relever. La tarification à l’activité doit laisser sa place à un financement mixte favorisant la coordination, la qualité et la sécurité des soins. Les initiatives de regroupement de professionnels de santé doivent être facilités administrativement et soutenues financièrement. La revalorisation salariale de tous les professionnels de santé, dont les étudiants hospitaliers, est indispensable pour restaurer l’attractivité et la force de notre système de santé.

Monsieur le Ministre, c’est au sein de ce système de santé à bout de souffle que nous, étudiants hospitaliers, évoluons au quotidien et participons à la prise en charge des patients. Nos droits ne sont pas respectés, notre rémunération est dérisoire. Ce sont également nous qui, en tant qu’étudiant hospitalier, faisant fonction d’aide-soignant, infirmier, brancardier ou encore assistant de régulation médicale, avons instantanément répondu présents durant l’épidémie du CoViD-19. Nous nous sommes mobilisés pour venir en aide à un système de santé en crise. Négligeant souvent notre formation, notre bien-être et notre sécurité, nous avons porté assistance aux équipes soignantes dès que les besoins se sont exprimés.

Soucieux des conditions de formation et d’indemnisation des étudiants hospitaliers, vous avez réaffirmé en février dernier les promesses de votre prédécesseure, le Pr Agnès Buzyn, en annonçant une sécurisation du statut et une revalorisation de la rémunération des étudiants hospitaliers pour la rentrée 2020. Notre mobilisation durant ces deux derniers mois de crise sanitaire n’a fait que remettre en lumière, auprès de l’ensemble de la population notre investissement, mais aussi notre précarité : la sécurisation et la revalorisation conséquente du statut de l’étudiant hospitalier sont désormais urgentes ! Au vu de nos missions et de notre engagement quotidien, nous ne pouvons plus tolérer d’être payés 1,29€ brut de l’heure, soit trois fois moins que les autres étudiants stagiaires de l’enseignement supérieur.

Monsieur le Ministre, nous ne voulons pas hériter demain d’un système de santé éreinté. Nous exigeons un nouveau souffle !

C’est pourquoi nous souhaitons faire partie intégrante de la concertation à venir, et demandons, en ce qui concerne la question des conditions de travail des étudiants hospitaliers :

●  La revalorisation de la rémunération des étudiants hospitaliers, à hauteur de 390 € net mensuel minimum ;

●  La publication d’une instruction à destination des établissements de santé, rappelant les droits des étudiants hospitaliers ;

●  L’élaboration d’un état des lieux des conditions d’étude et de travail des étudiants hospitaliers et de sanctions en cas de non-respect par les établissements.

À l’heure où l’attractivité des carrières hospitalières est en berne, où les conditions de travail et de rémunération des soignants, dont celles des étudiants, sont décriées de tous, où les questions d’accès aux soins occupent le débat public, les médecins de demain doivent être écoutés par les pouvoirs publics. Nous demandons à votre Ministère de reconnaître notre engagement, et exigeons des réponses à la hauteur de nos espérances.

Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de nos sentiments respectueux.

Association Nationale des Étudiants en Médecine de France
www.anemf.org — contact@anemf.org

1 Ziad Kansoun et al, Burnout in French physicians: A systematic review and meta-analysis, J Affect Disord, 1;246, 2019 Mar, 132-147.
2 https://www.anemf.org/wp-content/uploads/2019/10/enquetesantementale.pdf

 

 

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