Alors que Gabriel Attal vient d’annoncer un plan pour lutter contre la fraude sociale, l’Uniopss dénonce une communication stigmatisante à l’encontre des bénéficiaires des allocations sociales. Elle rappelle en parallèle l’ampleur du non-recours à ces aides, dont la lutte nécessite également des financements conséquents de la part des pouvoirs publics.
Le ministre des Comptes publics a dévoilé le 30 mai une série de mesures pour lutter contre la fraude sociale, avec, notamment, la mise en place de mille postes supplémentaires durant ce quinquennat et un investissement d’un milliard d’euros dans les systèmes d’information.
Si l’Uniopss est bien entendu favorable à lutter contre toutes les formes de fraudes, elle souhaite tout d’abord rappeler que le terme « fraude sociale » comprend à la fois des fraudes aux prestations sociales, mises souvent sur le devant du débat public, mais aussi la fraude aux cotisations sociales qui ne sont pas le fait de particuliers. Ensuite, beaucoup des fraudes à l’Assurance maladie viennent de déclarations erronées, volontaires ou non, des professionnels de santé. Enfin, derrière le terme de fraude aux prestations, se situent des fautes non intentionnelles liées à des déclarations erronées.
Selon Gabriel Attal, le montant de la fraude liée aux personnes touchant indûment le revenu de solidarité active s’élèverait à 1,2 milliard d’euros par an. Si aucune fraude – donc intentionnelle – ne peut être justifiée, les moyens déployées et le discours stigmatisant visent généralement, et ici encore, plus les personnes pauvres dans leur généralité que des populations plus aisées qui pratiquent des formes d’évasion fiscale, à la limite de la légalité, voire totalement illégales.
Ce discours qui se développe sur la « fraude sociale » répand, en outre, l’idée que les droits économiques et sociaux se méritent ; Il inocule une suspicion généralisée à l’encontre de bénéficiaires légitimes des politiques publiques. Or, pour être juste et acceptable, la lutte contre la fraude doit éviter l’amalgame et la division. Elle doit s’inscrire dans une politique globale d’accès aux droits sociaux. Car si le coût de la fraude à l’ensemble des prestations sociales se situe entre 6 et 8 milliards d’euros par an selon la Cour des comptes, l’économie pour les finances publiques résultant du « non-recours » à ces aides est bien supérieur.
Ainsi, l’Uniopss s’interroge sur les moyens, humains et financiers, qui seront effectivement consacrés à la lutte contre le « non recours ». De même, les budgets dégagés pour les mesures d’accompagnement en direction des personnes s’inscrivant dans le dispositif France Travail ne sont pas connus, y compris donc pour faire valoir les aides auxquelles elles ont droit. Plus généralement, quelles sont les perspectives pour les finances publiques si le tiers estimé de personnes qui n’effectuent pas actuellement les démarches nécessaires, réclamait les allocations auxquelles elles ont droit ? Rien que pour le RSA, il faudrait ajouter entre trois et cinq milliards d’euros par an, selon les estimations de la Drees de décembre 2022, et plusieurs dizaines de milliards d’euros supplémentaires toutes aides confondues.
Pour toutes ces raisons, le réseau Uniopss sera particulièrement vigilant quant aux conditions de mise en œuvre des contrôles annoncés et aux moyens déployés pour prendre en compte l’entièreté des situations des personnes concernées, afin que la lutte légitime contre la fraude ne se transforme pas, de fait, en un regard négatif sur les personnes en situation de précarité.
Contact presse : Valérie Mercadal – vmercadal@uniopss.asso.fr