Le PLFSS 2023 actuellement examiné au Parlement ne permettra pas de rétablir le droit effectif à la santé pour tous et partout. Le gouvernement claironne qu’il veut investir pour la santé et propose un texte qui ne la finance pas avec un ONDAM en dessous de l’évolution tendancielle des dépenses de santé et en recul dans un contexte de forte inflation.
Le gouvernement poursuit le « définancement » de la Sécurité sociale
Sur les recettes, le sous financement chronique de la Sécurité sociale restreint les moyens alloués et creuse la dette, justifiant in fine des reculs de prestations. La multiplication des exonérations et leur non-compensation, qui engendre une perte de recette évaluée à 9 milliards d’€ en 2020, aggrave encore la situation.
Côté dépenses, l’affichage de l’exécutif pour « préparer l’avenir du système de santé » se heurte à la réalité : l’évolution globale de l’ONDAM, de +3,7%, est inférieure à la croissance tendancielle des dépenses de santé (progrès scientifiques, vieillissement de la population, développement des maladies chroniques) estimée à 4,4% selon le gouvernement lui-même. Mécaniquement, cet écart défavorable entraîne une limitation délétère des dépenses à hauteur de -1,7 milliards d’€. D’autant qu’il faut conjuguer cela avec la reprise d’une inflation élevée, supérieure à 5% sur l’année.
Pour l’hôpital, la hausse de l’ONDAM 2023 doit couvrir les mesures du Ségur annoncées il y a 2 ans et le dégel – provisoire – du point d’indice et l’inflation. Ce PLFSS ne permet donc pas de fournir à notre service public hospitalier les moyens financiers et des conditions d’exercice dignes dont il a depuis longtemps besoin. Faute de moyens, le système de santé s’est rompu cet été mettant la population en danger vital. L’ONDAM constitue également une enveloppe dérisoire pour mettre en œuvre la réforme structurelle indispensable des soins de ville. Pour le secteur médico-social, les engagements sont insignifiants au regard des besoins constatés par les pouvoirs publics eux-mêmes. Il ne permettra en rien de répondre à la crise globale de notre système de santé.
Des « mesurettes » ne font pas une politique
Des mesurettes sont annoncées en matière de lutte contre les déserts médicaux (guichet unique des aides incitatives, 4e année d’internat, etc.), de prévention (gratuité de la contraception d’urgence, visite médicale aux âges clefs…) ou encore d’autonomie (2h de vie sociale, ouverture de 0,5 poste par EHPAD).
Certaines vont dans le bon sens. Aucune n’est à la hauteur des enjeux qui se posent au pays en matière de santé. Aucune ne répond à l’urgence de la situation : la pénurie de professionnels s’accélère et les recrutements sont insuffisants, les moyens supplémentaires en formation, inexistants et l’attractivité des métiers n’est toujours pas assurée. Le virage préventif attendu avec la création d’un « ministère de la Santé et de la prévention » est raté.
« En même temps », le gouvernement fait payer ses décisions aux assurés sociaux
Avec un transfert de charges de 300 millions d’€ en année pleine (150 millions pour 2023), le gouvernement se sert à nouveau dans la poche des adhérents des mutuelles. Après le « reste à charge 0 » largement financé par les cotisations aux complémentaires santé (1,57 milliard d’€ de dépenses supplémentaires en 2021 selon le baromètre de l’UNOCAM), il prend la responsabilité de renchérir encore la complémentaire santé, et donc l’accès aux soins.
Le maintien des taxes sur les cotisations mutualistes, qui pèsent l’équivalent de deux mois de cotisations, renforce la difficulté d’accès à la complémentaire santé, singulièrement pour les non-salariés (chômeurs, étudiants, retraités). Supprimer cette taxe reviendrait à rendre immédiatement l’équivalent de 2 mois de cotisations aux adhérents mutualistes.
La Sécurité sociale mérite mieux que ce PLFSS
Pour répondre à des besoins de santé plus importants, pour remettre sur pied un système de santé abimé par des décennies d’asphyxie budgétaire, il faut aborder de face la question des recettes et enfin solliciter l’ensemble des richesses créées. La sécurité sociale, ce bien commun si utile, mérite une loi de financement à la hauteur de la situation et pas un texte qui, de nouveau, organise la pénurie au détriment de la population.
Contact : denis.quinqueton@mutuelles-de-france.fr