Le Conseil international des infirmières (CII) a publié une nouvelle prise de position au sujet de la « Dotation en personnel infirmier sûre, fondée sur des données probantes », qui appelle à un plus grand investissement dans une dotation en personnel infirmier sûre, efficace et répondant aux besoins, afin d’améliorer les résultats pour les patients et d’instaurer des environnements favorables à la pratique.
« Les éléments probants montrent clairement l’importance d’une dotation en personnel infirmier suffisante pour assurer la sécurité des patients dans tous les secteurs des soins de santé. Les effectifs d’infirmières insuffisants ou inadéquats augmentent le risque de soins compromis, d’événements indésirables au détriment des patients, de résultats cliniques moins bons, de décès de patients hospitalisés et d’expérience négative des patients au contact des soins », observe Howard Catton, Directeur des politiques des soins infirmiers et de santé au CII. « Le CII est conscient du fait que la sécurité de la dotation est une priorité et une préoccupation majeures pour de nombreuses associations membres et pour les infirmières qu’elles représentent. »
La recherche montre que la présence d’une infirmière diplômée supplémentaire pour dix lits est associée à une baisse du nombre des décès trente jours après un AVC de 11 % à 28 % et, un an après un AVC, de 8 % à 12 %20[i]. Les données disponibles montrent aussi que les hôpitaux qui emploient une plus grande proportion d’infirmières titulaires d’un bachelor obtiennent de meilleurs résultats pour les patients et enregistrent des taux de mortalité moins élevés[ii].
En outre, une dotation insuffisante risque d’entraîner moins de satisfaction au travail, davantage de stress, l’épuisement du personnel, plus de départs et l’augmentation du taux de rotation parmi le personnel. Plusieurs études ont montré que cette situation avait des répercussions très importantes en termes de ressources.
Pour tenter de remédier à la pénurie de personnel qualifié et pour réduire leur facture salariale, plusieurs pays remplacent les infirmières diplômées par des agents de santé de soutien et créent de nouveaux rôles, confiés à d’autres personnels que les infirmières diplômées. Mais la recherche indique que cette approche risque d’aggraver les résultats pour les patients et qu’elle n’est pas nécessairement d’un bon rapport coût-efficacité.
« La sécurité des patients et la santé de la main-d’œuvre infirmière sont les deux faces d’une même pièce », souligne Howard Catton. « De nombreuses associations de soins infirmiers s’inquiètent du fait que les décisions en matière de dotation sont motivées par des considérations financières, plutôt que par la volonté d’améliorer les résultats pour les patients et les environnements de pratique. Or, pour prodiguer des soins de qualité, centrés sur le patient, il faut instaurer des environnements favorables à la pratique des infirmières, environnements caractérisés par des effectifs adéquats, des charges de travail raisonnables, le soutien de la hiérarchie, un leadership de grande qualité et la capacité des infirmières de travailler dans toute l’étendue de leur domaine de pratique. »
La prise de position, élaborée avec les apports d’experts internationaux, en consultation avec les associations nationales d’infirmières membres du CII, expose des principes généraux et les éléments fondamentaux d’approches destinées à garantir la sécurité de la dotation. L’objectif du CII ce faisant est double : aider toutes les personnes chargées de définir des niveaux de dotation et faire en sorte que les infirmières assument un leadership clair dans cet enjeu crucial.
La prise de position insiste sur l’importance :
- De créer et d’appliquer des systèmes de dotation en personnel infirmier basés sur des données recueillies en temps réel au sujet des patients ;
- De disposer d’un financement suffisant pour assurer une dotation en personnel infirmier sûre, répondant aux besoins ;
- De disposer de systèmes de dotation efficaces, visant aussi bien la sécurité des patients que la santé et le bien-être du personnel ;
- De sensibiliser le public à l’impact d’une dotation sûre en personnel infirmier sur les patients, les familles et les communautés ;
- De s’abstenir de créer des rôles de remplacement pour les infirmières diplômées ;
- Et d’intégrer une analyse économique aux recherches sur la dotation en personnel infirmier.
Les preuves présentées dans cette nouvelle prise de position sont à rapprocher de questions similaires soulevées dans deux autres publications récentes du CII : l’une consacrée aux salaires des infirmières et l’autre à la fidélisation du personnel infirmier. Ces études montrent, respectivement, que de nombreuses infirmières dans le monde ont subi une baisse réelle de leur pouvoir d’achat au cours des dix dernières années ; et que, dès lors que les infirmières sont autonomisées et aidées à accomplir le travail pour lequel elles ont été formées, elles sont moins susceptibles de quitter la profession.