30 % de la population française souffrirait de douleurs chroniques (durée supérieure à 6 mois) et on 300 000 personnes consultent un centre anti-douleur (CAD) pour des douleurs chroniques rebelles, selon les résultats de l’enquête menée en 2015 par la Société Française d’Etude et de Traitement de la Douleur (SFETD). Il existe 254 CAD, dont 91 référents pluridisciplinaires avec travaux de recherche dans les CHU et grands CHR.
Cette pathologie, responsable d’arrêts de travail prolongés, a un coût sociétal majeur. Elle est la première cause d’invalidité chez les patients de moins de 50 ans. A la différence des structures de soins palliatifs, les CAD ont des besoins et des pratiques spécifiques, même si certains praticiens peuvent avoir la double compétence « douleur et soins palliatifs ». S’il incombe à tout médecin de prendre en charge la douleur aiguë, la prise en charge des malades douloureux chroniques est complexe, nécessitant des compétences spécifiques. Chaque spécialité doit pouvoir offrir consultations et traitements spécialisés pour des douleurs rebelles que seuls des doubles spécialistes sont à même de traiter : neurologue pour les céphalées et douleurs neuropathiques, neurochirurgien pour les techniques d’interruption ou de neuro-modulation, anesthésistes pour les blocs et les pompes intrathécales, etc.
L’enseignement universitaire de la douleur
Depuis 25 ans, plusieurs enseignements ont été organisés : 14 capacités douleur, 25 diplômes interuniversitaires (DIU) et un DESC de douleur, qu’il est envisagé aujourd’hui ainsi que les Capacités, une incertitude subsistant par ailleurs sur une Formation spécialisée transversale (FST) « douleur ». Or, on estime qu’environ 150 médecins de la douleur vont cesser leur activité dans les 10 prochaines années, dont la moitié dans les 5 prochaines années. Il faudrait donc former 35 médecins par an pour assurer le maintien des structures. Pour tous les spécialistes, une formation complémentaire « Douleur » exige deux ans avec une part théorique et pratique dans des CAD. Pour remplacer le DESC, une formation spécialisée transversale « Douleur » s’impose donc d’urgence selon trois modalités :
– pour les spécialistes de médecine générale, la formation doit pouvoir s’intégrer dans le cursus de l’internat pendant un an et comprendre en outre une année d’assistanat ;
– pour les DES des autres spécialités, cette formation devra se faire le plus souvent en post- internat car les 2 semestres en CAD ne pourront pas être intégrés dans le cursus de l’internat de spécialité ;
– la médecine de la douleur est également souvent un choix plus tardif auquel répondait la capacité, avec des passerelles nécessaires en cours de carrière. C’est pourquoi, la FST doit pouvoir se faire plus tard par une formation théorique et une validation de compétence avec des stages spécifiques en CAD, à moins de perdre la majorité des doubles spécialistes cités plus haut.
En conclusion, l’Académie nationale de médecine recommande :
1- La création d’une Formation Spécialisée Transversale (FST) de sur-spécialité « Médecine de la Douleur » sanctionnant une formation théorique et pratique de durée équivalente à l’ancien DESC, réalisée au cours de l’internat ou après un internat effectué dans diverses spécialités.
2- La mise en place d’une filière spécifique pour cet enseignement dans chaque UFR, avec un coordinateur universitaire « douleur » pour organiser l’enseignement et la recherche.
3- Le maintien en urgence des « structures douleur », compte tenu des besoins et de la démographie rapidement déclinante des « praticiens de la douleur ».
Groupe de travail « DOULEURS CHRONIQUES REBELLES »* rattaché à la Commission XV
* A. Serrie, R. Trèves, P. Queneau (Académie de médecine) et B. Laurent (Centre de la douleur Rhône-Alpes-Auvergne), avec la contribution de D. Bouhassira (Président de la Société Française d’Etudes et de Traitement de la Douleur) et de C. Maindet-Dominici, (PH Grenoble)
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