Aujourd’hui, c’est la grève des laboratoires de biologie médicale de ville appelant les patients à se tourner vers les hôpitaux pour y réaliser leurs examens sans que nous y soyons préparés et sans anticipation.
Cette grève a une forte retombée sur les laboratoires hospitaliers mais aussi sur les services d’urgences déjà soumis à de fortes contraintes. Certains de nos confrères biologistes hospitaliers ont dû fermer leur centre de prélèvement devant l’arrivée massive de patients demandant des PCR au détriment des patients de consultations. Certains signalent même un blocage de l’accès à leur l’hôpital en raison d’embouteillage comme devant les stations services. Cette grève est annoncée comme reconductible !
Aujourd’hui, les internes en médecine sont en grève illimitée car les politiques veulent leur imposer une année d’étude supplémentaire et des modalités d’installations restrictives pour boucher les trous dans les zones médicalement désertées.
Aujourd’hui, la psychiatrie, la pédiatrie sont en charpie et cette dernière vit une nouvelle crise sanitaire, conséquence inattendue d’une banale épidémie annuelle pour laquelle le plan de gestion des crises exceptionnelles ORSAN EPI-VAC doit être déclenché.
Quant au reste de l’hôpital public, il s’effondre chaque jour un peu plus, grevé par l’inaction coupable des tutelles et du gouvernement qui ne répond que par à coup sans traiter le fond des problèmes ?
Demain est annoncée la grève des médecins généralistes comme celle de nos collègues spécialistes libéraux… Sera-t-elle anticipée ?
Où vont aller les patients sinon dans les urgences hospitalières et à l’hôpital public qui va devoir encore répondre à la sacro-sainte mission de continuité des soins ? Ce privilège obligatoire, quasi exclusif est de plus en plus pénible et presque toujours réservé aux acteurs hospitaliers.
Le système de santé français craque de tout côté et au lieu de construire un dialogue social indispensable pour mettre à plat les problèmes et aborder collectivement avec les solutions issues du terrain, le gouvernement continue à opposer libéraux et hospitaliers, à contester l’évidence. Ce gouvernement fait le choix d’appliquer des méthodes type grand débat avec une communication vers la population indiquant que tout est sous contrôle alors que rien ne l’est.
Nous avons pris en charge la majorité des malades COVID sans matériel, sans protection et avec un manque criant de personnel et de lits d’hospitalisation. Pour nous remercier le gouvernement a proposé le SEGUR qui devait répondre aux mouvements d’alerte de 2019 lancés par tous les soignants. Au final, en juillet 2020, des accords ont été signés sans tenir compte du contexte antérieur en termes de lits d’hospitalisation, comme du nombre de soignants et de praticiens ou de la juste valorisation de leur engagement pour la santé de nos concitoyens.
L’absence de dialogue social pilotée par le gouvernement doit être immédiatement corrigée et de manière efficace en arrêtant les palliatifs et les mensonges !
Nous avons encore passé l’été 2022 avec nombre de services d’urgence qui ont tenu comme ils pouvaient, nombre d’établissements de santé qui ont fait de leur mieux pour garder un accès à des soins de qualité et pour assurer la sécurité des patients que nous avons pris en charge.
Nous avons continué de remplir les tableaux de permanence des soins avec un nombre de médecins et de soignants insuffisants, en essayant de combler les trous dans nos plannings. Des services entiers ont dû fermer dans un silence assourdissant et inhumain. Des malades ont attendu un lit d’hospitalisation plus de dix jours sur des brancards aux urgences avec des pertes de chance qui ontmarqué au fer rouge, malades, familles et soignants.
Nous sommes allés au bout de ce que nous pouvions faire, notre résilience est simplement morte. Nous n’en pouvons plus, pire, nous ne pouvons plus faire et nous n’accepterons plus d’être les complices de cette maltraitance institutionnelle organisée.
Le personnel médico-soignant hospitalier est en sous-effectif chronique avec un manque de lits qui explose. La crise des vocations et les départs de personnels ne semblent plus inquiéter ce gouvernement qui communique que la situation est sous contrôle, fait l’autruche sur nos problèmes et le sens de notre engagement dans un soin de qualité pour tous. Notre épuisement professionnel est banalisé.
Les déserts médicaux deviennent légion. La France entière est devenue un désert médical, à la merci d’une épidémie. L’insécurité sanitaire se propage et notre système de santé solidaire, voulu et organisé par le véritable CNR, au service de chaque français mais aussi de la Nation devient solitaire et mortifère.
Action Praticiens Hôpital alerte et crie une fois de plus qu’il faut redonner du sens rapidement à l’engagement des praticiens et des soignants toutes spécialités confondues en ville, dans le médico-social comme à l’hôpital public.
Action Praticiens Hôpital est et restera une force de propositions pour analyser les besoins de soin de la population, pour proposer des organisations novatrices dans le respect de nos missions respectives et dans la bienveillance que nous devons aux malades et à nos équipes.
Il n’y a pas de fatalité. Nous proposons un constat et une analyse de terrain pour retrouver le chemin du juste soin à laquelle chaque français a droit et aussi pour retrouver la qualité de vie professionnelle et personnelle à laquelle chaque soignant a droit.
Le territoire est le bon niveau de prise en compte des besoins comme le secteur de psychiatrie l’a démontré. Cependant s’il n’y a pas une réelle volonté nationale autour d’une politique sanitaire en cohérence avec l’analyse des besoins de santé de la population, comme des forces de santé en présence, la désertification pourrait continuer. Des états généraux ou assises sur la santé en général avec un focus sur certaines spécialités comme la pédiatrie, la psychiatrie, la biologie…. nous semblent indispensables.