Le BEH 31-32 se compose d’un éditorial et de 5 articles.
Résumé du contenu :
- Editorial : l’élimination des hépatites chroniques virales est-elle un objectif raisonnable à l’horizon 2030, Nathalie Ganne-Carrié et Marc Bourlière, Secrétaire Générale et Président de l’Association Française pour l’Etude du Foi (AFEF)
- Campagne de dépistage universel « Montpellier sans hépatite » 2019 : description et évaluation, Anne Guinard & coll., Santé publique France
Un programme innovant rassemblant de nombreux partenaires (hospitaliers, libéraux, associatifs et institutionnels) a été élaboré afin de mettre en place, dans différents sites d’un même laboratoire de biologie médicale (LBM), une campagne de dépistage universel des personnes pouvant avoir été infectées par le virus de l’hépatite C (VHC) dans la ville de Montpellier pendant trois mois, de mi-septembre à mi-décembre 2019.
L’objectif de cet article est de présenter la campagne de dépistage et de fournir des éléments quantitatifs d’évaluation de cette campagne.
La population d’étude était : i) Les personnes se présentant directement pendant la période définie au LBM de Montpellier, sans ordonnance et sans frais ; ii) les personnes pour lesquelles une exposition à risque d’infection par le VHC avait été identifiée par un médecin qui avait alors prescrit un dépistage. Un questionnaire identifiant les facteurs de risques était proposé au moment du prélèvement.
Sur les 13 semaines de dépistage, 10 143 tests de dépistage ont été réalisés, dont 8,7% chez
des patients sans ordonnance. Une augmentation de 22% du nombre de tests réalisés par rapport à la même période de 2018 a été notée. Le taux de séropositivité était de 0,89% (90 sérologies positives), contre 1,12% (N=95) en 2018. Au total, 9 patients avaient un ARN positif et ont été pris en charge. Le taux de réponse au questionnaire était de 57% et les principaux facteurs de risque étaient des actes divers à risque (33%) et des actes médicaux (33%).
Ce modèle de campagne de dépistage est innovant et pourrait être reproduit pour d’autres thématiques. Bien que l’évaluation n’ait pas pu mettre en évidence une amélioration en termes de détection du nombre de nouveaux cas, elle a permis de montrer l’intérêt d’une collaboration multipartenariale associant dépistage et prise en charge des patients.
- Prévention de la transmission mère-enfant du virus de l’hépatite B en France. Enquête nationale périnatale 2016, Cécile Brouard & coll., Santé publique France
La prévention de la transmission mère-enfant du virus de l’hépatite repose sur le dépistage prénatal de l’antigène (Ag) HBs, obligatoire en France depuis 1992, et, en cas de mère porteuse de l’AgHBs, sur la sérovaccination anti-VHB du nouveau-né dès la naissance. L’objectif était d’estimer les fréquences de réalisation du dépistage prénatal et de la sérovaccination, la prévalence de l’AgHBs, et d’étudier leurs facteurs associés.
Les données de l’Enquête nationale périnatale (ENP) 2016, recueillies par des sages-femmes enquêtrices auprès de l’ensemble des parturientes en France pendant une semaine, ont été analysées en univarié et multivarié (régression de Poisson) : caractéristiques sociodémographiques maternelles, suivi prénatal, état de santé du nouveau-né et caractéristiques de la maternité.
Le statut AgHBs était documenté pour 97,0% des femmes. En analyse multivariée, il était plus
souvent absent pour les femmes accouchant en métropole hors Île-de-France (rapport de prévalence, RP : 3,9, intervalle de confiance à 95%, IC95%: [2,6-5,9]), en maternité privée (RP : 1,8 [1,4-2,3]), pour celles principalement suivies pendant les six premiers mois par un gynécologue-obstétricien (RP : 1,5 [1,1-2,0]) ou par un médecin généraliste (RP: 1,9 [1,2-3,0]) par rapport à celles suivies par une sage-femme et pour celles ayant eu un suivi prénatal insuffisant (RP : 2,1 [1,5-3,1]). La prévalence de l’AgHBs était de 0,84%, atteignant 5,5% chez les mères nées en Asie ou en Afrique subsaharienne. La mise en oeuvre de la sérovaccination n’était rapportée que pour 70 des 110 nouveau-nés de mères porteuses de l’AgHBs.
Le dépistage prénatal de l’AgHBs est très largement réalisé, mais la mise en oeuvre de la sérovaccination anti-VHB demeure très insuffisante.
- Impact clinique du traitement de l’hépatite C chronique par les antiviraux d’action directe. Résultats de la cohorte prospective ANRS CO 22-Hepather, Fabrice Carrat & coll, Sorbonne Université
L’objectif de cette étude était de comparer la mortalité, l’incidence du carcinome hépatocellulaire (CHC) et de la cirrhose décompensée (CD) chez les patients traités par rapport aux non traités par antiviraux d’action directe (AAD) dans la cohorte prospective française Hepather.
Des adultes atteints d’une infection chronique par le VHC, sans co-infection virale B, ni antécédent de CD, CHC, transplantation hépatique ou de traitement avec inhibiteurs de protéase de 1ère génération, ont été inclus entre août 2012 et décembre 2015. L’association entre AAD et survenue des évènements a été analysée à l’aide de modèles de Cox à risques proportionnels temps-dépendants.
