D’après une étude réalisée en 2014 avec le parrainage de l’OMS sur les toutes dernières données disponibles, on estime que jusqu’à 1,7 million de personnes ont été contaminées par le virus de l’hépatite B, jusqu’à 315 000 par le virus de l’hépatite C et pas moins de 33 800 par le VIH à la suite d’une injection à risque. Dans les nouvelles lignes directrices et la nouvelle politique de sécurité des injections qu’elle publie aujourd’hui, l’OMS fait des recommandations détaillées et insiste sur l’utilité des dispositifs de sécurité des seringues, y compris ceux qui protègent les agents de santé contre les piqûres d’aiguille accidentelles et, partant, contre le risque d’infection.
L’OMS souligne également la nécessité de réduire le nombre d’injections superflues pour réduire le risque d’infection. Chaque année, 16 milliards d’injections sont effectuées. Environ 5 % de ces injections sont destinées à vacciner les enfants et les adultes et 5 % servent à d’autres actes comme la transfusion sanguine et l’administration de contractifs injectables. Les 90 % restants des injections sont pratiquées dans le muscle (voie intramusculaire) ou dans la peau (voie sous-cutanée ou intradermique) pour administrer des médicaments. Dans bien des cas, elles ne sont pas nécessaires et pourraient être remplacées par l’administration par voie orale.
« On connaît les raisons de cette situation », explique le Dr Edward Kelley, Directeur du Département de l’OMS Prestation de services et sécurité. « L’une d’entre elles est que, dans beaucoup de pays, les gens s’attendent à ce qu’on leur fasse une injection et croient que c’est le traitement le plus efficace. Une autre raison est que, pour beaucoup d’agents de santé des pays en développement, faire des injections à une clientèle privée est un moyen de compléter un salaire parfois insuffisant pour faire vivre leur famille. »
La transmission d’infections à l’occasion d’une injection à risque s’observe partout dans le monde. On a ainsi établi qu’une flambée d’hépatite C en 2007 dans l’État du Nevada (États-Unis d’Amérique), résultait des pratiques d’un seul médecin qui avait injecté un anesthésiant à un patient atteint d’hépatite C. Ce médecin a ensuite utilisé la même seringue pour prélever des doses supplémentaires d’anesthésiant dans le même flacon, dès lors contaminé par le virus de l’hépatite C, et pour faire des injections à plusieurs autres patients. Au Cambodge, un groupe de plus de 200 enfants et adultes vivant près de Battambang, la deuxième ville du pays, se sont révélés positifs au VIH en décembre 2014. Depuis, la flambée a été imputée à des pratiques d’injection à risque.
« Il est absolument indispensable d’adopter des seringues sécurisées pour protéger les gens partout dans le monde contre le VIH, l’hépatite et d’autre maladies. Ce changement doit être une priorité urgente pour tous les pays », a insisté le Dr Gottfried Hirnschall, Directeur du Département de l’OMS VIH/sida.
Les nouvelles seringues « intelligentes » recommandées par l’OMS pour les injections dans le muscle ou la peau sont pourvues de dispositifs qui empêchent leur réutilisation. Sur certains modèles, le piston présente une partie frangible qui se casse si l’on essaie de tirer sur le piston après l’injection. D’autres ont un clip métallique qui bloque le piston une fois qu’il est enfoncé, et sur d’autres modèles encore, l’aiguille se rétracte dans le corps de la seringue à la fin de l’injection.
Les seringues sont aussi équipées de dispositifs qui protègent les agents de santé contre les piqûres d’aiguille à l’origine d’infections. Une gaine ou un capuchon descend le long de l’aiguille et la recouvre entièrement après l’injection pour éviter que l’utilisateur ne se blesse accidentellement et ne s’expose ainsi à un risque d’infection.
L’OMS exhorte les pays à passer, d’ici 2020, à l’usage exclusif des nouvelles seringues « intelligentes », sauf dans les rares circonstances où une seringue autobloquante empêcherait d’effectuer un acte médical, par exemple lorsque qu’une personne est sous pompe intraveineuse utilisant une seringue.
L’Organisation incite aussi à adopter des politiques et des normes en matière d’achat, d’utilisation et d’élimination sans risque des seringues réutilisables pour les cas où leur usage reste nécessaire, y compris pour les programmes d’échange de seringues destinés aux personnes qui s’injectent des drogues. La formation continue des agents de santé à la sécurité des injections, que l’OMS soutient depuis plusieurs dizaines d’années, est une autre stratégie essentielle recommandée. L’OMS appelle les fabricants à, dès que possible, commencer ou augmenter la production de seringues « intelligentes » répondant aux normes de performance, de qualité et de sécurité de l’Organisation.
« La nouvelle politique et la campagne mondiale sont des étapes décisives d’une stratégie à long terme visant à améliorer la sécurité des injections en collaborant avec les pays du monde entier. Des progrès considérables ont déjà été faits », commente le Dr Kelley. Entre 2000 et 2010, à mesure que les campagnes de sécurité se sont amplifiées, la réutilisation de dispositifs d’injection dans les pays en développement a diminué d’un facteur 7. Dans le même intervalle, le nombre d’injections inutiles a lui aussi baissé : le nombre moyen d’injections par personne dans les pays en développement est passé de 3,4 à 2,9. En outre, depuis 1999, date à laquelle l’OMS et ses organisations partenaires ont pressé les pays en développement de vacciner les enfants seulement au moyen de seringues autobloquantes à usage unique, la grande majorité d’entre eux ont adopté cette méthode.
Les seringues non sécurisées coûtent entre US $0,03 et 0,04 quand elles sont achetées par un organisme des Nations Unies pour un pays en développement. Les nouvelles seringues « intelligentes » coûtent au moins le double. L’OMS lance un appel aux donateurs pour qu’ils facilitent l’adoption de ce matériel, comptant que les prix baisseront à mesure que la demande augmentera.
Note aux rédacteurs :
L’étude mentionnée dans le présent communiqué, « Evolution of the Global Burden of Viral Infections from Unsafe Medical Injections, 2000-2010 », a pour auteurs J. Pépin et al. et a été publiée dans PLoS ONE 9(6): e99677. doi:10.1371/journal.pone.0099677.
Le titre des nouvelles lignes directrices est : WHO guideline on the use of safety-engineered syringes for intramuscular, intradermal and subcutaneous injections in health care
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