Le vote par le Sénat d’un amendement à la proposition de loi « améliorer le système de santé par la confiance et la simplification » suscite colère et indignation au CHFO comme chez tous les directeurs des soins.
En proposant de leur retirer la présidence de la commission des soins, il va à l’encontre des engagements pris de conforter la place des paramédicaux dans la gouvernance hospitalière.
Il y a aujourd’hui urgence à revenir à la raison et à cesser de jouer aux apprentis sorciers.
Si le Sénat commet ainsi une erreur, il faut toutefois en analyser les causes et en préciser les dangers.
Les causes de la cacophonie
Le CHFO a souligné l’incohérence et la confusion générée par la proposition de loi, alors qu’une Ordonnance et des décrets sont en préparation sur les mêmes sujets. Nous l’avons redit lors de la concertation au pas de charge sur cette Ordonnance début février. Nous avons d’ailleurs obtenu que soit abandonné le projet de fusionner les CSIRMT à l’échelle des GHT.
Si une commission commune médico-soignante, paritaire entre la CMG et la CSIRMT de groupement est possible pour travailler sur le projet médico-soignant partagé du GHT, nous refusons qu’elle puisse être transformée en sous-commission de la CME.
Cette option inscrite dans un projet de décret illustre bien un état d’esprit qui a consisté à se focaliser sur la « médicalisation » de la gouvernance en négligeant la participation des paramédicaux, acteur pourtant majoritaire à l’hôpital.
Vient donc ensuite le débat au Sénat sur la proposition de loi. Le Sénateur Alain Milon, rapporteur sur le texte est très critique sur l’opportunité et le contenu de cette proposition : « La commission regrette qu’en pleine crise sanitaire, sans en tirer les enseignements, le Gouvernement s’en remette à ce texte au contenu disparate, au prisme étroit – principalement ciblé sur l’organisation de l’hôpital public – sans ligne directrice forte et dépourvue de vision stratégique ».
L’article 6 de la proposition ouvre la possibilité de fusionner la commission médicale d’établissement et la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques. Le rapporteur souligne que cela « présente un risque important d’absorption (et non plus de fusion) de la CSIRMT par la CME ».
Il aurait été plus cohérent de proposer la suppression de cet article comme le CH-FO l’avait demandé dès l’examen à l’Assemblée Nationale. Le sénat a maintenu l’option tout en proposant de remplacer le directeur des soins par un Président élu de la Commission de soins !
L’intention est peut-être louable en apparence mais le raisonnement est faussé dès le départ :
Il s’agirait de renforcer la CSIRMT pour mieux la supprimer !!
Les risques d’un amendement non évalué
Autant dans le rapport que dans la discussion au Sénat, les natures différentes de la CME et de la CSIRMT sont reconnues, mais on relève plusieurs erreurs d’appréciation.
Considérer la CSIRMT comme « espace d’expression des intérêts et revendications des corps paramédicaux exerçant à l’hôpital », c’est à la fois méconnaître son rôle, sa raison d’être et fracturer l’organisation du dialogue social à l’hôpital avec les représentants du personnel, le CTE, le CHSCT.
De même, instaurer une dyarchie dans l’association des paramédicaux à la gouvernance ne va pas la renforcer mais au contraire l’affaiblir, alors que cette dyarchie n’existe pas pour le corps médical.
Ainsi, pour le CHFO, il ne s’agit nullement de prétendre que la CSIRMT est la « chose » des directeurs des soins qu’on leur volerait, mais bien de s’assurer des conditions de la co-construction équilibrée des décisions sur l’organisation et la coordination des soins entre les paramédicaux.
La CSIRMT est l’instance de tous les paramédicaux. Maintenir à la présidence le coordonnateur Général des soins c’est éviter les décisions en silo, c’est permettre une cohérence au niveau de l’élaboration et de la mise en œuvre de la politique de soins et du projet de soins.
Le CHFO formule six demandes simples :
- Rétablir la présidence de la CSIRMT par le coordonnateur général des soins
- Supprimer la possibilité de « fusion » CSIRMT/ CME.
- Supprimer dans le projet de décret GHT la possibilité de faire de la commission médico-soignante une sous-commission de la CME
- Evaluer objectivement le rôle actuel des CSIRMT et les évolutions possibles pour une plus grande participation des paramédicaux aux décisions et compenser ainsi les manques du rapport CLARIS.
- Inscrire dans la loi le rôle du coordonnateur général des soins, comme cela est fait pour le directeur et le président de la commission médicale d’établissement et comme le suggère le rapport du Sénat,
- Engager rapidement la revalorisation des statuts des cadres de santé et directeurs des soins
- car la crise d’attractivité actuelle pèse plus sur les établissements que les mécanismes institutionnels.
- car leur rôle est primordial pour le bon fonctionnement de l’hôpital et des instituts de formation …comme le montre la crise COVID.