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Résultats de l’enquête ARAMIS 2 sur les usages d’alcool en soirée chez les adolescents et les jeunes majeurs (Rapport)

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L’alcool en soirée : les différences sociales et les stéréotypes de genre façonnent les usages, les risques et les stratégies de régulation.

En 2017 se concluait la première enquête sur les Attitudes, représentations, aspirations et motivations lors de l’initiation aux substances psychoactives (ARAMIS), mettant en lumière la méconnaissance des risques sanitaires et l’ambiguïté récurrente entre messages de prévention et publicité d’alcool chez les adolescents et jeunes majeurs. L’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT) publie aujourd’hui le Tendances n°149 sur les résultats d’une deuxième enquête ARAMIS qui approfondit les observations de 2017 sur la gestion et le contrôle des consommations dans les moments propices à l’alcoolisation tels que les soirées.

L’enquête, financée par le Fonds de lutte contre les addictions, a été coordonnée par l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT) avec le concours de l’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire (Injep) et de l’Université Paris- Cité. Au total, 133 enquêtés ont été interrogés entre 2020 et 2021, parmi lesquels des adolescents (15 à 18 ans), des jeunes adultes (jusqu’à 23 ans inclus) et des parents de mineurs (15 à 17 ans).

Les résultats de cette enquête montrent comment les consommations sont traversées par des enjeux de différenciation sociale et de genre. Si les risques sanitaires de long terme associés à l’alcool sont encore largement méconnus, les risques immédiats font l’objet de régulations individuelles et collectives très codifiées.

Les soirées et l’alcool, reflets de la distinction sociale à l’adolescence

Les soirées constituent un moment de sociabilité déterminant dans le passage de l’adolescence à l’âge adulte, renforçant les groupes amicaux et les frontières sociales qui les distinguent, notamment entre un milieu rural parfois peu aisé et un milieu urbain plutôt « bourgeois ». Elles accentuent en ce sens la réputation du groupe qui se confond donc parfois avec le capital économique et l’image sociale de ses membres. Néanmoins, facilitées par l’accessibilité élevée de l’alcool, ces variations ne concernent pas tant les quantités et la fréquence d’alcoolisation (homogènes chez les enquêtés aux appartenances sociales diverses) que les lieux choisis, les manières de boire et les produits utilisés.

Xavier, 17 ans, témoigne : « Je pense que ça va être vraiment des catégories sociales, les personnes qui sont aisées financièrement qui vont se donner un genre, ils vont aller en soirée pour dire qu’ils y sont allés. […] Les soirées, quand on est pauvre, il y a pas d’alcool, il y a pas de drogue [i.e. il y en a mais ce n’est pas ça qui compte] … on reste juste là on passe un super moment, on kiffe, on blague. Et c’est trop bien.»

Une représentation du risque axée sur les conséquences immédiates de la consommation

Les stratégies individuelles ou collectives de gestion des effets de l’alcool s’agencent de manière variable autour de trois principales catégories de risques identifiées par les jeunes :

  • Les risques sociaux (enjeux de réputation sociale) ;
  • Les « risques internes » (tituber, se faire mal, provoquer un accident de la route, …) ;
  • Les « risques externes » provoqués par une personne extérieure (se faire agresser, accoster, …).

Ces trois catégories reposent sur une représentation du risque axée sur les conséquences immédiates de la consommation, comme réguler l’absorption d’alcool pour « garder la face » par la mise en place de stratégies (alterner sa consommation d’alcool avec de l’eau, prendre l’air, manger avant la soirée « un bon plat de pâtes pour bien éponger », …). En écho à la première édition de l’enquête ARAMIS, la deuxième édition montre que les risques sanitaires encourus sur le long terme sont rarement intégrés voire totalement absents dans les repères de consommation mentionnés par les jeunes dans les soirées.

La gestion des effets de l’alcool est individuelle, collective, et fortement genrée

Les stratégies de contrôle sont particulièrement marquées chez les filles, qui doivent se conformer aux attentes sociales définies par l’ordre du genre, qui est d’autant plus apparent dans des contextes d’ivresse favorisant le lâcher-prise. Exposées au risque d’être prises pour des « filles faciles » ou « immatures », elles font l’objet d’impératifs contradictoires de la part des garçons qui les jugent et les incitent en même temps à consommer de l’alcool. Face aux risques d’abus, d’image sociale dégradée, elles instaurent des stratégies de contrôle à la fois en amont des contextes d’usage et pour rentrer des soirées, notamment s’il faut traverser l’espace public de nuit ou utiliser les transports publics seules.

Ces stratégies de régulation s’élaborent collectivement puisque les jeunes agissent solidairement et se répartissent différents rôles : s’approvisionner en alcool, le servir, veiller sur les autres, être celui qui conduit et qui ne boit pas, endosser la figure de « la maman » ou encore du « garde du corps ». Martine, 21 ans, témoigne : « J’suis vachement protectrice, j’suis un peu la maman des soirées […] Si j’suis avec des gens qui boivent plus, forcément d’un côté j’boirai moins pour justement être plus prévoyante et faire attention à eux. »

Les résultats d’ARAMIS 2 s’intéressent également, dans la lignée des stratégies individuelles et collectives de régulation, à la perte de contrôle organisée. Par exemple, pour les alcoolisations ponctuelles importantes communément désignées comme le binge drinking, les jeunes sont conscients des risques liés à la perte de contrôle et des difficultés pour surmonter seuls ces dangers. Le groupe joue dès lors un rôle de garde-fou par rapport aux excès individuels en raisonnant le buveur excessif, en développant des stratégies collectives pour stopper sa consommation voire en l’excluant du groupe.

L’enquête ARAMIS 2 illustre par ailleurs les effets des politiques publiques de prévention routière sur l’intégration de la figure du « Sam » et, a contrario, la grande facilité avec laquelle les mineurs parviennent à se procurer de l’alcool. Ces résultats invitent à poursuivre l’information auprès des jeunes et de leurs parents sur les conséquences sanitaires à long terme, qui sont encore sous-estimées voire assez largement méconnues.

 

Contact presse : Esther Thiry – esther.thiry@ofdt.fr

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