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Séropositivité au VIH : diagnostic, prévention et vécu au temps de la Covid-19 (BEH n°20-21)

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Le BEH n°20-21 est composé d’un éditorial et de 6 articles (dont 1 focus) :

  • Editorial : Le VIH à l’ère de la pandémie de Covid-19, Bruno Spire, directeur de recherches, Aix-Marseille univ, Inserm, IRD
  • Connaissance de l’effet préventif du traitement antirétroviral (TasP) chez les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes en France en 2021 – Résultats de l’enquête Rapports au sexe, Annie Velter et coll., Santé publique France

Il y a plus d’une décennie, l’effet préventif du traitement antirétroviral contre le VIH, appelé « TasP » (voir encadré), a été démontré scientifiquement : une personne séropositive sous traitement avec une charge virale indétectable ne peut pas transmettre le virus. L’objectif de cet article est d’évaluer le niveau de connaissance du TasP parmi les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes en 2021, de décrire leurs caractéristiques selon leur statut VIH déclaré et les facteurs associés à cette connaissance.

Les données sont issues de l’enquête Rapport au sexe (Eras) 2021, enquête en ligne transversale et anonyme, auto-administrée et basée sur le volontariat.

Parmi les 14 706 répondants inclus dans l’analyse, résidant en France et ayant eu au moins un rapport sexuel avec un homme au cours de leur vie, 60,5% connaissent le TasP, 92,4% parmi les séropositifs au VIH et 58,2% parmi les séronégatifs ou ceux méconnaissant leur statut VIH.  Les régressions logistiques montrent, avec des niveaux différents selon le statut VIH des répondants, qu’un faible niveau d’étude, une situation financière perçue comme difficile, un niveau de littératie en santé faible ou encore le fait de ne pas se définir homosexuel étaient associés à une moindre connaissance. Inversement, le fait de vivre en milieu urbain, de fréquenter la communauté gay ou les services de soins liés au VIH étaient associés positivement à la connaissance du TasP.

La poursuite des campagnes de vulgarisation du TasP est primordiale, que ce soit par le biais des canaux associatifs, communautaires, sanitaires mais aussi grand public, avec pour objectif d’améliorer les connaissances sur le VIH et réduire la stigmatisation liée au VIH.

  • Evolution et caractéristiques des usagers de drogues injectables ayant découvert leur séropositivité au VIH en France entre 2004 et 2019, Laurian Lassara et coll., Santé publique France 

Cet article présente les caractéristiques des usagers de drogues injectables (UDI) ayant découvert leur séropositivité VIH en France sur la période 2016-2019, selon leur lieu de naissance, ainsi que les évolutions de ces caractéristiques depuis la période 2004-2007, à partir des déclarations obligatoires d’infection à VIH.

En 2016-2019, les UDI représentaient 0,8% de l’ensemble des découvertes de séropositivité déclarées, pourcentage en diminution depuis 2004-2007 (1,7%). Les principales évolutions observées sont une tendance à l’augmentation des UDI de plus de 50 ans, une augmentation de la part des UDI sans profession, une forte progression des UDI nés en Europe de l’Est et une diminution de ceux nés en France, une amélioration de l’indicateur de précocité du diagnostic chez les UDI nés en France, non observée chez ceux nés à l’étranger. Près des trois-quarts des UDI n’avaient jamais été testés avant leur diagnostic.

La part croissante des UDI sans profession reflète probablement une aggravation des situations de précarité. La proportion très importante d’UDI n’ayant jamais été testés avant la découverte de leur séropositivité indique qu’une partie de cette population reste éloignée du système de soins. Ces constats appellent à encourager les politiques de dépistage ciblé et d’accompagnement des UDI et des personnes migrantes.

  • Diagnostics d’infection à VIH chez des personnes trans, France 2012-2020, Françoise Cazein et coll., Santé publique France 

Les personnes trans sont très vulnérables vis-à-vis de l’infection à VIH et des autres IST du fait de facteurs comportementaux, économiques ou sociaux. Ce travail a pour objectif de décrire les diagnostics d’infection à VIH dans cette population.

