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« Le Gouvernement veut-il vraiment sauver l’Hôpital Public et soulager ses soignants ? », interroge APH (Communiqué)

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Lors de la présentation du plan canicule 2021, météo France annonçait que l’été serait caniculaire.

APH prévenait déjà que l’été ne serait non pas brûlant mais volcanique. La potentialisation de la crise sanitaire Covid avec la canicule couplée à l’épuisement sans précédent des professionnels de santé et aux manques de moyens n’augurait rien de bon. Une fois de plus nous étions hélas dans le vrai.

Action Praticiens Hôpital, union d’Avenir Hospitalier et de la Confédération des Praticiens des Hôpitaux pense à toutes les familles qui ont perdu un proche pendant cette période.

APH ne cesse de rappeler l’impéritie du gouvernement. En effet, malgré nos alertes répétées qui ont commencé bien en amont de la crise et sont encore actives, ce dernier après la première vague a toujours surfé sur une communication décalée ou des « paris » sur certaines orientations.

Un exemple, alors que l’Espagne traverse la 5ième vague du Covid, la France connaitrait seulement sa 4ième dans un contexte de pandémie mondiale… Un autre constat : en pleine pandémie la France n’est plus soumise à un état d’urgence sanitaire mais à celui de sortie de l’état d’urgence sanitaire depuis le 31 mai 2021…

Quelles ont été les conséquences de ces choix ? Été meurtrier aux Antilles, fermetures perlées de services d’urgence et de SMUR, de soins critiques et d’hospitalisation en métropole, inefficacité chronique des plans blancs pourtant activés sur la quasi-totalité du territoire national. Combien d’étés encore allons-nous dire que ça n’a jamais été aussi grave ? Combien d’hivers allons-nous passer à gérer l’impossible et à le subir ? Jusqu’où faudra-t-il tomber pour que le gouvernement se réveille ? Faut-il attendre l’épuisement de tous et encore et toujours décompter nos morts ?

 La situation de l’Outre-Mer – Antilles, mais aussi Mayotte, Polynésie – est pointée du doigt par APH depuis des mois. Le manque d’accès au soin, l’insalubrité des infrastructures, le manque de personnels prédisaient une catastrophe sanitaire, chez une population pour laquelle la réticence à la vaccination n’a pas été de surcroît suffisamment prise en compte. Résultats : des hospitalisations pour oxygénothérapie dans des hôtels où les patients s’aggravent, des choix éthiques d’accès à la réanimation inacceptables, et certainement des morts évitables…

Finalement un appel au secours de la métropole en catastrophe pour du personnel médical et paramédical déjà au front depuis plusieurs mois qui a encore répondu présent. On ne parle pas d’un tremblement de terre ou d’un quelconque sinistre qui vient de se passer, mais d’une crise qui dure depuis plus d’un an et demi. Où est l’anticipation ? Pourquoi le gouvernement est-il resté sourd aux remontées du terrain et a-t-il refusé d’aborder l’Outre-Mer dans le Ségur ? Pourquoi les ministères en charge du dossier Outre-Mer ne répondent plus aux demandes de construction proposées, écrites et envoyées par les acteurs de terrain d’APH en Outre-Mer avec leurs collègues de métropole pour un accès aux soins pour tous ?

Comment 2 ministres de la République ont-ils pu débarquer aux Antilles dans le seul but d’y jouer une représentation médiatique scénarisée et minutée de la République volant au secours de ses îles lointaines, tout en refusant de rencontrer les représentants des praticiens hospitaliers ?

Le Ségur…Un coup d’épée dans l’eau ou un mirage de trop ?  L’augmentation des salaires des hospitaliers qui a été partagée avec le privé et les ESPIC alors que la France occupait le 26ième rang des rétributions de l’OCDE n’a pas permis de combler le retard. En effet, tous les autres pays ont réalisé l’importance des soignants qui doivent être en nombre suffisant pour un système de soin de proximité et de qualité et ont revalorisé les salaires en conséquence. Même le Royaume Uni, prônant pourtant une politique ultra-libérale, débloque 14 milliards d’euros par an supplémentaires pour son système de santé public, le NHS.

