Dans le cadre de la Journée internationale contre l’abus et le trafic de drogues du 26 juin et à l’occasion de la sortie du Rapport mondial sur les drogues de l’ONUDC aujourd’hui, l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT) publie un nouveau numéro de Drogues, enjeux internationaux, consacré à la situation de la méthamphétamine, un stimulant de type amphétaminique très puissant aussi appelé ice, en Polynésie française. Ce numéro présente les résultats d’une recherche menée entre 2019 et 2021 par deux sociologues, Alice Simon et Alice Valiergue. Il dresse un tableau de la consommation et du trafic d’ice, et analyse les limites de la réponse publique de l’État social en Polynésie française pour lutter contre ce phénomène.
Importée majoritairement des Etats-Unis par voie aérienne depuis les années 2000, la méthamphétamine s’est diffusée en Polynésie française depuis 2010, malgré son prix élevé, dans un contexte de faible circulation d’autres stupéfiants, à l’exception du cannabis. En Europe, si les niveaux de consommation restent probablement bien moindres, on observe néanmoins une diffusion de la consommation dans les pays de l’Ouest et du Sud, comme le suggère le Rapport européen sur les drogues publié par l’EMCDDA ce mois-ci. La synthèse proposée dans ce numéro revient sur l’historique de la diffusion de l’ice dans une région particulièrement touchée par ce phénomène et sur le processus de mise sur agenda politique de cette question constituée, à l’échelle de quelques années, en problème public.
Une politique répressive qui invisibilise le problème social des usages de méthamphétamine
Depuis 2017, endiguer la crise de l’ice est devenu une priorité publique en Polynésie française. Pour y répondre, le renforcement de l’application de la loi, compétence de l’État, a été la principale solution envisagée, au détriment d’une consolidation des politiques sociales et sanitaires, relevant des prérogatives du Gouvernement de la Polynésie française. Face au manque de moyens humains au sein des équipes soignantes et de la difficulté de créer et de pérenniser des structures d’accompagnement en addictologie et de réinsertion, les services de l’application de la loi endossent les missions de prévention, loin des recommandations des experts.
Cette contribution montre que ce cadrage répressif du problème de l’ice occulte d’autres dimensions essentielles pour comprendre et lutter contre ce phénomène. En premier lieu, le rôle des inégalités sociales, particulièrement fortes en Polynésie française. De plus, l’ice est rarement considérée dans les discours médiatiques et politiques comme un problème de santé publique. En s’appuyant sur l’exemple de l’ice, ce numéro de Drogues, enjeux internationaux souligne la nécessite de privilégier l’accompagnement social et l’offre de soins dans les politiques de lutte contre les drogues, afin d’apporter une réponse durable aux problèmes d’addiction observés en Polynésie française.
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