L’émergence de nouveaux variants du SARS-CoV-2 et leur propagation rapide depuis le début de l’année 2021 ont bouleversé la situation épidémiologique de la Covid-19 dans le monde. Porteurs de nombreuses mutations, dont la mutation N501Y qui confère une meilleure transmissibilité, les variants d’intérêt possèdent un avantage sélectif, en particulier le variant dit « britannique », devenu majoritaire en France dans toutes les régions et contribuant à la reprise épidémique actuelle [1].
Face à cette situation, l’intensification des opérations de dépistage s’est imposée comme une mesure indispensable pour juguler le rebond épidémique. Outre le déploiement d’unités mobiles de dépistage gratuit, préconisé depuis plus de 6 mois par l’Académie nationale de médecine [2], la stratégie du dépistage de masse a été appliquée dans les zones géographiques les plus atteintes avant de gagner le milieu scolaire.
Or, la capacité des tests à détecter l’infection, symptomatique ou non, pourrait être altérée par les modifications génomiques ou antigéniques des variants circulants des trois principaux lignages : B.1.1.7 (britannique), B.1.351 (sud-africain) et P1 (brésilien). C’est pourquoi la réglementation française stipule que les tests RT-PCR comportent deux cibles d’amplification afin de repérer les mutants en cas de discordance. De même, les tests antigéniques homologués en France ciblent la protéine N (nucléocapside virale), moins sujette aux mutations que la protéine S (spicule).
Pourtant, certains variants tels, que le B.1.616 (20C/655Y) qui a émergé en Bretagne au mois de janvier 2021, peuvent donner des résultats faibles, voire négatifs, en RT-PCR malgré un contexte clinique évocateur de Covid-19, leur identification nécessitant un séquençage complet du génome viral par l’une des quatre plateformes françaises EMER-GEN [3].
La mise en vente d’auto-tests en pharmacie, récemment autorisée par arrêté ministériel, peut contribuer à la détection précoce des contaminateurs et à la diminution des nouveaux foyers d’infection. Ce sont des tests antigéniques, réalisables après auto-prélèvement nasal chez les personnes asymptomatiques âgées de 15 ans ou plus. Ils pourraient renforcer la stratégie de dépistage en milieu familial, mais aussi en entreprise, au lycée et à l’université, à condition de les utiliser correctement et d’en connaître les limites. Le principal inconvénient des auto-tests réside dans leur faible sensibilité chez les sujets asymptomatiques, auxquels ils sont destinés, aggravée par la possibilité de prélèvements insuffisants, de manipulations défectueuses et d’erreurs d’interprétation. Un résultat considéré comme négatif par l’utilisateur peut induire un sentiment de fausse sécurité et un relâchement inapproprié des mesures de prévention.
Par ailleurs, une attention particulière doit être apportée à l’ensemble des tests antigéniques, leur usage intensif « en vie réelle » ayant fait apparaître une fréquence de faux positifs pour certains lots de réactifs, supérieure à celle observée lors des évaluations. Ce constat confirme la nécessité de contrôler tout résultat positif par RT-PCR, celle-ci restant la technique de référence, la plus sensible et la plus spécifique à ce jour.
– d’évaluer régulièrement les performances des tests disponibles vis-à-vis des nouveaux lignages de SARS-CoV-2 circulants, « variants d’intérêt » et « variants à suivre » et de renforcer le suivi des lots pour leur retrait en cas de défaut de sensibilité et/ou de spécificité ;
– de réserver la vente et la distribution des auto-tests aux seules pharmacies afin d’informer chaque utilisateur :
o sur les bonnes pratiques de prélèvement, de manipulation et de lecture ;
o sur l’obligation, en cas de résultat négatif, de maintenir les gestes barrière ;
o sur l’obligation, en cas de résultat positif, de s’isoler et d’alerter ses contacts ;
– d’insister sur la nécessité de confirmer par RT-PCR tout test antigénique positif, qu’il soit effectué par un professionnel de santé ou par auto-test, afin de caractériser un éventuel variant et de saisir ce résultat dans la base nationale SI-DEP permettant le suivi de l’épidémie.
1. Communiqué de l’Académie nationale de médecine « Surveiller les variants du SARS-CoV-2 : comment et pourquoi ? », 16 mars 2021
2. Communiqué de l’Académie nationale de médecine « Covid-19 : dépister plus, dépister mieux », 3 août 2020
3. DGS-urgent « Conduite à tenir vis-à-vis d’un variant à suivre (dérivé du clade 20c) détecté pour la première fois en Bretagne », 30 mars 2021
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