Face aux dérives persistantes au sein de structures privées lucratives accueillant des personnes âgées en perte d’autonomie, l’Uniopss interpelle l’État, les départements et les collectivités locales. Elle appelle à la construction d’une politique publique globale et ambitieuse autour de 5 axes.
La sortie en édition de poche du livre Les Fossoyeurs de Victor Castanet remet en lumière les dérives d’acteurs du secteur privé lucratif et rappelle une nouvelle fois que la recherche maximale de profits est incompatible avec l’accompagnement des personnes vulnérables, en particulier lorsqu’elles sont en perte d’autonomie.
Au-delà de nouveaux chapitres dénonçant des pratiques visant à empêcher la connaissance par le grand public de faits injustifiables, l’Uniopss tient à réaffirmer quelques évidences déjà exprimées lors de la révélation de « l’affaire Orpéa ».
Tout d’abord, ces dérives, qui sont néfastes en premier lieu pour les personnes accompagnées et pour leurs proches qui font confiance à des institutions reconnues par les autorités publiques, le sont aussi pour la grande majorité des professionnels exerçant dans ces établissements. Comme nous le disions il y a un an, ces derniers, engagés dans le soin et l’accompagnement des personnes âgées la plupart dépendantes, déploient des efforts considérables pour maintenir une qualité de prise en charge dans un contexte dégradé connu de tous, comme d’autres le font dans des structures publiques et nos établissement et services privés non lucratifs.
Ces dérives sont aussi le résultat d’un manque systémique de moyens qui crée en conséquence des restes à charge insupportables pour les personnes et leurs familles. La réponse des pouvoirs publics n’est pas à la hauteur des attentes créées par ce scandale. Alors que le CNR « Fabrique du bien vieillir en France » n’a pas encore livré ses conclusions, le ministre des Solidarités, de l’Autonomie et des Personnes handicapées a annoncé la création d’une plateforme internet permettant de signaler les maltraitances et livré un bilan des premières inspections-contrôles approfondies des établissements.
Or, signaler et contrôler des acteurs sous-financés ne seraient réellement utiles qu’une fois que des moyens concrets aient été dégagés. On risque sinon de ne voir finalement que ce que l’on sait déjà et de contraindre les professionnels à passer plus de temps à remplir des rapports qu’à être auprès des personnes.
Nous attendons donc de l’ensemble des autorités publiques qu’elles prennent leurs responsabilités :
– L’État, en allouant les moyens financiers nécessaires pour augmenter le ratio de professionnels par personne accueillie en Ehpad en le portant à 8 pour 10, comme dans nombre de pays européens, et pour permettre, de même, le renforcement des actions au domicile. Cela est particulièrement d’actualité au moment où des discussions se poursuivent afin de sauver un acteur lucratif défaillant par des moyens publics, plutôt que de soutenir le secteur associatif qui dépend entièrement de financements publics ;
– L’État aussi, au regard des dérives décrites dans le livre de Victor Castanet, en arrêtant, de manière préventive, toute nouvelle habilitation ou tout nouvel agrément des structures lucratives ;
– Les départements, en assurant de manière effective la charge financière des aspects autres que sanitaires, à savoir l’accompagnement, l’animation, ainsi que l’aide sociale pour les personnes âgées aux revenus les plus faibles ;
– L’ensemble des pouvoirs publics, alors que la création de la 5ebranche a suscité beaucoup d’espoirs, à agir concrètement sur les restes à charge, facteurs d’inégalités criantes quant au respect des droits fondamentaux des personnes ;
– Les collectivités locales, enfin, qui doivent peser sur les choix du modèle de structures qui s’implantent dans leur commune. Personne ne peut aujourd’hui se dédouaner du soutien accordé par la méconnaissance d’évènements se situant sur leur territoire et concernant leurs administrés.
Pour leur part, avec les associations, fédérations, fondations et mutuelles non lucratives membres de notre réseau,l’Uniopss s’engage à être force de propositions autour de 5 axes majeurs: renforcer la citoyenneté des personnes accompagnées, accentuer le pilotage territorial des politiques de l’autonomie, revoir le modèle de financement des structures, diversifier l’offre d’accompagnement en facilitant l’innovation, agir face à la pénurie des métiers.
Dans les semaines qui viennent, partout où nous sommes présents, dans les territoires comme au niveau national, nous défendrons une véritable nouvelle politique publique indispensable et trop attendue, ambitieuse pour répondre aux défis du vieillissement de la population et à la perte d’autonomie. Au-delà des discours, 2023 doit être enfin l’année des décisions.
Contact presse : Valérie Mercadal – vmercadal@uniopss.asso.fr