« En février 2016, l’Autorité de la concurrence annonçait une enquête sur le secteur de l’audioprothèse avec deux présupposés : les « rentes » et « marges » des professionnels et une solution toute trouvée, les « réseaux de soins », régulièrement encensés par l’Autorité. L’enquête a démontré une réalité bien différente : la grande efficience du secteur de l’audioprothèse, tout en passant sous silence les graves manipulations de l’opinion publique et les pratiques contestables des « réseaux de soins ». Plutôt que d’admettre que la principale mesure à préconiser, une augmentation du remboursement, relève des autorités de santé, elle a préféré, pour justifier l’existence de son enquête sectorielle, un « découplage » qui n’existe nulle part en Europe et conduirait à une augmentation des prix et à une diminution de la qualité.
L’Autorité, aveuglée par une « idéologie de la concurrence », critique la « mutualisation » des coûts et pousse à « une individualisation des prix en fonction de la demande de suivi », allant à rebours des fondements de notre système de santé. Pourtant, alors que la santé et le remboursement de l’audioprothèse font désormais partie des débats de la Présidentielle, les enquêtes d’opinion convergent pour montrer l’attachement très fort d’une large majorité de Français au modèle solidaire de notre Sécurité sociale.
Deux présupposés : les « rentes » des professionnels et une solution toute trouvée, les « réseaux de soins »
L’Autorité de la concurrence (ADLC) a lancé en février 2016 une enquête sectorielle sur l’audioprothèse. Le 21 juin 2016, son président d’alors déclarait lors d’une audition à l’Assemblée nationale : « Les prix, de 1 100 à 1 200 euros par oreille corrigée, sont parmi les plus élevés en Europe. ». « Il s’agira aussi de rechercher les justifications aux marges très importantes réalisées par les audioprothésistes. (…) Enfin, nous nous demanderons quel est le rôle des réseaux de soins sélectionnés par les complémentaires santé »[1].
La réalité constatée : la grande efficience du secteur de l’audioprothèse, les pratiques très contestables des « réseaux de soins »
Quatre semaines plus tard, les services de l’ADLC publiaient un document de consultation aux constats rassurants : « Il semble que le maillage territorial soit relativement satisfaisant » (…) « la structure du marché devrait favoriser la concurrence ». Le prix « s’élève ainsi en moyenne à 1500 € par oreille » et « est toutefois comparable au prix relevé dans les autres pays de l’Union européenne, et même inférieur pour les produits haut de gamme. ».
À défaut d’avoir trouvé des dysfonctionnements, l’ADLC a passé sous silence les graves manipulations de l’opinion publique et les pratiques contestables des « réseaux de soins »[2], qu’elle encensait jusqu’à présent. À l’issue de son enquête, l’ADLC n’a communiqué que sur deux des quatre sujets qu’elle s’était fixé pour objectif de traiter, laissant de côté la question centrale de la régulation tarifaire en contrepartie d’une amélioration du remboursement par l’Assurance maladie et celle du rôle des « réseaux de soins ».
L’avis de l’ADLC : de multiples contradictions et omissions pour justifier des mesures en réalité néfastes
L’avis et le communiqué de décembre 2016 de l’ADLC comportent de multiples contradictions et omissions pour justifier des mesures – suppression du numerus clausus et découplage – en réalité néfastes.
Plutôt que de constater la grande efficience du secteur de l’audioprothèse et ses résultats exceptionnels au vu du faible remboursement et que la principale mesure à préconiser, une augmentation du remboursement, relève des autorités de santé, elle a préféré, pour justifier l’existence de son enquête sectorielle, un « découplage » qui n’existe nulle part en Europe et conduirait à une augmentation des prix et à une diminution de la qualité.
L’ADLC, autorité administrative indépendante spécialisée dans l´analyse et la régulation du fonctionnement de la concurrence sur les marchés, a empiété sur les missions de l’ONDPS, de l’IGAS et de la HAS, compétentes en matière de santé et de parcours de soins.
Santé : l’Autorité de la concurrence à rebours de la volonté des Français
Alors que de nombreuses voix pointent les effets d’une concurrence non régulée entre complémentaires santé comme cause d’une évolution « à l’américaine » en fragilisant les mécanismes de solidarité, l’ADLC critique la « mutualisation » des coûts et pousse à « une individualisation des prix en fonction de la demande de suivi », rendant aussi possible une évolution « à l’américaine » pour notre secteur. Ces positions vont à rebours des fondements de notre système de santé. Pourtant, alors que la santé et le remboursement de l’audioprothèse font désormais partie du débat de la Présidentielle, les enquêtes d’opinion ont mis en avant l’attachement très fort d’une large majorité de Français au modèle solidaire de notre Sécurité sociale.
Alors que la santé et la prise en charge de l’audioprothèse font partie des débats de la Présidentielle, faire croire que la seule action du « marché » peut réduire le reste à charge est inacceptable et biaise le débat public.
Nous allons porter nos arguments sur l’inefficacité de la concurrence dans la santé auprès :
· des autres professions de santé ;
· des parlementaires ;
· des candidats à la Présidentielle.
Nous demandons :
· par souci de transparence, la publication par l’ADLC de ses conclusions sur les 2 questions non traitées dans l’avis final : encadrement contre remboursement amélioré et « réseaux de soins » ;
· de futures études indépendantes du secteur de l’audioprothèse par les autorités compétentes en matière de santé publique, l’IGAS, et en démographie des professionnels de santé, l’ONDPS ;
· une évolution concrète des textes afin d’obtenir que la santé et les produits de santé ne puissent plus être traités comme des biens de consommation. Il s’agit d’obtenir une véritable « exception santé ». Les textes actuels, trop flous, fragilisent la Santé publique dans notre pays. »
[2] Cf. notre communiqué du 4 octobre 2016, « Réseaux de soins : l’UNSAF réclame leur évaluation publique conformément à la loi » : http://www.unsaf.org/doc/CP_Unsaf_-_Reseaux_de_soins_-_04_10_2016.pdf
À propos de l’UNSAF
Le Syndicat national des audioprothésistes (UNSAF), né en avril 2011 de la fusion des trois syndicats historiques de la profession, est l’organisme professionnel représentatif des 3 300 audioprothésistes. Il siège notamment à l’Union nationale des professionnels de santé (UNPS) et au Haut conseil des professions paramédicales (HCPP). Il est également le signataire de la convention nationale de tiers payant conclue avec les Caisses Nationales d’Assurance Maladie. L’UNSAF est également présent au niveau européen au sein de l’Association européenne des audioprothésistes (AEA). Il est présidé depuis juin 2012 par Luis Godinho. www.unsaf.org