La proposition de loi Valletoux, c’est un mauvais revival de la loi HPST.Modification de la gouvernance hospitalière, réorganisation des organes de démocratie sanitaire, nouvelles obligations et contraintes territoriales pour les médecins, le tout sans revalorisation financière du travail médical, sans simplification administrative, bref sans considération de ceux qui tiennent encore la barre. Une réforme pour tout changer et ne rien solutionner dans le même temps, voilà ce qu’a été la loi HPST et il est probable que la PPL Valletoux double la mise.
Instaurer la permanence des soins obligatoire aux praticiens libéraux sans prendre en compte que l’activité libérale est déjà saturée et fragile et que les médecins de ville n’ont pas de repos de sécurité. Constater que 45% des médecins généralistes sont en burn-out sans libérer de temps médical mais imposer des consultations avancées en zone sous dotées en sus de leur activité. Interdire l’intérim médical des jeunes sans fidéliser les médecins hospitaliers. Constater que le système de santé est complexe, suradministré et trop centralisé, mais n’en supprimer aucun échelon de décision. Compter sur une main d’œuvre étrangère bon marché pas soumise aux mêmes exigences et pas bénéficiaire des mêmes droits, sans donner le statut plein et entier aux médecins étrangers déjà installés et sans augmenter les moyens pour la formation des jeunes médecins dans tous les départements. Ce sont autant de coups d’épée dans l’eau !
À la différence de la loi HPST, la PPL Valletoux n’affiche même pas l’ambition de tout changer. Il faut dire que le député Valletoux est un homme du système. Être à la tête de la Fédération des hôpitaux de France (FHF) de 2011 à 2022 ne lui a pas permis de changer la donne. Comme tant d’autres, il a défendu le discours politique majoritaire selon lequel l’hôpital public devait comme toute administration participer à l’effort de maîtrise des comptes, quitte à ce que cela induise des suppressions de postes. Puis, après le début de la crise sanitaire, il a soutenu le Ségur de la Santé, cet accord qui a mobilisé tous azimuts 30 milliards d’euros pour l’hôpital, sans être capable d’endiguer le naufrage d’un système de santé.
Le député Valletoux a raison : les syndicats de médecins « n’ont pas toujours un discours qui éclaire l’avenir », mais les élus et les administrations non plus. Notre modèle a besoin d’une réforme en profondeur, mais personne n’a eu le temps ni le courage de la préparer durant la dernière décennie : ni la profession, ni ses représentants syndicaux, ni les pouvoirs publics. Comment faire autrement quand autour de la table ce sont toujours les mêmes qui siègent, qui s’écoutent parler, qui refusent le changement qui s’imposera pourtant ?
Jeunes Médecins regrette de ne jamais avoir été auditionné par le député Valletoux, car notre génération porte régulièrement des propositions qui la démarquent. La refonte des ordonnances Debré pour mettre fin un système hospitalo-universitaire sclérosé, la redéfinition des missions des établissements publics et privés de santé pour arrêter la concurrence malsaine, des statuts de praticiens de second recours permettant un exercice sur tout type d’établissements avec une plus grande flexibilité, un investissement majeur dans la médecine de premier recours qui pourrait bénéficier de l’orientation de la plus grande part des étudiants en médecine, sont autant des propositions issues de notre livre blanc.
Il est certain que la PPL Valletoux sera votée le mois prochain et qu’elle aura, d’ici là, intégrer par la voie des amendements de nouvelles obligations (intégration des CPTS, permanence des soins, consultations avancées) et autres mesures contraignantes voire coercitives. En effet, cette PPL s’inscrit dans une combine politique : le Président de la République ne voulait pas deux propositions de loi santé, alors le texte de Valletoux évoluera fortement sous l’effet des amendements déposés par le groupe de travail transpartisan mené par le député Garot.
De nouveau, on va court-circuiter la démocratie sociale pour passer en force par la loi des mesures qui relèvent des discussions avec les organisations syndicales. C’est un mauvais signal mais surtout une impasse : la PPL ne résoudra rien et, pire, elle accélèrera le délitement de ce qui reste de la médecine libérale et hospitalière. Car vous ne pourrez pas en demander plus à ceux qui ne peuvent plus en donner davantage.
Quand tous les changements du système de santé échapperont à ceux qui sont les premiers effecteurs de soins, chacun aura sa part de responsabilité. C’est la raison pour laquelle la jeune génération, qui sera la première impactée, doit se mobiliser maintenant à nos côtés ! Jeunes Médecins reste le réceptacle de leur colère justifiée.
Contacts presse :
Emanuel Loeb
Président Jeunes Médecins
president@jeunesmedecins.fr
Mélina Elshoud
Directrice des affaires publiques
jm.aff.publiques@gmail.com