Le BEH n°14, paru mardi 22 juillet 2025, comprend 2 articles dans le cadre de la Grande cause nationale 2025 Santé mentale.
Résumé du contenu :
Prévalence des états anxieux chez les 18-85 ans : résultats du Baromètre Santé publique France (2017-2021), Christophe Léon et coll., Santé publique France, Saint-Maurice
Introduction – Les troubles anxieux figurent parmi les troubles mentaux les plus fréquents dans le monde. La pandémie de Covid-19 a eu un impact majeur sur la santé mentale des populations en France et à l’international. Dans ce contexte, cette étude vise à estimer la prévalence des états anxieux dans la population générale adulte en France hexagonale en 2021, à identifier les facteurs qui leur sont associés et à analyser les évolutions observées depuis 2017. Elle teste notamment l’hypothèse selon laquelle les états anxieux auraient pu augmenter à la suite de la crise sanitaire, comme cela a été observé pour les épisodes dépressifs caractérisés.
Méthode – Les données sont issues du Baromètre de Santé publique France, enquête déclarative menée par téléphone, selon un sondage aléatoire, auprès de 4 829 personnes âgées de 18 à 85 ans en 2021 et de 6 413 personnes âgées de 18 à 75 ans en 2017. La présence d’un état anxieux a été évaluée à partir de la sous-échelle anxiété de la « Hospital Anxiety and Depression scale » (HAD-A). L’analyse des évolutions entre 2017 et 2021 a été restreinte à la population des 18-75 ans.
Résultats – En 2021, 12,5% des personnes âgées de 18 à 85 ans présentaient un état anxieux au moment de l’enquête (score strictement supérieur à 10 sur la sous-échelle HAD-A), avec une prévalence trois fois plus élevée chez les femmes (18,2%) que chez les hommes (6,4%). Entre 2017 et 2021, la prévalence des états anxieux est restée stable chez les 18-75 ans, quels que soient le sexe, l’âge (sauf la tranche des 65-75 ans), le niveau d’éducation, la situation professionnelle, la composition du ménage et la situation financière. Les facteurs associés aux états anxieux, communs aux deux sexes, étaient une situation financière juste ou difficile, un niveau d’éducation inférieur au baccalauréat, ainsi que la présence de comorbidités dépressives et de pensées suicidaires.
Conclusion – Contrairement à l’augmentation observée pour les épisodes dépressifs caractérisés, nos résultats ne montrent pas d’évolution significative de la prévalence des états anxieux entre 2017 et 2021. Ils suggèrent cependant une prévalence élevée des états anxieux, associée à de fortes inégalités sociales et à des comorbidités importantes. Ces résultats invitent à faciliter l’accès de la population, et notamment des plus défavorisés, aux dispositifs de prévention et de prise en charge des troubles anxieux.
L’entretien postnatal précoce réalisé par les sages-femmes de la Protection maternelle et infantile (PMI) de l’Hérault : données issues d’une étude départementale sur le dépistage de la dépression du post-partum en 2024, Sylvain Fèvre Gilson et coll., Service territorial de Protection maternelle et infantile (PMI) Béziers Centre Sud, Direction de la PMI, Conseil départemental de l’Hérault, Montpellier
Introduction – L’entretien postnatal précoce (EPNP) a été rendu obligatoire en France en 2022 afin de repérer les premiers signes de la dépression du post-partum (DPP) ou les facteurs de risques qui y exposent et d’évaluer les éventuels besoins de la femme ou du conjoint. L’objectif de notre travail était d’explorer les données issues de la réalisation de l’EPNP par les sages-femmes de Protection maternelle et infantile (PMI) du département de l’Hérault en 2024 pour voir si la pratique permettait de répondre aux principaux enjeux de prévention, de repérage et d’évaluation des besoins d’accompagnement inscrits dans le Code de la santé publique.
Méthodes – Toute patiente majeure ayant accouché d’un enfant vivant, pesant au moins 500 grammes ou âgé d’au moins 22 semaines d’aménorrhée, vue en consultation ou en visite à domicile par une sage-femme de PMI entre les 4e et 8esemaines après l’accouchement dans le cadre de l’EPNP, sur la période du 1er avril 2024 au 30 septembre 2024, sur le territoire du département de l’Hérault, était éligible. Les 24 sages-femmes de PMI formées à l’EPNP ont utilisé une trame d’entretien commune. Le dépistage de la DPP a été réalisé avec l’Edinburgh Postnatal Depression Scale (EPDS).
Résultats – En 2024, sur 6 mois, 277 EPNP ont été réalisés par les sages-femmes de PMI sur le département de l’Hérault : 14 patientes ont refusé de participer à l’étude, 263 EPNP ont été inclus. Les EPNP ont majoritairement été réalisés au domicile des patientes. La grossesse a été vécue difficilement dans 40% des cas (intervalle de confiance à 95%, IC95%: [34,5-46,9]), l’accouchement dans 31% des cas [25,3-37,0], avec pour près de 15% [10,8-20,0] des patientes un accouchement vécu comme traumatique. Les mères ont vécu difficilement le retour à domicile pour près d’un quart d’entre elles. Bien qu’elles étaient majoritaires à déclarer être soutenues au retour à domicile (80%), en sécurité (89%), et entourées (57%), la fatigue était fréquemment retrouvée (73%), tout comme l’isolement (39%) et l’anxiété (33%). Plus de 94% des EPNP ont abouti à la réalisation du dépistage de la DPP par l’EPDS. Près de 3 femmes sur 10 (29,8% [24,3-36,0]) présentaient des signes modérés à majeurs de DPP (EPDS≥10), 1 femme sur 6 (16,1% [11,9-21,4]) était fortement symptomatique (EPDS≥13).
Discussion – Notre étude révèle que l’EPNP est bien accepté par les patientes, qu’il permet de recueillir des données importantes sur l’état de santé des femmes dans les semaines qui suivent l’accouchement, répondant ainsi aux principaux objectifs inscrits dans la loi. La prévalence estimée de la DPP à partir de l’EPDS réalisé lors de l’EPNP entre les 4e et 8e semaines après l’accouchement vient confirmer les résultats observés lors de l’Enquête nationale périnatale 2021. L’ensemble de nos résultats montre toute la pertinence de l’ajout de l’EPNP dans le parcours périnatal, à condition qu’il soit réalisé par des professionnels formés disposant d’outils adaptés et validés, avec un réseau pour orienter les patientes.