Depuis une vingtaine d’années, grâce aux progrès du maintien à domicile, la majorité des personnes âgées en situation de perte d’autonomie peut rester chez elles. La déception est vive quand, malgré les aides au maintien à domicile, celui-ci n’est plus possible. Pour la personne concernée, la perspective de vivre en institution est souvent traumatisante ; pour l’entourage familial, cette perspective déclenche des sentiments de culpabilité ou d’échec : ainsi, bien souvent, l’entrée dans l’établissement est organisée trop tard, dans l’urgence, au décours d’une hospitalisation, sans visite préalable de l’EHPAD, sans délai de réflexion et parfois dans un établissement éloigné induisant une rupture complète des liens avec la vie antérieure.
De plus, au moment de la décision, le choix éclairé est souvent gêné du fait d’informations manquantes. Par exemple, qui sait :
- si l’établissement est adapté à la vie collective de personnes âgées avec des handicaps lourds en raison de problèmes d’architecture ou d’aménagement intérieur ?
- que tous les EHPAD n’ont pas développé des coopérations au sein de la filière de soins pour éviter des ruptures de parcours et améliorer la qualité des soins (hospitalisation à domicile ; équipe mobile ; résidence autonomie ; service hospitalier de gériatrie aigüe…) ?
- ou encore que tous les EHPAD n’ont pas : une unité de vie protégée (UVP) pour les résidents souffrant de désorientation avec risque de fugues ; un pôle d’activités et de soins adaptés (PASA) pour valoriser les capacités restantes ; un hébergement temporaire pour un conjoint ; une unité grande dépendance ; une permanence des soins avec infirmières diplômées d’Etat (IDE) de nuit ; un médecin coordonnateur ; une cellule qualité ; une cellule d’hygiène ; et une commission repas (en vue de l’ouverture aux familles ou aux résidents du quartier…) ?
- enfin, qu’un prix élevé n’est pas lié à un personnel soignant plus nombreux au lit du résident et à un niveau de soin augmenté, et que les prix d’hébergement ne sont pas comparables entre le secteur privé commercial et le secteur non lucratif (associatif ou public) ?
La visite préalable de l’établissement par le futur résident et le référent familial permet de découvrir un environnement inconnu soumis à beaucoup de préjugés. Elle est un temps d’échange essentiel avec un membre de l’équipe de direction, afin de lui faire préciser le fonctionnement de l’établissement ainsi que les modalités financières d’hébergement.
Le résident s’attend à être accueilli dans un établissement moderne/modernisé, confortable et écologiquement/technologiquement responsable, assurant sécurité et accompagnement/soins de qualité par des équipes de professionnels qualifiés. Il s’attend à un cadre de vie propre, sentant bon, chaleureux et ne ressemblant pas à un hôpital. Il apprécie que l’EHPAD soit intégré dans son territoire et soit « une maison de retraite » ouverte sur la vie de quartier ou de village.
Une fois la décision prise, l’accompagnement humain s’appuie sur des faits précis : une entrée programmée à une heure confortable pour un bon accueil du résident ; un salarié qui prend le temps de lui faire visiter l’établissement pour l’aider à se repérer ; une place au restaurant anticipée et dont la pertinence est évaluée dès les premiers jours ; un recueil, précoce aussi, des habitudes de vie du résident, par le psychologue et l’animateur, en vue du travail d’accompagnement ; un point fait, après quelques semaines, entre le résident (si son état de santé le permet), son référent familial, l’infirmier coordonnateur et le responsable administratif pour donner des réponses aux demandes non satisfaites par la rédaction du contrat de séjour, désigner une personne de confiance en vue de la rédaction des directives anticipées, et proposer de participer à la vie de l’établissement (commission de vie sociale, bénévolat…).
La stabilité du personnel, qui accompagne le résident, est primordiale, car elle favorise le respect des habitudes de vie, crée une ambiance familiale et permet que l’information concernant le résident circule aisément entre tous les professionnels qui l’entourent.
L’Académie nationale de médecine insiste sur les précautions suivantes :
- Anticiper, autant que possible, la décision d’entrée pour pouvoir renforcer l’information du résident et de sa famille sur les modalités de prise en charge et les coûts des prestations proposées, afin que le choix d’un EHPAD de proximité se fasse dans le calme, suffisamment tôt par le biais d’une préinscription, et selon des critères d’entrée qui conviendront à la famille et réduiront les tensions en son sein. Avant la décision d’y entrer, la visite de l’établissement par le futur résident vise à lui permettre de se projeter dans son futur lieu de vie et à le rassurer ;
- S’assurer qu’en poursuivant sa vie dans un EHPAD, le résident polypathologique et dépendant se verra offrir des soins techniques, mais surtout un accompagnement humain, stable et chaleureux par les personnels les plus proches de lui, qui auront été formés et fidélisés le mieux possible ;
- Favoriser la diversité et la capacité suffisante des structures d’accueil, pour répondre aux différents besoins., au niveau de chaque territoire, car un modèle normatif et sécuritaire unique est inadapté aux aspirations sociales (libre choix, sécurité, liberté de circuler, maintien du lien social) ;
- Veiller à ce que l’information préalable, indispensable à la décision éclairée d’une entrée en EHPAD, soit la plus largement disponible, y compris sur les sites des autorités régulatrices ministérielle ou régionales.
Contact presse : Virginie Gustin : virginie.gustin@academie-medecine.fr