Après presque une année de passe sanitaire (1), l’obligation vaccinale pour les soignants (2) puis l’instauration du passe vaccinal (3), le SNJMG rappelle son attachement à une gestion de la pandémie de COVID-19 la plus sûre et la plus juste possible, dans l’intérêt de toustes. Au-delà de l’incitation à une vaccination massive, à la fois souhaitable et légitime, le SNJMG souhaite alerter les dysfonctionnements des procédures de reconnaissance des contre-indications vaccinales.
En effet, la loi prévoit une liste limitative de contre-indications à la quelle a été ajoutée ensuite la possibilité de reconnaissance de contre-indications rares (4). Ces dernières contre-indications sont établies en concertations médicales pluridisciplinaires qui, si elles interviennent avant l’initiation de la vaccination pour le COVID-19, doivent de plus être réalisées par un centre de référence maladies rares (CRMR) ou un centre de compétence maladies rares (CCMR). Cette procédure est lourde, encore davantage pour les personnes éloignées du CHU et pose semble-t-il problème concernant les cas mal documentés initialement.
On rappelle que l’instauration du passe est basée sur deux piliers : une exigence de santé publique d’une part et la garantie d’une balance bénéfice-risque favorable à titre individuel, garantie fondée sur la réalisation d’essais cliniques. Or la généralisation des résultats de ces essais à des patient-es présentant un possible surrisque vaccinal du fait de leurs antécédents est problématique ; concernant les maladies rares, la réalisation de tels essais est par définition impossible. Les décisions prises en réunions de concertations multidisciplinaires dans ces cas relèvent donc uniquement de l’avis d’expert, dont le niveau de preuve est internationalement reconnu comme étant faible (5) quelle que soit la qualité, le nombre ou la renommée des experts.
Par ailleurs, ces situations sont rares et les éventuelles non-vaccinations n’ont donc pas d’impact potentiel en termes de santé publique. Les prises de décision résultant des réunions de concertations multidisciplinaires donnent donc droit de vie ou de mort physique ou sociale des patient-es à des experts, sur des arguments de faible niveau de preuve et dont les conséquences n’impactent que le patient lui- même. Il s’agit de personnes déjà éprouvées par la maladie, parfois iatrogène, qui ont alors à faire le choix impossible entre une prise de risque physique majeure et une marginalisation. La sagesse et la déontologie imposerait donc de ne pas rendre ces avis d’experts contraignants pour les patient-es, à chaque fois que l’absence de surrisque ne peut pas être formellement prouvé.
Enfin, au-delà des drames individuels, cette situation ouvre la porte à toutes les récupérations et présente, à ce titre, un danger en termes de santé publique : une bonne campagne de vaccination est aussi une campagne qui gère bien les contre-indications. Le SNJMG appelle donc les praticien-nes impliqué-es dans ces réunions de concertation à l’humilité et les responsables politiques à la simplification des procédures, pour préserver la crédibilité des politiques de santé publique sur le long terme.
- 1 « Crise du Covid : l’article sur le passe sanitaire finalement adopté après un nouveau vote », Le Parisien, 11 mai 2021.
- 2 Loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire », Vie publique.fr.
- 3 « Projet de loi renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique »
- 4 https://www.ameli.fr/rhone/assure/actualites/covid-19-dans-quels-cas-la-vaccination-est-elle-contre-indiquee
- 5 HAS. (2013). Niveau de preuve et gradation des recommandations de bonne pratique—État des lieux. Haute Autorité de Santé.