Le plan de la MILDT a donc été rendu public, et nous ne cachons pas une certaine déception devant son manque d’ambition.
Il est vrai qu’après des années passées à subir une MILDT uniquement axée sur le volet répressif, l’attente était forte. Certes, il y a des avancées dans le plan, comme la reconnaissance du matériel pour le sniff et l’inhalation des drogues comme outil de réduction des risques (il était temps) où le focus sur les femmes usagères, axe par ailleurs investi par AIDES avec le soutien de l’INPES.
Malheureusement, les mesures tant attendues sur l’accès aux seringues en milieu carcéral ou la diversification de la palette des traitements de substitution attendront visiblement encore un moment… Et c’est d’autant plus dommage qu’une grande partie des usagers de drogues massivement touchés par l’hépatite C ne peuvent pas attendre.
Le plan annonce également l’ouverture d’une salle de consommation à Paris dans un premier temps, puis dans une ou deux autres villes ; c’est une bonne nouvelle et AIDES soutient bien évidemment cette initiative.
Par contre, le plan reste atone sur l’éducation à l’injection. C’est dommage car AIDES et Médecins du Monde, avec le soutien de l’agence nationale de recherche sur le sida et les hépatites (ANRS), expérimentent depuis 2011 ce modèle d’intervention auprès des consommateurs de drogues par injection. La recherche ANRS-AERLI (accompagnement et éducation aux risques liés à l’injection) a accueilli quotidiennement, dans huit villes de France, des personnes consommant des drogues par injection pour leur offrir des conditions d’injection et d’accompagnement conformes aux exigences de santé publique.
L’analyse des données issues de cette recherche est en cours et les résultats seront connus début 2014.
Mais nous pouvons déjà constater que ce modèle d’espace de consommation à moindre risque peut être implanté sans dommage pour les personnes ni trouble à l’ordre public dans des structures de réduction des risques comme les CAARUD. Il s’agit sans doute du modèle d’avenir pour toutes les villes de province dans lesquelles il n’existe pas de concentration (de scène ouverte) de consommateurs mais où les besoins n’en sont pas moins criants en termes de santé pour ce public.
« Le plan développant la recherche et l’évaluation comme piliers de la politique du Gouvernement, nous ne pouvons qu’inviter nos décideurs à avoir le courage d’assumer ce que montre déjà l’évidence scientifique. Les salles de consommation, les programmes d’échanges de seringues en prison, la substitution injectable sont des interventions qui ont fait leur preuve, il faut avoir le courage politique d’assumer l’évidence scientifique et d’anticiper les futures avancées dans le domaine de la RDR » déclare Bruno Spire, Président de AIDES.
Malheureusement, il reste un obstacle de taille à la mise en place de dispositifs innovants, passé sous silence par le plan : la loi de 70 et ses effets dévastateurs pour la santé des usagers de drogues.
Et Christian Andréo, directeur du plaidoyer, de conclure : « Nous l’avons tellement répété que cela en devient absurde. Mais pour être entendus, encore faudrait-il que nous, usagers de drogues, soyons reconnus dans notre pleine citoyenneté. Tant que la loi fera de nous des délinquants, nous continuerons à n’être au mieux que des malades qu’il faut soigner. »
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