Depuis le lancement de la campagne nationale de vaccination contre la Covid-19, l’Académie nationale de médecine s’est exprimée publiquement à 7 reprises par communiqués de presse.
Elle a notamment rappelé et expliqué que seule une vaccination universelle permettrait de contrôler la pandémie au cours de l’année 2021 (14 décembre 2020) ; et que la mise en œuvre du programme de vaccination devait être accélérée (30 décembre 2020).
L’Académie nationale de médecine a préconisé :
- La vaccination de toute femme enceinte exposée ou porteuse de comorbidité (2 mars 2021) ;
- La vaccination obligatoire contre la Covid-19 chez les professionnels de santé, le personnel des EHPAD et les auxiliaires de vie pour personnes âgées (8 mars 2021) ;
- La nécessité de créer un passe vaccinal plutôt qu’un passe sanitaire (29 avril 2021) ;
- L’obligation vaccinale contre la Covid-19 (25 mai 2021) ;
- La suspension du remboursement des tests RT-PCR et des tests antigéniques pratiqués pour convenances personnelles (23 juin 2021).
Ces prises de position ont devancé un débat qui ne doit plus être évité devant la reprise épidémique attisée par le variant Delta. Le principe d’une vaccination fondée sur le volontariat révèle aujourd’hui ses limites, ce qui compromet l’accès au niveau d’immunité collective indispensable pour éviter une recrudescence épidémique au 4ème trimestre. Les avis de l’Académie nationale de médecine émis depuis le lancement de la stratégie vaccinale sont confortés par l’étude de l’Institut Pasteur présentée le 29 juin 2021, concluant que la vaccination est à ce jour « l’approche la plus efficace pour contrôler l’épidémie ». Le lendemain, la HAS estimait, elle aussi, que « la réflexion sur l’obligation vaccinale pourrait s’étendre à l’ensemble de la population. »
Différentes approches informatives et incitatives ont été développées auprès des personnes encore réticentes au vaccin de la Covid-19, sans résultats concluants. Les autorités sanitaires évoquent à présent l’éventualité d’une législation relative à l’obligation vaccinale.
Dans ce contexte, les arguments éthiques doivent impérativement s’ajouter aux arguments de santé publique. Si la liberté individuelle doit être respectée, elle est toutefois limitée lorsqu’il y a danger pour autrui. Face à la Covid-19, la vaccination n’est pas seulement un geste civique, c’est un impératif éthique. Il importe que les décisions politiques arbitrées à la suite de la concertation en cours soient éclairées, soutenues et accompagnées par l’avis de personnalités représentatives des champs de la santé et de l’éthique et des instances représentatives de la démocratie sanitaire.
Pour les soignants et les professionnels en charge des personnes âgées et vulnérables, l’obligation vaccinale contre la Covid-19 s’impose au regard des principes de solidarité et de réciprocité. Elle concerne aussi le personnel hospitalier paramédical et administratif, les ambulanciers, les pompiers, etc. Chaque soignant est tenu de tout mettre en œuvre afin de « surtout ne pas nuire ». Les médecins et pharmaciens partagent un devoir d’exemplarité vis-à-vis de leurs patients et un rôle majeur dans la promotion de la vaccination.
Les principes de bienveillance et de non-malfaisance sont au fondement de l’éthique du soin et de l’accompagnement. Mettre sciemment en péril la vie des personnes vulnérables dont on a la charge brouille le sens de l’effort collectif et compromet son efficacité. La protection des plus fragiles est une exigence démocratique à la base même du plan de lutte contre la pandémie. La morbidité et à la mortalité induites par les Covid-19 nosocomiaux en appellent à la responsabilité individuelle et à l’esprit d’engagement, au respect de la déontologie et des bonnes pratiques. Il devrait en être de même pour d’autres professions exercées dans un contexte qui favorise les risques de contamination. Surseoir à l’obligation vaccinale des soignants revient à consentir implicitement à de nouvelles contaminations liées aux soins.
Concernant l’ensemble de la population âgée de 12 ans et plus, l’obligation vaccinale contre la Covid-19 constitue la seule option réaliste en termes de responsabilisation personnelle et d’engagement solidaire permettant de préserver sa santé, celle des autres et de parvenir à l’immunité collective. L’obligation s’impose quand une vaccination efficace et bien tolérée peut maîtriser une infection sévère, potentiellement mortelle et incontrôlable par tout autre moyen. Plusieurs maladies ont justifié une telle décision en France : la variole (1902-1984), la diphtérie (1938), le tétanos (1940), la tuberculose (1950-2007), la poliomyélite (1964). Plus récemment, 11 vaccins du nourrisson ont été rendus obligatoires en 2017.
Promouvoir l’obligation vaccinale, c’est reconnaître l’urgence d’une mobilisation de la communauté nationale dans la lutte contre un nouveau flux pandémique lié aux variants du SARS-CoV-2. Cela exige un effort de communication visant les personnes isolées, vulnérables ou exclues, dépourvues de recours à une information pertinente.
L’Académie nationale de médecine et l’Académie nationale de pharmacie rappellent également notre devoir de solidarité internationale à l’égard des populations démunies du privilège de bénéficier de la vaccination.
Pour l’Académie nationale de médecine et l’Académie nationale de pharmacie :
- La Covid-19 réunit toutes les caractéristiques justifiant l’obligation vaccinale ;
- Le « passe vaccinal » devrait pouvoir attester du respect de cette obligation ;
- La mise en œuvre de l’obligation vaccinale devrait s’accompagner d’une campagne nationale de communication favorisant une pédagogie ciblée de la responsabilité partagée évitant toute stigmatisation, dans le cadre d’un engagement démocratique ;
- La solidarité vaccinale s’impose au plan international.
Contact: Virginie Gustin – virginie.gustin@academie-medecine.fr