En dépit de la répétition de messages de prévention, les résultats de la lutte contre les addictions sont plus que contrastés : le ministère de la Santé affirme dans un rapport de 2014 que plus de 100.000 décès par an en France, soit près d’un décès sur six, sont dus à la consommation de substances psychoactives. Les mécanismes des addictions, la dangerosité de produits licites, leurs coûts économiques, sociaux et sanitaires sont sous-estimés par la population, alors même que leurs dommages sont évitables.
Dans ce contexte alarmant, et alors qu’une session spéciale de l’Assemblée Générale des Nations Unies (Ungass) dédiée à la question des politiques en matière de drogues devrait se tenir en 2016, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) formule dans son projet d’avis des préconisations concrètes afin de contribuer à une meilleure compréhension des addictions comme maladie et remédier au problème de société et de santé publique qu’elles représentent.
Le projet d’avis Les addictions sera présenté le 24 juin par sa rapporteure Gisèle Ballaloud, en présence du Président de la section des affaires sociales et de la santé, François Fondard.
Au-delà de l’impact des addictions sur la santé, leur meilleure prévention et une prise en charge plus efficace constituent aujourd’hui un enjeu économique et social de première importance. Les recommandations du CESE reposent ainsi sur trois axes essentiels :
PROMOUVOIR UNE POLITIQUE AMBITIEUSE D’INFORMATION, DE PREVENTION ET D’ACCOMPAGNEMENT
Face à l’évolution de conduites addictives touchant toutes les tranches d’âges, le CESE souhaite développer une politique d’information afin de sensibiliser les publics les plus vulnérables (femmes enceintes, jeunes…) aux risques induits par la consommation de produits psychoactifs.
Dans ce contexte, le CESE estime nécessaire d’encadrer les stratégies marketing déployées par les fabricants d’alcool, de tabac et des jeux ainsi que les actions de lobbying qu’elles développent notamment en assurant une transparence de celles-ci.
En complément, le CESE préconise de poursuivre les enquêtes nationales périodiques et les études sur les phénomènes émergents, afin d’adapter les messages et les stratégies de prévention.
Dans cette perspective, le CESE encourage particulièrement la mise en place d’une prévention dédiée aux jeux vidéo : signalétique obligatoire pour permettre à un large public de mieux appréhender les risques, une évaluation des jeux les plus addictogènes par le Comité d’experts indépendants ou encore des mesures éducatives sensibilisant à l’utilisation modérée des jeux en ligne et la responsabilisation des joueurs.
FAVORISER UN DIAGNOSTIC ET UNE PRISE EN CHARGE RAPIDE
Le CESE préconise de renforcer la prévention primaire par une « véritable éducation à la santé » sur les lieux de vie.
En effet, selon le Baromètre santé INPES de 2010, 16,4% des actifs occupés déclarent consommer de l’alcool sur leurs lieux de travail. Le CESE propose donc de favoriser la prise en compte de la lutte contre les addictions dans la prévention des risques professionnels, et pour cela de finaliser, publier et mettre rapidement en œuvre la circulaire de la direction générale du travail et de la Mildeca. De même, dans les établissements d’enseignement, les messages de prévention doivent être relayés par le corps enseignant et les professionnels de soin.
Dans le but de mieux appréhender les facteurs d’addiction, le CESE encourage le développement de la recherche fondamentale en neuroscience et en psychiatrie et insiste sur la mise en œuvre d’une coopération plus étroite entre les ministères de la Santé, de l’Education nationale et du Travail.
Afin de garantir l’efficacité de ces préconisations, le CESE recommande de renforcer la formation initiale et continue des professionnels de la santé permettant d’assurer une meilleure prise en charge des patients.
METTRE EN ŒUVRE UNE VERITABLE POLITIQUE DE REDUCTION DES RISQUES
Pour le CESE, il apparait nécessaire de susciter une prise de conscience de la société sur les risques d’addiction liés à la consommation de produits psychoactifs. Il est important d’une part que les familles puissent disposer d’informations adaptées sur les différentes formes d’addictions ; et d’autre part, que le soutien des pouvoirs publics aux associations soit renforcé.
Concernant les drogues illicites, le CESE reconnait que l’ouverture des salles de shoot à moindre risque ne résout pas toutes les difficultés. Pour autant, il est indispensable d’accompagner l’implantation de ces salles de consommation à moindre risque mais également de créer des passerelles vers des centres de soins.
S’agissant du cannabis, le niveau élevé de sa consommation en France montre que la politique répressive française présente des limites. C’est pourquoi le CESE recommande d’organiser un débat public sur la sanction de l’usage de cannabis afin notamment de contribuer à construire la position de la France pour la prochaine Session spéciale de l’Assemblée générale de l’ONU sur les drogues (UNGASS).
« Il est indispensable de lever la stigmatisation qui pèse encore sur les addictions afin que les personnes demandent davantage d’aide et de soutien. Pour une innovation véritablement porteuse de progrès et de bien-être pour le patient, il est nécessaire de l’écouter, de l‘informer, de l’accompagner dans une démarche de soins », souligne la rapporteur du projet d’avis Gisèle Ballaloud.
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