L’enquête ECHO révèle que 75% des familles ont pris en charge la rééducation de leur enfant en situation de handicap moteur pendant la période de confinement. Face à cette charge mentale et dans le prolongement de la charte de la rééducation / réadaptation, un collectif(*)propose aux familles et aux professionnels de santé une fiche conseil pour la rééducation / réadaptation des personnes confinées en situation de handicap et en déconfinement progressif. Ce collectif interpelle les pouvoirs publics pour une reprise très rapide des soins de rééducation afin de prévenir les effets indirects de cette crise sanitaire.
La crise sanitaire actuelle est une épreuve pour tous mais particulièrement pour les personnes en situation de handicap et leurs familles. Alors que le confinement a nécessité la fermeture des établissements scolaires et une partie des établissements spécialisés, les familles ont été confrontées, dans un contexte inédit, à des difficultés majeures ne permettant pas d’assurer la continuité des suivis médicaux et rééducatifs de leurs enfants.
Afin de développer une vision collective des difficultés rencontrées par les enfants en situation de handicap moteur et leurs familles et d’en tirer les premiers enseignements, une équipe(*)de médecins, rééducateurs, chercheurs et parents a mené une enquête(**) auprès de près de 2 000 familles. La finalité de cette étude est de communiquer auprès des décideurs afin de les sensibiliser sur les besoins spécifiques de ces enfants tout particulièrement dans un contexte de confinement qui tend à durer et d’un futur déconfinement dont les lignes restent floues.
Plus de la moitié des familles mécontentes du suivi rééducatif et médical de leurs enfants
Les familles se sont retrouvées seules et ont souvent dû pallier les besoins thérapeutiques de leurs enfants avec l’arrêt de la plupart des activités libérales. Cette enquête révèle ainsi que les familles sont majoritairement mécontentes (54,4%) du suivi rééducatif et médical de leurs enfants pendant le confinement, celles-ci ayant été contraintes, dans 75% des cas, d’assurer elles-mêmes la rééducation nécessaire au traitement de leur pathologie.
Les pathologies telles que la paralysie cérébrale ou les maladies neuromusculaires sont à l’origine de faiblesse musculaire, troubles du tonus, difficultés du contrôle des mouvements, perturbant la posture et la mobilité des personnes atteintes et provoquant ainsi des limitations pour la réalisation des activités de la vie quotidienne. Dans cet esprit, il est essentiel de préserver les capacités motrices par une pratique régulière de la rééducation et de prévenir l’apparition de complications – risquant d’entraver encore davantage la mobilité et d’augmenter les difficultés au quotidien– telles que les déformations orthopédiques ou le déconditionnement physique.
La solitude et l’épuisement des familles face à la prise en charge du quotidien
Alors que 31% des personnes interrogées déclarent s’occuper seules de leur enfant, les familles rencontrent de grandes difficultés dans la gestion de la vie quotidienne dont notamment la charge mentale excessive (49%).
Un confinement qui pèse lourdement sur la vie quotidienne des enfants
Cette étude démontre que, dans 45% des cas, le confinement affecte le moral des enfants et que le comportement des enfants en est modifié dans 55% des cas (troubles du comportement ou du sommeil notamment).
Quels enseignements pour quelles approches concrètes dans l’avenir ?
Cette enquête pose des constats auxquels il est nécessaire d’apporter des réponses pratiques.
C’est dans cet esprit que le Collectif(*)a développé une fiche de conseils à destination des familles pour la rééducation / réadaptation des personnes confinées en situation de handicap et en déconfinement progressif. Celle-ci invite à une évaluation régulière du « bénéfice / risque » individuel pour rechercher un équilibre entre, d’une part, les risques liés à la pandémie et, d’autre part, la santé globale, les objectifs d’activités et de participation de l’enfant ou l’adulte et la préservation de la famille et des aidants.
Cette crise a également confirmé la nécessité d’identifier pour chaque enfant ou adulte un relais de coordination de la rééducation. Elle a révélé l’émergence de nouvelles approches innovantes et pragmatiques en matière de rééducation / réadaptation et d’accompagnement permettant, dans certains cas, le maintien des soins et du dialogue à distance avec le rééducateur et le médecin prescripteur. Le télésoin a, par exemple, permis de fournir des réponses concrètes et d’épauler les familles en leur apportant un premier niveau de coordination. Après une phase d’évaluation, il nous semble nécessaire que les autorités de santé en facilitent l’accès et ce dans toute la chaîne du soin à destination d’une personne en situation de handicap. La prise en compte de ces développements innovants permettrait une plus grande flexibilité dans la prise en charge tant dans le contexte actuel qu’à plus long terme dans le cadre de nouvelles approches thérapeutiques plus souples pour la vie des familles.
Cette crise sanitaire doit susciter enfin un grand plan de relance de la recherche médicale afin d’en mesurer les effets indirects sur les personnes en situation de handicap et promouvoir des soins innovants.
Restons tous mobilisés pour la qualité des soins au service d’objectifs d’activité et de participation choisis par l’enfant et sa famille ou l’adulte en situation de handicap.
Contact presse: Anne de Lander – annedelander@gmail.com
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(*) BEaCHILD (Centre Breton de Recherche et d’Innovation pour la Réadaptation et le Développement de l’Enfant), FRISBEE (Fédération des SSR pédiatriques de Bretagne Occidentale), R4P (Réseau Régional de Rééducation et de Réadaptation Pédiatrique en Auvergne-Rhône Alpes), Département de MPR du CHU – Les Capucins d’Angers, SFERHE (Société Francophone d’Etudes et de Recherche sur les handicaps de l’enfance), SOFMER (Société Française de Médecine Physique et de Réadaptation), Fondation Paralysie Cérébrale, IFRH (Institut Fédératif de Recherche sur le Handicap), FFAIMC (Fédération Française des Associations d’Infirmes Moteurs Cérébraux), Institut Motricité Cérébrale (IMC), SFNP (Société Française de Neurologie Pédiatrique), Ordre des masseurs-kinésithérapeutes, APF France Handicap etFIRAH (Fondation Internationale de la Recherche Appliquée sur le Handicap).
(**)ECHO : Enfant – Confinement – Handicap – Besoins I 0 à 18 ans dont 44% sont atteints de paralysie cérébrale, 23% souffrent d’une maladie génétique ou malformative, 21% autre et 12% sont concernés par une pathologie neuro-musculaire.