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Frédéric Bizard publie un rapport sur « le vrai visage des réseaux de soins » (Communiqué)

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L’argumentaire des OAP (organismes d’assurance privés) et de leurs plateformes commerciales, fidèlement repris dans le rapport Astéres, tente de réduire le rôle de l’Assurance Maladie dans l’avenir du système de santé. L’assurance maladie prend en charge 76,6% des dépenses de santé, exactement comme en 2000. La maitrise des dépenses depuis dix ans se fait au rabot. Ce n’est pas tant le niveau des dépenses de santé qui est en cause que l’allocation de cette dépense et son efficience. La France connaît une sur-dépense hospitalière et une sous-dépense ambulatoire, relativement aux pays développés comparables. Les mesures structurelles conduisant à des gains d’efficience – le virage ambulatoire, la structuration des parcours de soins des patients ALD, la réforme du financement et de la gouvernance pour baisser les coûts administratifs – n’ont pas été prises. Si les OAP ont un rôle à jouer dans l’avenir du financement des dépenses, il doit être davantage encadré et ne pas interférer avec la gouvernance des soins.

Les accusations répétées sur la responsabilité des pratiques tarifaires des professionnels de santé dans les difficultés d’accès aux soins ne sont étayées d’aucune preuve. Une analyse européenne comparée des prix en optique et en audioprothèse démontre que les prix français sont dans la moyenne basse européenne. Tout patient peut trouver chez un opticien des équipements premier prix à 29 euros, soit un budget moyen annuel de 10 euros. Les garanties des contrats collectifs en optique sont largement déconnectées des besoins réels sanitaires et sont le principal facteur inflationniste sur le marché. Avec une logique de régulation par des prix bas et des volumes élevés, les réseaux de soins conduisent à une baisse de la qualité des soins et un effet recours en hausse qui se traduisent in fine par une hausse des dépenses.

La régulation par la qualité défendue par les réseaux est une chimère. Le rapport reprend l’argument des réseaux concernant la soi-disant satisfaction des patients qui passent par les réseaux. En réalité, cette satisfaction est générale à l’ensemble des usagers vis-à-vis des professionnels de santé en France et est inférieure quand on compare cette satisfaction pour des services délivrés en réseau et hors réseau. Les plateformes commerciales s’attribuent un rôle de détecteur des fraudes et de gendarme des marchés pour lequel elles n’ont ni compétence ni légitimité. Il en est de même dans la régulation de la qualité de soins. Le modèle économique des plateformes commerciales est déconnecté de la qualité des soins et répond à une logique financière de court terme.

Les frais de gestion astronomiques des OAP diminuent le retour sur cotisations des assurés et donc la qualité de la couverture du risque. Les primes des contrats des OAP ont augmenté de 3,5% par an depuis 2000, soit 1,3 milliard d’euros chaque année. Plus de 50% de cette hausse est due à l’augmentation des frais de gestion et d‘acquisition. La segmentation des risques entre les actifs (contrats collectifs) et les inactifs (contrats individuels) creuse les inégalités d’accès aux soins et les renoncements. Plus de la moitié des remboursements des OAP (15 milliards d’euros) couvrent les tickets modérateurs de ville qui représentent un non risque aux dépens d’une couverture du vrai risque, la partie libre des tarifs. C’est ainsi que le marché des OAP est devenu un marché de rente. La stigmatisation des tarifs libres des professionnels de santé vise à renforcer cette rente.

Le défaut de régulation des OAP se retrouve avec une plus forte acuité au niveau des plateformes commerciales. Elles sont à la fois juges et parties dans les décisions prises au nom des assurés, sans aucune supervision d’une autorité indépendante. C’est une menace pour le respect du secret médical, la non sélection du risque et l’utilisation des données de santé.

Les réseaux de soins instituent une médecine à deux vitesses, de qualité et innovante pour les uns, low-cost pour les autres. La médecine des réseaux de soins est inévitablement de moins bonne qualité du fait de la baisse de la qualité des services et des freins à l’innovation que représentent les pratiques des réseaux de soins. L’évolution vers une situation d’acheteurs de plus en  plus monopolistique des réseaux de soins est contraire au principe d’une économie de l’innovation. Plus les réseaux se développeront et augmenteront leur pouvoir de négociation, plus la qualité des soins se dégradera pour la classe moyenne qui sera « piégée » dans les mailles du filet des réseaux. La modulation des remboursements augmentera au fil du temps pour contraindre les assurés à ne pas sortir des réseaux.

Les réseaux, centrés sur les soins (en aval du risque), sont anachroniques avec l’évolution stratégique du risque santé qui sera de plus en plus globale, tout au long du cycle de vie des assurés (en amont du risque). Ils seront un handicap majeur pour l’efficience de notre système de santé s’ils sont conservés.  Ils remettent en cause les principes fondamentaux du système de santé à la française concernant la liberté de choix de son professionnel de santé et l’égalité d’accès aux soins de qualité qui suppose l’indépendance professionnelle des soignants. Ils correspondent à une privatisation de la gestion du risque qui rompt avec les principes solidaires de notre système de santé. La loi Le Roux a marqué un choix politique pour la privatisation de notre système de santé, non assumé politiquement mais bien réel.

Pour lire le rapport, cliquez ici.

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