Pour permettre la confrontation entre victime et agresseur présumé, une salle spécifique en visioconférence vient d’être ouverte à l’Unité médico-judiciaire du Centre hospitalier de Saint-Lô – Coutances, dans la Manche (50). Pour à la fois consolider le processus judiciaire et faciliter le recueil de la parole, notamment celle des jeunes victimes, cette unité est installée au sein d’un lieu de soins. Acte judiciaire déterminant, la confrontation permet d’éviter les non-lieux et les classements sans suite dans certaines affaires et favorise la reconnaissance du statut de victime. Cette initiative est ainsi au cœur d’une démarche globale d’amélioration de la prise en charge des victimes sur le territoire de la Manche.
Mise en service en février 2019, la salle de confrontation protégée du Centre hospitalier de Saint-Lô dans la Manche (50) est un lieu initialement dédié au recueil de la parole des victimes mineures, et plus largement de toutes les victimes en situation de fragilité. Conçu pour être chaleureux et rassurant, cet espace est équipé d’un dispositif de visioconférence qui permet de confronter les parties sans les réunir physiquement, le mis en cause étant auditionné à la gendarmerie, au commissariat ou au tribunal. La confrontation est nécessaire pour le recueil des preuves et le bon déroulement du processus judiciaire.
« Cette salle va considérablement faciliter les investigations et consolider la recherche de la vérité. Tous les juges d’instruction et procureurs vont l’utiliser », affirme Véronique Veillard, présidente du Tribunal de Grande Instance de Coutances. Compatible avec la majorité des équipements des gendarmeries et commissariats, la salle de confrontation peut donc être reliée à n‘importe quel lieu judiciaire de l’hexagone. A ce jour, on recense seulement trois salles de ce type en France (Saint-Lô, Orléans, Saint-Malo). A l’initiative de l’Unité Médico-Judiciaire de l’hôpital de Saint-Lô, la salle de confrontation résulte d’une convention signée avec le Tribunal de grande instance et le parquet de Coutances, l’association La Voix de l’Enfant, le Conseil départemental de la Manche et les services de police et de gendarmerie
La visioconférence pour faciliter la parole des victimes et consolider le recueil des preuves
Si le respect des droits de la défense est fondamental, la distance avec l’accusé induite par la visioconférence permet de libérer la parole des victimes car il est très difficile de verbaliser son traumatisme face à son agresseur présumé. La visioconférence est un moyen de généraliser cet acte judiciaire et d’obtenir des éléments de preuves supplémentaires, évitant ainsi les classements sans suite et les non-lieux. « Aujourd’hui, toutes les affaires sensibles passent par nos locaux. Depuis 2015 les juges et le parquet recourent presque systématiquement aux dispositifs mis en place par l’Unité médico-judiciaire », affirme le Docteur Jean-Emmanuel Remoué, chef de service de l’Unité médico-judiciaire du Centre hospitalier de Saint-Lô. L’accueil au sein de cette unité est beaucoup moins intimidant notamment pour les mineurs, car l’hôpital est un lieu dédié aux soins et associé à la guérison. La reconnaissance du statut de victime par la justice, est essentielle pour la reconstruction de la personne.
La Manche, bassin d’innovations pour la prise en charge des victimes
Créée en 2010 pour proposer des consultations de victimologie, l’Unité médico-judiciaire de l’hôpital mémorial de Saint-Lô dispose depuis 2015 d’une salle d’audition conçue pour recueillir les témoignages des victimes. En 2018, elle a assuré 1 616 examens médicaux et 208 auditions de mineurs.
La nouvelle salle de confrontation quant à elle n’a pas vocation à être utilisée massivement ni systématiquement : le parquet table sur environ 10 à 20 confrontations par an. Selon Cyril Lacombe, procureur de la République à Coutances « il y a une synergie très positive entre l’institution médicale et la justice sur le territoire du centre et du sud-Manche, et la mise en place de cette salle est une des étapes qui va vers une meilleure prise en compte de la victime ». La nouvelle salle de confrontation s’inscrit aussi dans une démarche plus globale. La Manche a en effet déjà mis en place des dispositifs innovants pour recueillir par exemple la parole des femmes victimes de violences conjugales, tel que « Envol », récemment présenté au ministère de l’Intérieur par le Docteur Remoué et le procureur Cyril Lacombe. Ce dispositif propose aux patientes reçues en consultation, de compléter une fiche de consentement à signalement, en vue de la transmettre à la justice. Un autre dispositif « Éviction du conjoint violent » permet aussi de maintenir les victimes au domicile conjugal et d’en évincer l’auteur des violences.
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