La survenue récente d’un foyer d’encéphalites à tiques (désignée par l’acronyme TBE, pour Tick-borne encephalitis) dans le bassin d’Oyonnax (département de l’Ain)[1] a d’abord fait évoquer le diagnostic de Covid-19.
En effet, l’évolution biphasique caractéristique de la TBE commence par un syndrome pseudo-grippal (fièvre, fatigue, céphalées et douleurs musculaires) pendant 2 à 4 jours, suivi une à deux semaines plus tard d’une seconde phase caractérisée par une méningo-encéphalite chez un tiers des malades. La TBE est surtout transmise par une tique du genre Ixodes mais, pour la première fois en France, ce foyer ayant touché 26 personnes reconnaît une origine alimentaire (fromage au lait cru de chèvre).
Avec une incidence moyenne de 20 cas par an, la France n’est pas une région d’endémie pour la TBE, mis à part le signalement en 2016 de 54 cas en région alsacienne [2], mais cette zoonose semble en phase de recrudescence, de même qu’elle progresse de façon importante dans les pays frontaliers (Suisse, Allemagne).
Avec la belle saison, la raréfaction des nouveaux cas de Covid-19 en France doit faire élargir le diagnostic différentiel des syndromes pseudo-grippaux vers les infections estivales zoonotiques (TBE, fièvre Q, maladie de Lyme, anaplasmose granulocytaire, tularémie, leptospirose, hépatite E…), ou non (entéroviroses, mycoplasmoses, chlamydioses).
Comme la TBE, plusieurs infections estivales (fièvre Q, maladie de Lyme, anaplasmose) sont transmissibles par une morsure de tique (en particulier Ixodes ricinus)[3] pouvant parfois inoculer plusieurs agents pathogènes simultanément. L’enquête réalisée depuis 2017 via l’application « Signalement Tique » montre que les morsures de tiques ne sont pas limitées aux sorties en forêt, qu’elles ont lieu dans un tiers des cas dans des jardins privés et des parcs publics et que les signalements ont doublé par comparaison avec les années précédentes[4], l’année 2020 semblant être une année où les tiques sont particulièrement actives.
Le maintien d’une vigilance nécessaire à la surveillance épidémiologique de la Covid-19 ne doit pas faire oublier les syndromes pseudo-grippaux de l’été. C’est pourquoi l’Académie nationale de Médecine et l’Académie Vétérinaire de France recommandent :
- de recourir systématiquement au diagnostic de laboratoire (RT-PCR complétée d’une sérologie) devant toute suspicion clinique d’une Covid-19 ;
- d’évoquer, en cas de négativité répétée des tests diagnostiques de la Covid-19, une infection zoonotique devant tout syndrome grippal estival, en particulier lorsqu’il s’agit d’un foyer de plusieurs personnes atteintes dans une région riche en tiques ;
- de prévenir les morsures de tiques en appliquant les recommandations habituelles pour les promenades en forêt mais aussi dans les jardins et les parcs publics.
[1] Brugère-Picoux J. L’encéphalite à tiques: une zoonose ancienne émergente? Première description d’un foyer de contamination d’origine alimentaire en France. La dépêche vétérinaire, 2020, n°1532, 13 juin. https://www.depecheveterinaire.com
[2] Velay A. A new hot spot for tick-borne encephalitis (TBE): A marked increase of TBE cases in France in 2016. Ticks and Tick-borne Diseases, 2018, 9, 120–125; http://dx.doi.org/10.1016/j.ttbdis.2017.09.015
[3] George JC, Chastel C. Les syndromes grippaux estivaux et infections transmises par la tique Ixodes ricinus. Spectra biol. 2004, 142 : 30 – 37.
[4] https://www.citique.fr/les-tiques/maladies-transmises-tiques/
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