Pour le CH-FO, s’engager pour un service public plus fort et la défense des directeurs dans leur exercice est une cause aussi fondamentale qu’essentielle. Même si les difficultés dans le financement des établisements publics, notamment dans le secteur médico-social, ne datent pas d’hier, plusieurs indicateurs et signalements récents apparaissent encore plus inquiétants.
Un constat amer.
De nombreux collègues directeurs sont désormais dans des situations intolérables, voyant leurs dotations de financement baisser et se réduire dans des contextes déjà forts tendus. Les alertes que le CH-FO a reçues depuis plusieurs mois sont inquiétantes, tant les décisions et restrictions apparaissent en totale contradiction avec les missions et obligations de nos établissements publics et particulièrement dans les EHPAD. La tendance est forte. Le plan d’économies des dépenses de l’assurance maladie impactera forcément et durement le secteur médico-social où 850 millions d’économies sont envisagées. Accepter ces dimunitions constitue un danger et devient insupportable. Chacun connait bien les complexités et duretés des contextes pour les établissements accueillant des personnes âgées dépendantes notamment et qui font le quotidien des directeurs et des équipes. C’est la force de l’engagement des professionnels pour mener à bien leur rôle au service des usagers.
Les enjeux.
Pour les collègues directeurs, subir ces baisses se traduit forcément par de nouvelles restrictions dans le fonctionnement, dans les projets d’investissement ou encore dans les dépenses de personnels… L’emploi est menacé. Bien d’autres choses se jouent au-delà des financements, les tarificateurs ou décideurs publics paraissent l’oublier : le directeur est aussi dépositaire d’une responsabilité pour garantir les missions de service public et d’accueil des personnes très souvent vulnérables. Il est aussi en charge d’animer et de piloter l’établissement en regard de valeurs essentielles. Les contraintes sont telles aujourd’hui que nombre de collègues manifestent leur sentiment d’une perte des repères dans l’action publique et leurs craintes face aux conséquences désastreuses de ces choix. Les enjeux ne sont donc ni purement matériels, ni purement financiers.
Témoignages…
Citons ce collègue directeur constatant de plus en plus de familles démunies qui souvent trouvent, grâce au système de l’aide sociale, une capacité d’assurer une fin de vie décente et digne à leur parent. Tel autre qui tente d’échapper au chantage et qui doit s’engager dans une opération immobilière de reconstruction sous peine de ne plus assurer ni la sécurité ni une qualité d’accueil légitime. Enfin, tel collègue qui perçoit dans ses baisses et contraintes les prémisses où des signes avant–coureurs d’un engrenage de désintégration progressive de services publics comme d’autres en ont connus.
Quelques observations de choix « imposés et blessants » : L’un ou l’autre ; l’un et l’autre?
La loi d’adaptation de la société au vieillissement (dite loi ASV) publiée récemment semble servir de prétexte à quelques responsables politiques pour donner la priorité au « maintien à domicile » plutôt qu’à la vie en établissement et adopter un raisonnement et une politique de « l’un contre l’autre » plutôt que celle de l’articulation de « l’un avec l’autre », illustrant ici des craintes et doutes que nous avions pu exprimer lors des travaux préparatoires à ce texte. S’il est exact cette loi ASV repose sur la constatation de l’ aspiration légitime des personnes âgées et de leur famille à se maintenir le plus longtemps possible au domicile encore faut-il que cela puisse se faire dans des conditions adaptées au vieillissement.
Selon nous, il convient de dénoncer l’instrumentalisation qui semble en être faite. Ainsi les choix faits dans ce département du Nord de la France semblent prendre appui sur ce texte et illustrer un éloignement des obligations et responsabilités en matière d’accompagnement des établissements publics. Ressenti ou vécu comme un désengagement et une « marche vers la désinstitutionalisation » des personnes âgées dépendantes, le phénomène se traduit très concrètement par une baisse des dotations de 3% et fait peser une menace sur au moins 140 emplois.
Pour des raisons analogues – un département de la région parisienne envisageait « d’étaler sur 6 ans » le règlement des sommes dues aux établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes au titre de l’aide sociale et pour les mineurs au titre de l’aide sociale à l’enfance, méprisant par là –même les équilibres précaires des trésoreries des établissements.
Là encore, la demande à peine feutrée consiste à sortir de l’habilitation à l’aide sociale, qui revient en réalité à …ne plus accepter les personnes les plus défavorisées, dont on sait le poids démographique croissant notamment dans la plupart des territoires ruraux. De sorte que cette idée se révèle par nature illusoire.
De la nécessaire prise de conscience pour une juste tarification…
Le CH-FO ne sous-estime ni les contraintes budgétaires ni le principe de réalité mais rappelle la prévalence des missions de service public en faveur de nos ainés. Il reste attentif et exigent pour voir la concrétisation des CPOM ou des espaces de contractualisation avec des choix tarifaires appliqués et répartis de façon juste et équitable !
Il n’est pas concevable de demander implicitement aux EHPAD publics de refuser ou limiter l’accueil des plus démunis : cela est antinomique avec la mission d’un établissement public.
Les financeurs publics doivent prendre la mesure des dérives que nous dénonçons. Les travaux et perspectives actuelles sur le sujet de la tarification ne sont pas de nature à rassurer les acteurs.
Ce que demande le CH-FO
Face à ces orientations malthusiennes, la résistance s’impose tant les enjeux et conséquences sont évidents. Le CH-FO met en garde contre le risque tentant de « contagion » de ces positions de « coupes sombres » visant à l’allégement des dépenses. Pour nous, la ressource est une réponse au besoin.
Les personnes âgées dépendantes, les personnes handicapées, les mineurs relevant de la protection de l’enfance n’ont pas à supporter les conséquences de la non inscription de dépenses – pourtant obligatoires – dans les budgets des départements ou de leurs querelles avec l’Etat. La piste de la « déshabilitation à l’aide sociale comme solution de rationalisation budgétaire » doit être purement et simplement abandonnée.
Entre rationalisation et rationnement, la rationalité s’impose.
La solidarité, l’autonomie et la dépendance relèvent de la responsabilité de la nation. Nous savons l’implication, l’engagement des directeurs pour réussir une inscription dans les territoires au service des populations, parmi les plus vulnérables. Le plus simple des respects demande à ce que leur mission ne soit pas entravée. Le CH-FO y veillera comme pour bien d’autres secteurs où les contraintes budgétaires sont devenues insupportables et doivent cesser de s’intensifier.