Le BEH n°7, paru mardi 15 avril 2025, comprend 3 articles.
Résumé du contenu :
- Indicateurs thermiques et recours aux soins d’urgence en France hexagonale entre 2015 et 2019,Léo Moutet et coll., Santé publique France, Saint-Maurice
Introduction – Chaque été, des augmentations de recours aux soins pour des causes spécifiques de la chaleur, comme les hyperthermies, sont observées en France hexagonale. Une meilleure compréhension de ces impacts est nécessaire pour accompagner les politiques de prévention. Une des questions porte sur la manière de caractériser l’exposition à la chaleur, prenant en compte uniquement la température ou d’autres variables météorologiques.
Méthodes – Cette étude compare l’influence de quatre indicateurs thermiques (température moyenne (Tm), la température au thermomètre globe mouillé (WBGT), le heat index (HI) et le universal thermal climate index (UTCI)) sur les passages aux urgences de 33 départements hexagonaux, pendant les étés (juin-septembre) de 2015 à 2019. Cinq causes ont été étudiées : hyperthermie, déshydratation, hyponatrémie, fièvre isolée et malaise. Les analyses s’appuient sur des régressions de quasi-Poisson.
Résultats – Avec tous les indicateurs, la chaleur est associée à un excès de risque de recours aux soins d’urgence pour hyperthermie, déshydratation, hyponatrémie, fièvre isolée et malaise. Les risques relatifs (RR) sont d’ordres de grandeur similaires entre indicateurs, sauf pour le HI. Par exemple, pour les hyperthermies, une augmentation d’exposition correspondant à l’intervalle interquartile est associée à un RR de 3,97 (intervalle de confiance à 95%, IC95%: [3,82-4,13]) avec la Tm, 3,81 [3,67-3,95] avec le WBGT, 4,22 [4,01-4,33] avec l’UTCI, et 1,22 [1,21-2,23] avec le HI.
Conclusion – Les résultats confirment qu’en France hexagonale, la Tm est un bon indicateur pour caractériser la chaleur du point de vue des effets sur la santé. Les indicateurs plus complexes incluant d’autres variables météorologiques n’expliquent pas mieux les effets. Des travaux documentant les circonstances d’exposition seraient utiles pour mieux comprendre l’intérêt de ces indicateurs d’exposition dans des contextes spécifiques comme, par exemple, les événements sportifs.
- Chaleur et performance sportive : quels moyens pour limiter les risques encourus ? Franck Brocherie et coll., Laboratoire sport, expertise et performance (EA7370), Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (Insep), Paris
Quel que soit le niveau de pratique sportive, s’entraîner et/ou participer à des compétitions en plein air en conditions chaudes (température de l’air >30-35°C) pose de réels défis quant à la thermorégulation, l’hydratation et in fine la performance sportive. Ces conditions peuvent, dans les cas extrêmes, avoir des conséquences dramatiques si l’intensité et/ou la durée d’exercice est maintenue. Alors que le changement climatique entraîne une augmentation de l’exposition à la chaleur, il devient primordial de fournir les informations et recommandations qui permettront de minimiser les dangers encourus par les sportifs de tout niveau.
Lorsqu’elle est possible, une exposition répétée à un stress thermique (par exemple, 60 à 90 minutes à 35-40°C et 40% d’humidité relative) pendant 7 à 14 jours permet à l’organisme de s’acclimater à la chaleur. L’hydratation tient également un rôle essentiel pour compenser les pertes hydriques (sueur, dont la quantité augmente en environnement chaud) qui permettent de dissiper l’excès de chaleur produit par les muscles. De même, le choix et l’usage de stratégies de refroidissement (par ex., application externe (immersion en eau froide), interne (boisson froide ou glace pillée), ou combinée, administrée avant, pendant ou après un effort en conditions chaudes) permettent une meilleure tolérance physiologique et psycho-cognitive et une amélioration de la performance sportive.
Indépendamment de ces mesures, un certain nombre de recommandations sont à adopter pour les sportifs et tout autre participant, actif ou passif, à l’entraînement ou en compétition sportive (officiels, coachs, travailleurs/bénévoles et spectateurs), tout en prévoyant la restriction, le report ou l’annulation des activités physiques et sportives extérieures.
- Effet des canicules sur les passages aux urgences pour insuffisance rénale aiguë, décompensation cardiaque et ischémie myocardique en Auvergne-Rhône-Alpes, 2015-2022, Noémie Rossello et coll. Santé publique France – Auvergne-Rhône-Alpes, Lyon
Introduction – Les périodes de canicule induisent une surmortalité et augmentent l’impact de certaines comorbidités. Cependant, il existe un manque de recul sur l’influence sur les passages aux urgences en dehors de quelques pathologies très spécifiques de la chaleur. L’objectif de l’étude est d’étudier l’impact de la chaleur sur les passages aux urgences pour trois syndromes morbides actuellement non surveillés en routine en France : l’insuffisance rénale aiguë, la décompensation cardiaque et l’ischémie myocardique.
Méthodes – La période d’étude couvre les étés (1er juin au 15 septembre) 2015 à 2022 pour les 12 départements de la région Auvergne-Rhône-Alpes. Les données sanitaires ont été extraites du système de surveillance syndromique SurSaUD® (Surveillance sanitaire des urgences et des décès). Une analyse multivariée des nombres moyens de passages quotidiens en fonction des périodes de dépassement effectif de seuil canicule et des périodes de vigilance a été réalisée par régression binomiale négative.
Résultats – Un total de 14 060 passages aux urgences pour insuffisance rénale aiguë, 29 841 pour décompensation cardiaque et 17 749 pour ischémie myocardique sont survenus entre 2015 et 2022 durant les périodes d’étude en Auvergne-Rhône-Alpes. Le risque de passage aux urgences pour insuffisance rénale aiguë augmente de +47% (intervalle de confiance à 95%, IC95%: [39-56]) lorsque les températures dépassent les seuils d’alerte météorologiques, indépendamment du sexe, de l’âge, du département, du jour et du mois, ou en cas de température maximale >24°C, avec un risque croissant en cas de température très élevée. Ces effets ne sont pas mis en évidence pour les passages aux urgences pour décompensation cardiaque et pour ischémie myocardique.
Conclusion – Le risque de passages aux urgences pour insuffisance rénale aiguë augmente pendant les canicules et devrait inciter à mettre en place des mesures spécifiques de prévention de cette pathologie en période estivale.