Le gouvernement français se félicite de l’effort historique de… 8 milliards d’euros en 2021 pour l’ensemble de la santé – hôpital, établissements privés et ville, pour une population comparable : le Ségur, dont on attaque l’ « an II », « serait une réussite ». Ce n’est pas en utilisant des superlatifs et une sémantique impériale qu’on fera du Ségur le traitement de fond qu’attend l’Hôpital Public moribond. Ce n’est pas de communication dont nous avons besoin, mais d’action. Si la réforme de la gouvernance est beaucoup trop timide, les mesures d’attractivité sur les carrières hospitalières, installées depuis bientôt un an, sont strictement inefficaces : départ massif des personnels paramédicaux, particulièrement dans les secteurs de soins critiques, mais aussi médicaux.

Fermetures de services d’urgence et des Smur, remplacement de médecins par des équipes paramédicales pour traiter les urgences vitales – les plus graves – et déprogrammations chirurgicales massives dans les régions où le COVID a occasionné un nombre important de malades. Où est la démocratie dans cette  gouvernance, où est le rôle décisionnaire de la CME dans l’élection des responsables d’unités par les pairs.

Là où l’État aurait pu lancer une politique de recrutement pour former en France les étudiants en santé le numerus apertus a montré ses limites. Là où les directions d’hôpitaux auraient dû anticiper les recrutements pour combler le manque de soignants une politique de gestion au fil de l’eau a souvent été préférée. Là où les ARS auraient dû, en instituant des plans blancs, résoudre ces manquements en régulant l’offre territoriale de soins publics et privés, elles ont échoué, laissant l’hôpital public à son triste sort…

Tous ces plans blancs activés par-ci, par-là au gré des fluctuations de l’épidémie sont vides de sens car détournés de leur fonction initiale qui était de pallier une crise sanitaire majeure mais temporaire. La chronicité de celle-ci, qui dure depuis un an et demi, ne permet plus d’appliquer ces mesures de report de congés et autres temps de repos, tout le monde le sait et pourtant on continue à les agiter dans le seul objectif de faire croire que la situation est maitrisée. Ce n’est pas le cas !

Tout le monde est perdant. Les patients dont on reporte (parfois plusieurs fois) les soins et les interventions, une perte de chance dans la prise en charge des maladies chroniques, les dépistages, les diagnostics précoces avec des conséquences bien tristement documentées lors des vagues précédentes, les personnels qui sont épuisés, les urgences qui sont saturées quand elles ne ferment pas… tous les citoyens.

Le gouvernement annonçait un été caniculaire nous sommes au regret de vous alerter d’une lame de fond jamais vue dans l’hôpital public. Le principe des fermetures estivales programmées dans les établissements de soin publics et privés pour que certains soignants puissent prendre leurs congés bien mérités est un non-sens organisationnel… Comme la fermeture de milliers de lits, comme le manque chronique de soignants… Dans ce désert sanitaire qui progresse partout la souffrance au travail explose !!! Cet accueil dégradé sur certains territoires le plus souvent ruraux vont venir potentialiser la vulnérabilité de certains de nos concitoyens et n’est pas digne de la France et de l’héritage de notre système de santé qui est un bien commun à défendre « coute que coute ».

La majoration de l’absentéisme avec un nombre d’arrêts maladie ou d’accident de travail en forte augmentation, pointé d’ailleurs ces jours-ci par la Cour des Comptes, est révélatrice de cet épuisement des professionnels. Cerise sur le gâteau, la médecine du travail devrait pouvoir intervenir pour prévenir ou limiter la dégradation de ces conditions de travail. La loi du 5 août propose à la médecine du travail le contrôle des obligations vaccinales dans les établissements de santé, tout en sachant que « la médecine du travail n’en a pas les moyens », la responsabilité reste celle de la direction.

En conséquence, la violation du principe de confidentialité des données de santé vis-à-vis de l’employeur. APH avait pourtant demandé, bien avant le Ségur, que l’on donne des moyens à la médecine du travail : comment comprendre, dans un secteur où l’épuisement professionnel et psychologique est endémique, qu’aucun moyen ne soit donné aux acteurs de la prévention et à la préservation des conditions de travail ?

Parce qu’on a oublié que la santé était le premier des investissements, on a détruit les espérances qu’ils avaient placés dans la République.

