La libération de la sexualité et l’accès à la pornographie sont des phénomènes désormais anciens qui ont débuté dans les années 1970-1980. Mais c’est l’avènement des nouveaux médias et leur généralisation qui ont rendu la pornographie accessible partout, facilement et par tous, y compris par les enfants. Alertée par le monde associatif, la Haute Autorité en Santé a transmis la saisine à l’Académie de Médecine par décision n°2021.0245 du 23/09/2021. Le groupe de travail a procédé par une revue de la question et l’audition de personnalités. La constatation de cette accessibilité facilitée implique collectivement de s’interroger à trois niveaux :
- sur l’ampleur du phénomène chez l’enfant et l’adolescent, en particulier en France ;
- sur les effets et les conséquences que cette exposition précoce à la pornographie peut avoir sur les enfants et les adolescents, en particulier sur leur sexualité future en termes d’attentes, de comportements ou de dynamiques relationnelles ;
- sur les mesures que la société devrait mettre en place pour pallier les conséquences de ces phénomènes et, protéger les enfants.
En conséquence, l’Académie Nationale de Médecine recommande :
- Dans le cadre de l’éducation à la santé, de repenser l’éducation à la sexualité à l’école et d’intégrer les parents dans l’éducation à la sexualité.
- De responsabiliser tous les acteurs de l’industrie des nouvelles technologies et de faire évoluer la réglementation.
- De promouvoir la recherche et mener des études de terrain.
- De corriger les disparités territoriales, de généraliser les lieux de prise en charge spécialisée et de renforcer les organismes de contrôle.
A destination des parents, des enfants et des adolescents
- Repenser l’éducation à la sexualité à l’école. La médecine de ville et la médecine scolaire pourrait être utilement associées. Cette promotion de l’éducation à la sexualité devrait être incarnée, ne pas reposer sur une offre exclusivement en ligne ou par envoi de circulaires.
- Intégrer aussi les parents dans l’éducation à la sexualité pour inclure une mise en perspective de ce que les nouveaux médias impliquent en termes de modifications de la sexualité, d’une part, et de risque de cyberharcèlement ou d’hameçonnage, d’autre part.
A destination des vecteurs de la pornographie
- Responsabiliser tous les acteurs de l’industrie des nouvelles technologies à certaines exigences éthiques (ex : obligation de vigilance, culture du respect numérique, labélisation des bonnes pratiques, anticipation des risques de surexposition aux contenus pornographiques des mineurs dans le metavers/web3.0).
- Faire évoluer la réglementation pour obtenir une législation de même nature que pour les médias plus classiques. La mise en responsabilité des prestataires de service internet devrait être associée à celle récente des diffuseurs/créateur de contenus.
A destination des acteurs de la recherche
- Promouvoir la recherche en associant des méthodes qualitatives et quantitatives tant en population générale qu’en populations spécifiques à risque, que sur les comportements problématiques associés.
- Mener des études de terrain pour s’assurer de la bonne mise en application et de l’efficience des politiques publiques dans le domaine de la pornographie.
A destination de la société et des politiques
- Corriger les disparités territoriales en termes de lieux d’accueil pour victimes afin de leur assurer un accompagnement professionnel et digne de ce nom.
- Généraliser les lieux de prise en charge spécialisée pour les conduites addictives associées (Chemsex, consommation excessive de pornographie).
- Renforcer les organismes de contrôle, les moyens de lutte contre la cyberpornographie, et la vérification de l’âge pour l’usage des applications et réseaux au vu de l’ampleur du phénomène et du risque d’exposition précoce à la pornographie et de l’exploitation sexuelle des mineurs.
Le rapport intégral est disponible ici
Contact : virginie.gustin@academie-medecine.fr