Plus que quelques heures et il en sera fini de l’édition 2018 de la campagne Octobre Rose. Comme tous les ans depuis 1994 en France, ce mois d’Octobre a été l’occasion de communications, d’actions et de mobilisations contre le cancer du sein et en faveur du dépistage et de la récolte de fonds pour la recherche. Comme les années précédentes, les agences sanitaires, le ministère de la Santé et tout le gouvernement s’associent à cette campagne en promouvant le dépistage du cancer du sein par mammographie (1).
Sur cette première lecture, il serait légitime de se réjouir du succès d’une telle campagne vis à vis de la santé publique. Hélas, la réalité est bien différente…
L’Institut National du Cancer (INCa) et, dans sa foulée, les autres agences sanitaires ainsi que le ministère de la santé et le gouvernement communiquent sur le « dépistage » du cancer du sein avec des arguments non conformes aux données actuelles de la science.
Selon la revue Cochrane (2), pour une vie sauvée sur 2000 femmes dépistées par mammographie sur un période de 10 ans, il faut déplorer 200 fausses alertes (avec les effets psychologiques induits), 10 sur-diagnostics (avec les traitements lourds qu’ils supposent : chirurgie, radiothérapie, chimiothérapie) et un décès des suites des traitements (3). Or, cette information est sciemment si ce n’est occultée du moins balayée d’un revers de main par la communication officielle de l’Etat (4).
En tant que syndicat indépendant de Jeunes Médecins Généralistes (4), le SNJMG veille depuis sa création à fournir une information scientifique éprouvée (Evidence Based Medicine – EBM) libérée de tout lien industriel ou commercial pour une prise de décision partagée entre praticien et patient. Ainsi, à propos du dépistage par mammographie du cancer du sein, il a dernièrement soutenu (5) la lettre ouverte co signée par différentes organisations (Formindep, Cancer rose, UFC – Que choisir, Groupe Princeps) – auxquelles s’est joint le médecin généraliste et blogueur, Dominique Dupagne – pour demander à l’INCa de revoir sa communication sur le sujet, en tenant compte notamment des conclusions critiques de la concertation citoyenne lancée par Mme Marisol Touraine
De plus, le SNJMG rappelle que la campagne Octobre Rose n’est que la déclinaison française – par le magazine « Marie Claire » et le groupe industriel de cosmétiques « Estée Lauder » – du National Breast Cancer Awareness Month soutenu financièrement par l’entreprise Imperial Chemical Industries ce qui place cette manifestation dans l’univers du « charity business » à l’anglo saxonne.
Afin que la mobilisation de bonnes volontés et d’engagements sincères ne soit pas détournée à des fins commerciales, que le mois d’octobre ne soit plus l’occasion de messages de mauvais gout (6) et que la santé publique ne soit plus ainsi dévoyée, le SNJMG poursuivra son action pour une information médicale de qualité et continuera, autant que de besoin, son interpellation des agences sanitaires et du ministère de la Santé.
Contact presse : Sayaka Oguchi – presidente@snjmg.org
(1) Tweet d’Agnes Buzyn (03.10.18)
(2) Revue Cochrane sur le dépistage du cancer du sein par mammographie (2013).
(3) Video de l’association Cancer Rose (05.10.18)
(4) Video INCa (24.09.18)
(5) Communiqué SNJMG (09.04.18)
(6) Quelques exemples : partie de chasse contre le cancer du sein, affiche aux relents sexistes…