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« De l’instrumentalisation à la flagornerie : où en est l’Igas ? » (Communiqué)

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Sur un sujet sérieux, « les partages de compétences entre professionnels de santé », une mission IGAS est saisie par le ministre. Le SNPHARE vient d’avoir connaissance de son rapport.

Soyons clairs : le partage de compétences ne se décide pas sur la dénomination d’un métier, mais sur la formation qui conduit à ce métier. L’ensemble des conclusions du rapport tend à suggérer que le médecin n’a aucune valeur ajoutée dans la prise en charge de la santé de nos concitoyens, répondant ainsi à la volonté politique de démédicaliser la santé en France.

Une petite partie du rapport est consacrée à la pratique de l’anesthésie. Alors que le SNPHARE s’est exprimé à de nombreuses reprises (notamment, en 2021, audition auprès des parlementaires et entretien avec le cabinet du Ministère) sur le fonctionnement du binôme médecin anesthésiste-réanimateur – infirmier anesthésiste (IADE) et qu’il entretient avec la représentation professionnelle des IADE des relations permettant d’aller vers un objectif commun de reconnaissance statutaire dans le cadre du décret de sécurité de l’anesthésie, la mission IGAS n’a pas jugé utile de consulter les syndicats médicaux professionnels concernés !

La marge de manœuvre de la mission était étroite… et même nulle concernant la question centrale de l’exercice des IADE : comment répondre à l’affirmation de la lettre de mission « l’expertise de ces infirmiers (IADE) devrait en effet leur permettre un accès spécifique à la pratique avancée » ? Le travail est donc fait sans hésitation avec la recommandation n° 31.

Là où ce rapport fera date, c’est que cette reddition est aussi accompagnée d’une lecture partiale, biaisée et souvent erronée des faits. Que penser de la discordance entre les réponses des ARS rapportées en pièces jointes et la lecture qu’en font les rapporteurs ?

Les ARS rapportent qu’il y a d’autres sujets bien plus urgents à régler dans ce champ des professions de santé (T2 p66). Que penser de l’argumentaire confus qui mobilise une sociologie primitive où les habitus rattachés à la féminisation ou la jeune génération s’appliquerait au corps médical mais pas au corps paramédical ? Que penser de cette lecture pour le moins étrange du cadre juridique qui encadre la relation médecin anesthésiste-réanimateurs et les IADE ? La commande de la mission impose-t-elle aussi que les termes juridiques consacrés soient remplacés et distordus ?

Il est vrai que pour nourrir l’argumentaire, les lectures des messages Twitter et des réseaux sociaux apparaissent plus contributives qu’une analyse sérieuse du code. Ce rapport dérive lentement vers la fable. Tout lecteur averti et sérieux ne pourra qu’être consterné par la confusion, les contre-vérités égrenées tout au long de ce rapport.

Passons cet épisode cocasse et affligeant : consacrons-nous aux choses sérieuses. Cette partie du rapport dévoie totalement le décret de 1994 fondateur de la qualité et de la sécurité des soins en anesthésie, et va jusqu’à écarter le rôle du binôme « médecin anesthésiste-réanimateur – IADE » du gain en morbi-mortalité anesthésique observé en quelques dizaines d’années. Il feint d’ignorer la différence entre l’acte technique d’anesthésie au bloc opératoire d’une part, et la stratégie médicale périopératoire, de la consultation au bloc puis à la période post-opératoire, en fonction des problèmes médicaux identifiés à chaque étape ?

Quid de l’évolution du décret sécurité de l’anesthésie de 1994 si le rôle du médecin dans la prise en charge anesthésique periopératoire est une option, laissée à la main du législateur ? Là, nos rapporteurs sont silencieux et inconséquents !

L’élaboration d’un nouveau statut unifié pour les infirmiers de spécialités est nécessaire et doit être traité sérieusement. Des voies juridiques considérées comme solides sont actuellement explorées par les professionnels concernés et leurs représentations. Mais encore faudrait-il accepter de parler avec l’ensemble des professionnels plutôt que les écarter de principe du dialogue ou de toutes concertations, et inciter à une opposition entre médecins et IADE, que nous n’avons jamais souhaitée.

Il est une fable selon laquelle il est urgent de rechercher des infirmiers anesthésistes de zones sous dense capables de travailler en toute autonomie sans médecin à ses côtés, plutôt que de reconnaître la qualité des compétences des infirmiers d’anesthésie. Nous ne soutenons pas cette thèse. La qualité et la sécurité des soins réside dans la coordination entre les professionnels de santé, et non dans la démédicalisation des actes à risque.

 

Contact : Anne Wernet – anwernet.snphar@gmail.com

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