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« Des connections défaillantes à travers le cerveau en cause dans certains troubles de l’autisme » (Communiqué)

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Des chercheurs du Neurocentre Magendie (Inserm/Université de Bordeaux) viennent de montrer comment les connections altérées entre cellules du système nerveux étaient impliquées dans le syndrome de l’X fragile, responsable de troubles du spectre autistique. A l’aide de l’IRM, Andreas Frick, chargé de recherche Inserm, et son équipe ont en effet observé, sur une souris modèle de ce syndrome, une altération des connections et de la communication entre différentes zones du cerveau. Ces nouvelles données sont susceptibles d’expliquer certains symptômes des troubles du spectre autistique, tels que l’hypersensibilité aux informations sensorielles ou les altérations de la perception visuelle.
Le détail de ces travaux est publié dans la revue Science Advances datée du 20 novembre 2015

Des estimations récentes du « Center for Disease Control » aux États-Unis suggèrent qu’un enfant sur 68 est atteint de Troubles du Spectre Autistique (TSA). Les TSA sont des troubles neurologiques caractérisés par un spectre de symptômes comprenant : des problèmes d’interactions sociales et de communications, un traitement anormal de l’information sensorielle, ainsi que des comportements répétitifs stéréotypés.
Il a longtemps été suggéré que le cerveau des personnes atteintes d’autisme présente des connexions différentes. Cependant, il n’existe pas encore de consensus ni concernant un modèle de ces différences, ni au sujet du lien possible entre ces différences et les symptômes exprimés chez les individus souffrant de ces troubles.
Actuellement, une théorie se dégage au plan international parmi les neuroscientifiques qui suggère que le cerveau des personnes atteintes de TSA est « hyper-connecté » à un niveau local, mais qu’à une échelle globale, les différentes zones du cortex sont fonctionnellement « déconnectées » les unes des autres. Les connections locales peuvent « traiter » un type d’information spécifique (certains aspects de la vision par exemple). A contrario, les connections à plus longues portées permettent au cerveau d’intégrer des informations plus complexes provenant de différentes parties du cerveau qui traitent souvent d’aspects différents (par exemple la combinaison de différentes modalités sensorielles). Ce dernier type de connexion est donc nécessaire pour une perception et une compréhension fine de notre environnement extérieur.
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Réorganisation de la connectivité locale et à longue portée sur une souris modèle d’autisme (à droite) et sur une souris sauvage (à gauche)
Les neurones marqués (en vert) par fluorescence suite à l’injection d’un traceur dans le cortex visuel primaire (au niveau de la flèche blanche) envoient des projections vers le cortex visuel et sont répartis à travers différentes régions du cerveau. Sur les souris modèles du syndrome de l’X fragile (Fmr1-/y), on observe une haute densité de neurones dans le cortex visuel (connections locales), mais une réduction du nombre de neurones loin de cette région (connections longues portées).

Figure extraite de Haberl et coll. Science Advances 20 Novembre 2015; 10.1126/sciadv.1500807. Cette figure est licencié sous CC BY-NC http://creativecommons.org/licenses/bync/4.0/
Modification de la Figure 2a de la publication (seuillages et angle de vue modifiés, et marque rouge indiquant le point d’injection enlevé).

