Filiale d’Axa et Humanis, Itelis a lancé un appel à candidatures pour le renouvellement de son réseau audioprothèse, alors que les discussions avec la profession étaient à peine entamées. Le CNA, le SYNEA et l’UNSAF regrettent d’avoir participé à une concertation de façade et constatent que le principal objectif de cette plateforme est financier, sacrifiant au passage la qualité et l’accompagnement des patients malentendants, au détriment de la santé publique.
De plus, Itelis devrait s’interdire d’imposer de nouvelles obligations aux autres acteurs, se substituant ainsi aux réglementations en vigueur.
Le prix de l’audioprothèse doit refléter le service rendu par les audioprothésistes, professionnels de santé, au-delà de la fourniture de l’équipement. Celui-ci comporte l’orientation du malentendant sur le choix du type d’appareil le plus adapté à son déficit auditif, la personnalisation, l’adaptation et le suivi dans le temps, 5 ans en moyenne, dans le cadre d’un plateau technique performant. Le bénéfice d’un matériel adapté et l’accompagnement conditionnent son observance et celle-ci, pour les malentendants les plus âgés, contribue à repousser notamment la survenue du déclin cognitif. Sacrifier cet aspect constitue une perte de chance potentielle et revient à pénaliser les adhérents de cette plateforme.
Le CNA, le SYNEA et l’UNSAF demandent à Itelis et à ses actionnaires, Axa et Humanis, d’engager une vraie discussion pour sortir de cette impasse et construire un réseau bénéfique aux patients, comme c’est le cas avec d’autres opérateurs complémentaires.
L’audioprothèse, un investissement contribuant à réduire les dépenses évitables et à améliorer la qualité de vie des patients
L’Inserm a mis en évidence que l’utilisation d’appareils auditifs évite le sur-déclin cognitif constaté chez les malentendants âgés. L’Institut de veille sanitaire (InVS) a publié une étude corrélant la surdité avec la souffrance au travail, la souffrance psychique, les pensées suicidaires et les tentatives de suicide.
Plus que jamais, l’audioprothèse doit être d’abord regardée pour la contribution qu’elle apporte au système de soins et à la qualité de vie des patients. Les liens entre satisfaction des patients, taux d’équipement et observance, font de l’audioprothèse un secteur éminemment lié à la santé et non à la consommation.
En France, des prix dans la moyenne basse Européenne
Les progrès technologiques ont conduit à un accroissement des performances de l’audioprothèse et à une nette amélioration du rapport qualité/prix[1]. Ces prix sont, en France, dans la moyenne basse européenne, ce qui a été souligné par l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) : « Les distributeurs français pratiquent (…) des prix hauts de gamme plutôt faibles comparativement aux autres pays »[2].
Pour ce qui est des marges des audioprothésistes, la Direction de la Sécurité Sociale (DSS) indique dans son analyse économique du secteur[3] : « marge nette : 0-10% pour les succursalistes, 5-12% pour les indépendants ». L’Inspection Générale des Finances (IGF), estime, quant à elle, la rentabilité des audioprothésistes à 10 %[4].
Le réseau Itelis audioprothèse n’est pas à la hauteur des enjeux
Filiale de Axa et Humanis, Itelis renouvelle son réseau audioprothèse pour le 1er avril 2016. Dans ce cadre, Itelis a souhaité rencontrer les représentants des médecins ORL et des audioprothésistes. Une réunion a eu lieu le 6 janvier dont le but était d’engager une discussion sur les aspects pratiques de l’exercice. Cette réunion n’a pas permis de prendre connaissance de la totalité des informations et aucun document n’a été remis. Faute d’information complète, la profession ne pouvait se prononcer sur la pertinence de la démarche d’Itelis. L’appel à candidatures a été lancé le 27 janvier sans nouvelle rencontre, malgré les demandes réitérées de la profession.
La profession le regrette, et regrette aussi de constater que les prix maxima se situent entre -15 % et -20 % des prix moyens du secteur. Pourquoi exiger des remises supérieures aux marges constatées par la DSS et l’IGF ?
L’IGAS écrivait : « la mission estime indispensable de garantir une adaptation et un suivi de qualité assurés par un professionnel de l’appareillage auditif et donc de rémunérer correctement l’intervention de l’audioprothésiste »[5]. Le compte n’y est pas…
Les assurés de Axa et de Humanis doivent le savoir, les prix maxima proposés impacteront la qualité des services à laquelle prétendait Itelis.
Plus généralement, la forte variabilité de la qualité entre les différents réseaux de complémentaires en audioprothèse, pose question.
Alors que les enjeux de santé publique sont majeurs, est-il souhaitable de laisser aux seuls acteurs privés, dont certains aux objectifs principalement économiques, la régulation du reste à charge en audioprothèse ?
N’est-ce pas aussi ce que dit « en creux » l’IGAS ?
« La diminution du reste à charge pour les patients est une nécessité compte tenu de l’impact de la perte d’audition sur la perte d’autonomie des personnes âgées. (…) Pour permettre au CEPS de jouer un rôle, au même titre que les complémentaires, dans la négociation de prix de vente corrects, il serait souhaitable de revaloriser la prise en charge de l’assurance maladie. »[6]
Notes
[1] Étude « Unsaf – Analyse sectorielle de l’audioprothèse en France – Décembre 2015 » (52 pages)
http://www.unsaf.org/doc/Unsaf_Analyse_sectorielle_de_l_audioprothese_en_France_Decembre_2015.pdf
[2] Rapport IGAS « Evaluation de la prise en charge des aides techniques pour les personnes âgées dépendantes et les personnes handicapées », 2013
[3] Direction de la Sécurité Sociale, Analyse économique du secteur des appareillages optiques et auditifs, mars 2011
[4] Rapport IGF-IGAS, La régulation du secteur des dispositifs médicaux, juin 2015
[5] Rapport IGAS « Dispositifs médicaux : circuits et marges de distribution en ville et rôle des prestataires à domicile », 2014
[6] ibid.
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