Le titre du Monde de ce jour est sans appel « Les lobbies de l’industrie chimique ont gagné ». Malgré les pressions et les attentes des ONG, de certains pays (dont la France…) et de certains eurodéputés, la révision de la règlementation européenne sur les produits chimiques va être repoussée, et probablement après 2024.
C’est une énorme déception et surtout une source d’inquiétudes car cela signifie que les décisions visant à exclure du marché européen des familles de produits chimiques dangereuses seront décalées d’autant. Pour rappel le 25 avril, la Commission européenne présentait sa « feuille de route » pour éliminer les substances chimiques les plus dangereuses pour la santé et l’environnement des produits de grande consommation à l’horizon 2030. A l’époque, les ONG de défense de l’environnement, dont Générations Futures, ont salué cette feuille de route et la stratégie chimique proposée.
La mise en œuvre de cette dernière nécessitait la révision deux règlementations clés : Reach pour Enregistrement, évaluation et autorisation des produits chimiques et CLP pour Classification, étiquetage et emballage des substances et des mélanges.
Quelles sont les enjeux majeurs de cette révision ? Elle devait permettre notamment :
- l’évaluation des chimiques non plus substance par substance mais par famille de produit et cela change tout ! Par exemple pour les fameux PFAS(perfluorés), famille de 4800 substances, on ne sera plus obligé de s’attaquer à chaque molécule individuellement pour les voir disparaitre du marché du fait de leur dangerosité pour l’environnement (très grande persistance notamment) et pour la santé, mais ce sera l’ensemble de la famille qui sera concerné par cette interdiction.
- l’identification – enfin – des fameux perturbateurs endocriniens car pour le moment les données pour cette identification ne sont pas demandées ! Et donc l’exclusion de ces substances dangereuses.
- la possibilité de prendre – enfin ! – en compte l’exposition à des mélanges de substance en vue de limiter le risque d’effets cocktail
- la possibilité d’interdire certains usages grand public et professionnel de substances les plus dangereuses.
Bref tout un panel de mesures indispensables à la protection des citoyennes et des citoyens européens et de leur environnement. Le report de cette réforme est donc dramatique d’un point de vue sanitaire car avec les échéances électorales de 2024 (élection des eurodéputés) c’est tout le dispositif qui pourrait être remis en cause !
Et la faute à qui ? La faute aux géants de la chimie qui depuis des mois n’ont de cesse de tirer à boulets rouge sur le Green Deal et cette stratégie sur les produits chimiques. Mais aussi à la France ! C’est également le résultat d’un travail de sape de la direction chargée du marché intérieur et de l’industrie qui fut à l’œuvre par la voix de son commissaire …. Thierry Breton (comme le note l’article du Monde du jour).
« En décidant du report de la révision de règlement REACH sur les produits chimiques, la Commission Européenne, sous pression de l’industrie chimiques se résigne à exposer les populations européennes pendant encore des nombreuses années à des substances chimiques dangereuses qui auraient été éliminées par la révision initialement prévue en 2022-2023 », s’insurge François Veillerette, porte-parole de Générations Futures.
« Nous constatons avec écœurement que, sous prétexte de guerre en Ukraine, ce sont en fait les intérêts de l’industrie, de la compétitivité et de la finance qui ont gagné au mépris de la santé humaine et de l’environnement » conclut-il.
Contacts presse
- Francois Veillerette (porte-parole) : francois@generations-futures.fr
- Nadine Lauverjat (déléguée générale) : nadine@generations-futures.fr
Pour aller plus loin, lire « La Commission européenne adopte son programme de travail pour 2023 »