Pour étudier comment le réseau du cerveau est altéré dans les TSA, Andreas Frick et ses collègues ont utilisé une souris modèle du syndrome du X fragile (un trouble neurodéveloppemental étroitement liés à l’autisme). Cette même équipe avait observé en 2014, sur ces souris modèles de TSA et du SXF, des altérations dans la manière de réagir aux informations sensorielles (notamment les informations liées au toucher) et a décrit un mécanisme expliquant les changements neurobiologiques sous lignant ce phénomène[1].
Dans le travail publié aujourd’hui, les chercheurs de l’équipe d’Andreas Frick ont utilisé (en collaboration avec une équipe néerlandaise) l’imagerie par résonance magnétique (IRM), une technique qui est fréquemment utilisée chez l’homme, afin de mieux mettre en évidence la perturbation de la connectivité entre neurones. De fait, leurs résultats montrent une désorganisation des fibres nerveuses du corps calleux de ces souris. Le corps calleux contient des fibres nerveuses, reliant les zones néocorticales les unes aux autres et à d’autres régions du cerveau.
« L’ensemble des connections cérébrales fonctionne comme une autoroute, permettant la distribution du trafic aux différentes parties d’une agglomération, mais également à d’autres villes et villages extérieurs », explique Andréas Frick. Les chercheurs ont souhaité étudier de plus près la partie du néocortex, qui traite l’information visuelle (le cortex visuel). Le réseau de cette partie du cerveau était différent, avec davantage de connections provenant de sites locaux (connections limitées au cortex visuel), et peu de connections provenant de sites éloignés.
Globalement, l’IRM fonctionnelle, permet d’observer une réduction de la communication entre différentes zones du cerveau.
L’ensemble de ces résultats soutiennent l’idée que la connectivité locale est renforcée dans le SXF/ les TSA, mais que la connectivité à longue distance est réduite. Par conséquent, ce travail confirme à la fois les hypothèses émises de longue date (mentionnées ci-dessus), et fournit également une explication à certains des symptômes des TSA et du SXF. Par exemple, un traitement exacerbé de l’information locale et/ou l’incapacité à intégrer les informations provenant de sources multiples peuvent expliquer une perception sensorielle altérée. Les altérations dans la perception visuelle, caractéristique des TSA, peuvent être expliquées par un traitement augmenté des détails fins ou des structures locales (connectivité locale augmentée) au détriment de l’image entière (connectivité longue distance réduite).
« Les techniques d’IRM présentes dans notre travail sont également utilisées en routine chez l’homme et constituent donc une méthode applicable aux patients pour mesurer des changements de la connectivité, expliquent les chercheurs. Transposés à l’Homme, nos résultats pourraient permettre de changer la manière d’évaluer de nouvelles approches thérapeutiques pour traiter les SXF et TSA, et pour mieux comprendre le rôle que pourrait avoir des modifications de la connectivité dans d’autres maladies psychiatriques ou neuro-développementales. », concluent-ils

Sources :

“Structural-functional connectivity deficits of neocortical circuits in the Fmr1−/y mouse model of autism”
Matthias G. Haberl,1,2,3* Valerio Zerbi,4† Andor Veltien,4 Melanie Ginger,1,2 Arend Heerschap,4 Andreas Frick1,2‡
1Inserm, Neurocentre Magendie, Physiopathologie de la plasticité neuronale, U862, Bordeaux, France.
2University of Bordeaux, Neurocentre Magendie, Physiopathologie de la plasticité neuronale, U862, Bordeaux, France.
3Institute of NeuroInformatics, University of Zurich, Zurich, Switzerland.
4Biomedical Magnetic Resonance, Departmentof Radiology and Nuclear Medicine, Radboud University Medical Center, Nijmegen,Netherlands.
*Present address: National Center for Microscopy and Imaging Research, Center for Research in Biological Systems, University of California San Diego, School of Medicine,La Jolla, CA, USA.
†Present address: Neural Control of Movement Lab, Department of Health Sciencesand Technology, ETH Zürich, Winterthurerstrasse 190, 8057 Zurich, Switzerland.
Science Advances 20 Novembre 2015; http://dx.doi.org/10.1126/sciadv.1500807

> Contact chercheur :
Andreas Frick, PhD
Neurocentre Magendie
Groupe ‘Circuit and dendritic mechanisms underlying cortical plasticity’
Unité Inserm 862, University Bordeaux
Tel : +33 (0)5 57 57 37 04
andreas.frick@inserm.fr

> Contact presse :
presse@inserm.fr

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