A l’hôpital public, pas de vacances mais beaucoup de vacance !

Le Ségur et ses mesures d’attractivité qui devaient permettre de favoriser le recrutement et l’emploi hospitalier n’ont rien changés car elles profitent au « flux entrant », pas au « stock » comme l’indique le Ministre. Lors du Ségur, tant avec les organisations paramédicales que médicales, le gros de l’effort négocié entre le Ministre et les organisations syndicales signataires est donné à ceux qui ne sont pas encore entrés dans la carrière, tandis que ceux qui soutiennent l’hôpital public depuis des années – et l’ont particulièrement soutenu depuis le début de la crise sanitaire – sont les dindons de la farce. Pour combien de temps encore ?

Pendant le Ségur, nous soignants et praticiens attendions enfin la prise en compte réelle de la situation de délabrement de l’Hôpital Public sous doté financièrement avec des fermetures de lits incessantes et une fuite du personnel par manque d’attractivité.

Où était le véritable plan de relance autour d’un ONDAM hospitalier suffisant pour que l’Hôpital Public remplisse toutes ses missions au service de l’ensemble de nos concitoyens ? Quand sera-t-il être lancé pour une mise en action immédiate ?

C’est bien pour cela qu’APH n’a pas signé le Ségur et qu’aujourd’hui APH demande toujours :

  • Une réflexion de fond sur le financement de l’hôpital public et de la santé en général : le PLFSS doit permettre l’attractivité des carrières hospitalières et la fidélisation des professionnels de santé qui y travaillent, sans qui on ne pourra rouvrir les services qui ont été fermés.
  • Un Ségur, ou mieux, un Plan Santé pour l’Outre-Mer, axé tant sur l’attractivité des carrières que sur la qualité des infrastructures, l’accès aux soins et les parcours de soins des citoyens ultra-marins.
  • La prise en compte d’indicateurs de non-qualité de soin comme les « patients brancards » cause de surmortalité, la fermeture de services ou de lits par manque de personnel, la souffrance au travail…
  • Des mesures immédiates de reconnaissance de la fidélité des professionnels de santé engagés depuis des années dans l’hôpital public : il s’agit, pour les praticiens hospitaliers
    • Du reclassement équitable des praticiens (quatre ans d’ancienneté pour les PH nommés avant le 1er octobre 2021 correspondant à la bonification obtenue pour les jeunes praticiens entrants).
    • De l’ouverture du chantier du temps de travail : décompte horaire, volume horaire.
    • De l’ouverture, pourtant promise pendant le Ségur, du chantier de la permanence des soins : révision de l’arrêté du 30 avril 2003, valorisation des gardes et astreinte en termes de rémunération et de reconnaissance en pénibilité pour la retraite.
    • De la sanctuarisation et du financement de la formation continue des praticiens.
    • D’une réelle prise en charge des praticiens par le service de santé au travail conformément à la législation du droit du travail.

Cet appel unanime se base sur un constat réel et une analyse fine de la situation de l’Hôpital Public réalisée par les acteurs de terrain pour qu’enfin la dynamique de déconstruction d’un modèle qui a fait ses preuves change dans le fond et la forme. L’Hôpital Public est devenu une usine à soins et a perdu dans cette course à l’activité une partie du sens qui pourtant est essentielle pour un juste soin sur l’ensemble du territoire national. Nos propositions sont à la disposition de tous les candidats pour la présidentielle de 2022 car il est urgent de redresser le cap pour retrouver le sens de nos métiers et de nos missions de soin. Il n’y a plus de temps à perdre pour sauver ce qui peut encore l’être et nous sommes également à la disposition du gouvernement en place pour corriger le tir. Parce que nos gouvernants ont oublié que la santé de nos concitoyens était le premier des investissements d’une nation moderne, cette politique de l’oubli, pour ne pas écrire du déni, a détruit les espérances que certains français avaient placés dans la République pour leur bien-être et leur santé. Les soignants et les praticiens mériteraient à ce titre la juste reconnaissance qu’ils sont en droit d’attendre et non un simple affichage basé sur une communication hors sol.

APH dit STOP à la communication et demande un véritable plan d’action réfléchi et construit par les acteurs de terrains.

Contact : eric.branger@gmail.com

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