Les données sont issues de la déclaration obligatoire de l’infection à VIH. L’analyse a porté sur les diagnostics d’infection à VIH chez les personnes trans entre 2012 et 2020. Deux catégories ont été décrites : les découvertes de séropositivité (personnes ignorant leur séropositivité avant le diagnostic) et les premiers diagnostics en France de personnes déjà diagnostiquées dans un autre pays.

De 2012 à 2020, 253 personnes trans découvrant leur séropositivité ont été déclarées, soit 0,7% des découvertes sur cette période. Après correction pour prendre en compte la sous-déclaration et les données manquantes, ce nombre est estimé à 418 (IC95%: [367-469]). La plupart de ces personnes étaient des femmes trans (87%), dont l’âge médian était de 31 ans (38,5 pour les hommes). Les femmes trans étaient plus souvent nées à l’étranger (83%, principalement en Amérique du Sud) que les hommes trans (52%). Le mode de contamination probable était principalement sexuel (98%). Le motif le plus fréquent de réalisation de la sérologie était une exposition récente au VIH (33%) et 15% des diagnostics étaient réalisés suite à un test rapide d’orientation diagnostique (Trod) positif. Une personne trans sur cinq était diagnostiquée au stade avancé de l’infection (sida ou <200 CD4), et 37% des personnes trans étaient co-infectées par une autre IST.

Entre 2012 et 2020, 115 personnes trans, connaissant leur séropositivité et diagnostiquées en France l’année de leur arrivée sur le territoire, ont été déclarées, soit 6% des personnes diagnostiquées dans ces conditions. Ces diagnostics concernaient quasi exclusivement des femmes (99%). Après correction, leur nombre est estimé à 169 (IC95%: [137-201]) personnes.

Les personnes trans découvrant leur séropositivité sont très majoritairement nées à l’étranger et contaminées par voie sexuelle. Elles sont fréquemment co-infectées par une IST bactérienne, soulignant leur niveau élevé d’exposition sexuelle et plaidant pour un renforcement de la prévention diversifiée dans cette population, notamment par la PrEP. Le diagnostic à un stade avancé de l’infection est plus fréquent chez les personnes trans nées à l’étranger diagnostiquées plusieurs années après leur arrivée, ce qui souligne la nécessité de poursuivre les incitations au dépistage à distance de la migration.

De même que les découvertes de séropositivité, les premiers diagnostics en France de personnes déjà diagnostiquées dans un autre pays représentent un enjeu important en matière de mise en place d’une prise en charge médicale, qu’il s’agisse d’une initiation ou d’une poursuite de traitement antirétroviral.

  • Surveillance SurCeGIDD : dépistage et diagnostic du VIH, des hépatites B et C et des IST bactériennes en CeGIDD en 2020, Gilles Delmas et coll., Santé publique France

Les CeGIDD (Centres gratuits d’information, de dépistage et de diagnostic des infections par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH), des hépatites virales et des infections sexuellement transmissibles (IST)) ont été créés en 2016. Cet article décrit, pour l’année 2020, les caractéristiques des consultants ainsi que l’activité de dépistage et de diagnostic réalisée dans ces structures, en les comparant à 2018.

Il s’agit d’une étude transversale répétée, à partir des données de surveillance recueillies en continu par le système SurCeGIDD, qui repose sur la transmission sécurisée de données individuelles concernant les consultants, selon un format prédéfini. Ont été décrits les caractéristiques sociodémographiques et comportementales des consultants ainsi que leurs motifs de consultation. Les proportions de consultants testés et les taux de positivité pour le VIH, les hépatites B (VHB) et C (VHC), la syphilis, le gonocoque (NG), Chlamydia trachomatis (CT) et Mycoplasma genitalium (MG) ont été analysés selon le sexe des partenaires.