9 895 patients ont été inclus : 7 344 traités et 2 551 non traités (suivi médian de 33 mois [IQR: 24-41]). Le décès, le CHC et la CD ont été observés chez 218 (129 traités, 89 non), 258 (187 traités, 71 non) et 106 (74 traités, 32 non) patients respectivement. L’exposition aux AAD était associée à un risque de CHC et de CD en modèle de Cox non ajusté (HR : 2,77) et (HR : 3,83), respectivement. Après ajustement, l’exposition aux AAD était associée à une diminution de la mortalité globale (HR : 0,48 ; IC95%: [0,33-0,70]), de CHC (HR : 0,66 [ 0,46-0,93]) et n’était plus associée à la CD (HR : 1,14 [0,57-2,27]).
Chez les patients ayant une infection chronique par le VHC, le traitement par AAD est associé à un risque réduit de mortalité et de CHC.
- Epidémiologie des donneurs de sang infectés par le VHB et le VHC et risque résiduel de transmission de ces infections par transfusion en France 1992-2018, Josiane Pilonel & coll., Santé publique France
Depuis 1992, la surveillance des donneurs de sang a pour objectif de suivre la prévalence et l’incidence des infections transmissibles par le sang, dont celles dues aux virus des hépatites B (VHB) et C (VHC), ainsi que les facteurs de risque, et d’évaluer le risque résiduel de transmettre ces infections par transfusion. Cet article présente le bilan de la surveillance pour ces deux virus sur la période 2016-2018 et les tendances depuis 1992.
Sur les 8,8 millions de dons prélevés entre le 1er janvier 2016 et le 31 décembre 2018, 493 ont été confirmés positifs pour le VHB (AgHBs et/ou ADN) et 260 pour le VHC (Ac et/ou ARN). La prévalence du VHB (5,5 pour 104 donneurs) était 2 fois plus élevée que celle du VHC (2,6 pour 104) et l’incidence 4 fois plus élevée (respectivement 0,59 et 0,15 pour 105 donneurs-années). Depuis la période 1992-1994, la prévalence a été divisée par 5 pour le VHB, par 15 pour le VHC et l’incidence par 10 et 20 respectivement. Être originaire d’une zone d’endémie est le facteur de risque le plus fréquent pour le VHB (53% sur la période 2016-2018). Pour le VHC, les facteurs de risque les plus fréquents sont l’exposition nosocomiale (41%) et l’usage de drogues (19%). Sur la période 2016- 2018, le risque résiduel a été estimé à 1/2 850 000 dons pour le VHB et 1/34 000 000 pour le VHC. Depuis la période 1992-1994, ils ont été divisés respectivement par 30 et 170.
Bien que la population des donneurs de sang soit sélectionnée, elle donne des informations sur la population générale : depuis 1992, la forte diminution de la prévalence du VHC, notamment chez les plus jeunes, et la chute de l’incidence confortent l’hypothèse d’une diminution de l’incidence du VHC dans la population générale en France. Les données de surveillance des donneurs de sang démontrent que la sécurité virale des produits sanguins est aujourd’hui très élevée.
- Fréquence des facteurs de risques de carcinome hépatocellulaire en France en 2017 : étude à partir de l’appariement des informations du Système national des données de santé, Yao Cyril Kudjawu & coll., Santé publique France
Cet article présente la fréquence des hépatites virales chroniques B (HVB) et C (HVC), de la
consommation excessive d’alcool et des désordres métaboliques chez les patients nouvellement diagnostiqués et hospitalisés pour carcinome hépatocellulaire (CHC) en France métropolitaine en 2017.
Les données proviennent du Système national de données de santé (SNDS). À l’aide des codes CIM-10, CIP/ATC/UCD et NABM, et grâce aux appariements de données, des algorithmes de sélection de patients nouvellement diagnostiqués et pris en charge pour CHC en 2017 ont été développés et la fréquence des facteurs de risque de CHC a été calculée.
En 2017, 7 693 nouveaux patients étaient hospitalisés pour CHC. L’âge moyen au diagnostic de CHC était 69 (écart-type : 11,2) ans. Parmi les patients avec CHC, 1 822 (23,7%) présentaient une hépatite virale chronique, dont 542 (7,0%) une HVB et 1 280 (16,6%) une HVC. La co-infection HVB-HVC était observée chez 234 (3,0%) patients. L’hépatite virale chronique était le seul facteur de risque de CHC chez 581 (7,5%) patients. Une consommation excessive d’alcool, un diabète ou un surpoids/obésité morbide était retrouvé chez 5 980 (77,7%) patients. Chacun de ces trois facteurs de risque était retrouvé seul respectivement chez 20,8%, 8,3% et 3,1% des patients avec CHC.
La consommation excessive d’alcool reste le facteur de risque le plus important de CHC en France. Les hépatites virales chroniques, associées ou non aux facteurs de risque non infectieux, représentaient près de 25% des facteurs de risque alors qu’elles sont évitables par la vaccination ou guérissables par les nouveaux traitements à action directe. Les résultats de cette étude contribuent à enrichir les connaissances épidémiologiques des facteurs de risque de CHC et à aider les décideurs dans l’élaboration des politiques de santé en matière de prise en charge du CHC.
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