Des recherches fondamentales sur la tension artérielle ont conduit des chercheurs de l’Inserm (Unité Inserm 1138 « Centre de Recherche des Cordeliers ») à obtenir des résultats inattendus : les médicaments utilisés pour l’hypertension réduisent les effets secondaires des crèmes à base de corticoïdes que l’on utilise pour certaines maladies de peau. Ces travaux sont publiés dans the Journal of Investigative Dermatology.
Les crèmes dermatologiques à base de corticoïdes sont indiquées pour le traitement symptomatique des affections cutanées inflammatoires telles que la dermatite atopique et le psoriasis par exemple. Elles entrainent néanmoins des effets secondaires fréquents comme des sensations de brûlure légère et finissent très souvent par induire une atrophie cutanée (un amincissement de la peau qui devient fragile), très gênant pour les patients et sans traitement actuel.
Les chercheurs de l’Inserm ont formulé l’hypothèse selon laquelle cet effet délétère pouvait être lié à l’activation inappropriée par ces crèmes de récepteurs minéralocorticoïdes situés dans l’épiderme. Ces récepteurs, présents notamment dans le rein, le cœur, l’œil, et certains neurones, réagissent à l’aldostérone, une hormone qui régule la pression sanguine. Or, des études menées précédemment ont montré qu’ils étaient également très sensibles aux corticoïdes.
L’application de corticoïdes sur de la peau en culture provoque son amincissement : en 6 jours, l’épaisseur de l’épiderme était réduite d’un tiers. Les chercheurs ont alors provoqué le blocage pharmacologique des récepteurs grâce à des antagonistes spécifiques ajoutés au traitement corticoïde. L’impossibilité pour le corticoïde de se fixer sur les récepteurs minéralocorticoïdes restaure la prolifération des cellules de l’épiderme et corrige en partie son atrophie.
D’un point de vue clinique, il s’avère que le spironolactone, médicament utilisé depuis très longtemps comme anti-hypertenseur (et qui dispose d’une AMM), est un antagoniste du récepteur minéralocorticoïde. Les chercheurs ont donc testé un traitement à base de spironolactone pendant 28 jours chez 23 volontaires sains. Différentes compositions de crèmes leur ont été appliquées sur 4 zones de leurs bras :
– une crème contenant un corticoïde puissant utilisé en dermatologie
– une crème contenant de la spironolactone
– la combinaison des deux molécules
– un placebo
Les résultats obtenus montrent que l’ajout de spironolactone au corticoïde améliore l’atrophie cutanée.
Pour Nicolette Farman « Il s’agit d’un travail très original, à la croisée des chemins entre l’endocrinologie et la dermatologie, qui associe des chercheurs fondamentaux et des cliniciens. Il reste désormais à reformuler ce médicament ancien pour une nouvelle application, et à tester ce produit chez des patients atteints de différentes maladies de peau pour confirmer la diminution des effets secondaires sans pour autant empêcher l’efficacité des corticoïdes. »
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Nicolette Farman,
Directeur de recherche Inserm
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