En 2020, 336 333 consultations ont été rapportées par 50,3% des 336 CeGIDD recensés. La fréquentation des CeGIDD a fortement diminué au second trimestre 2020 (-58% par rapport au premier trimestre). En 2020, les consultants étaient majoritairement des hommes (62,1%) et des jeunes de moins de 30 ans (64,5%). Environ un quart (23,5%) des consultants étaient nés à l’étranger. La part d’hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (14,8%) et de personnes trans (0,38%) a augmenté par rapport à 2018. Les motifs de consultation les plus fréquents étaient toujours une exposition à risque (60,4%) et un dépistage systématique (43,3%). Certains motifs de consultation ont augmenté entre 2018 et 2020, comme l’initiation ou le suivi d’une prophylaxie pré-exposition.

Une augmentation du taux de positivité entre 2018 et 2020 est observée pour le VIH (de 0,37% à 0,41%), mais surtout pour NG (de 2,8% à 4,0%), sans doute en lien avec la modification des caractéristiques des consultants accueillis. Parallèlement, les taux ont diminué pour le VHB (de 1,3% à 0,93%) et le VHC (de 0,94% à 0,60%). Ils sont relativement stables pour CT (7,0% en 2020), MG (6,8%) et la syphilis (1,0%).

Malgré une baisse de consultations en 2020 liée à la pandémie de Covid-19, les CeGIDD ont continué à assurer leurs missions de dépistage/diagnostic, dans une approche globale de santé sexuelle. La surveillance SurCeGIDD apporte des éléments de suivi de la stratégie nationale de santé sexuelle, il est donc primordial d’améliorer l’exhaustivité et la complétude des données recueillies.

  • Analyse sociologique des expériences de la séropositivité au VIH à partir d’une enquête longitudinale qualitative auprès d’hommes homosexuels, Mélanie Perez, Centre de recherches en éducation de Nantes, Nantes

La fin des années 2000 est marquée par un tournant important dans la gestion du VIH : les personnes séropositives sous traitement antirétroviral efficace dont la charge virale est biologiquement indétectable ne transmettent plus le virus. Ces avancées sont à l’origine du questionnement de départ de la recherche : que reste-t-il du stigmate social associé au VIH ? Pour des personnes récemment infectées, l’atteinte, ou la perspective de l’atteinte d’une charge virale indétectable permet-elle la disparition des expériences subjectives de honte et/ou de stigmatisation décrites jusqu’alors dans les travaux de sociologie, et plus largement dans les données de santé publique ?

Cet article présente les principaux résultats d’une recherche sociologique sur les expériences de la séropositivité au VIH d’hommes homosexuels. Une enquête longitudinale qualitative conduite durant les deux premières années suivant le diagnostic médical, mêle des entretiens biographiques (n=35) répétés avec ces hommes et des observations multi-situées au sein des différents espaces qu’ils fréquentent et traversent (SMIT, associations liées au VIH-sida et/ou LGBT, espaces de sociabilités, sphères privées amicale, familiale et liée au couple).

La séropositivité au VIH fait l’objet d’une socialisation spécifique, marquée par un processus de disqualification et de déclassement de l’homosexualité et des modes de vie associés. La mise en indétectabilité biologique du virus du VIH dans les corps ne produit pas la disparition des expériences subjectives de honte et/ou de stigmatisation.

Si les traitements et les outils de mesure permettent de rendre le VIH indétectable au niveau biologique, le diagnostic toutefois, réactualise, réactive, ou fait émerger un questionnement moral sur l’homosexualité. Le stigmate du VIH semble d’autant plus lourd à porter dans un contexte de responsabilisation et de culpabilisation des hommes homosexuels largement avertis des risques d’infection, et soumis à l’injonction d’un devoir de précaution, et in fine de santé. Les trajectoires biographiques plurielles des hommes homosexuels sont affectées par la séropositivité. Pour les hommes les moins dotés en ressources (économiques, culturelles, sociales), l’expérience de la séropositivité a tendance à accroître l’isolement et à générer une réactivation de dispositions homophobes.

 

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