Le déficit immunitaire combiné sévère (DICS) est un groupe de maladies génétiques rares mais graves : sans traitement, la plupart des enfants atteints décèdent d’infections dans la première année de vie. Le dépistage du DICS à la naissance permettrait de réduire l’errance diagnostique des enfants atteints, de poser un diagnostic précoce et de mettre en place au plus vite une prise en charge appropriée. A l’issue de son évaluation, la Haute Autorité de santé recommande aux pouvoirs publics d’intégrer le dépistage du DICS dans le programme national de dépistage néonatal, sous la condition d’une évaluation obligatoire à cinq ans et d’évaluations intermédiaires régulières.
Très rare (environ 1 cas pour 60 000 naissances), le DICS recouvre un large spectre de maladies génétiques caractérisées par un déficit profond de l’immunité cellulaire (liée aux lymphocytes T) et humorale (liée aux anticorps), entrainant chez le nourrisson une prédisposition élevée aux infections graves pouvant entrainer son décès.
Une étude pilote nommée DEPISTREC a été menée par le CHU de Nantes dans 48 maternités en France entre 2014 et 2017 sur le dépistage du DICS par le test de quantification des TRECs (T-cell receptor excision circles) à partir d’une goutte de sang séchée sur papier buvard. La prévalence du DICS étant très faible, cette étude n’a pas permis de conclure ni sur le bénéfice clinique ni sur le bénéfice économique du dépistage du DICS à la naissance.
Chargée d’évaluer la pertinence de s on intégration dans le programme national du dépistage néonatal, la HAS a donc conduit son évaluation en s’appuyant sur les données du registre CEREDIH (Centre de référence déficits immunitaires héréditaires), l’analyse de la littérature scientifique et l’expérience des pays qui ont mis en place ce dépistage.
Dépister pour assurer un diagnostic et une prise en charge précoces
Généralement asymptomatique à la naissance, le DICS peut être dépisté par test de quantification des TRECs, permettant le cas échéant d’établir une lymphopénie T profonde, c’est-à-dire un important déficit en lymphocytes T. Tout test de dépistage TREC positif doit faire l’objet d’une confirmation diagnostique, par cytométrie de flux, une technique permettant de compter et caractériser les lymphocytes T. Si le diagnostic est confirmé, une étude génétique, pour identifier le type d’anomalie moléculaire, est réalisée.
Le traitement du DICS repose essentiellement sur la greffe de cellules souches hématopoïétiques (CSH) qui permet de remplacer le système immunitaire défaillant et de guérir les enfants. Plus la greffe de CSH a lieu rapidement après la naissance, plus son efficacité est importante. Dans son attente, une pris e en charge prophylactique est mise en en place (isolement en enceinte stérile, antibioprophylaxie, antiviraux, antifongiques).
Plusieurs arguments plaident donc pour la mise en place du dépistage : la gravité du déficit immunitaire combiné sévère, l’enjeu vital du diagnostic précoce et de la prise en charge rapide avant la survenue d’infections, l’existence d’un traitement de référence et la disponibilité d’un test de dépistage reconnu.
Cependant, des incertitudes persistent, notamment, sur les conséquences de la détection de nombreuses lymphopénies T non DICS résultant du dépistage, sur l’efficience du dépistage en l’absence de données françaises robustes, sur la capacité de garantir une organisation optimale du dépistage permettant une greffe de cellules souches hématopoïétiques dans le bon délai.
Au vu de la grande rareté de la maladie ne permettant pas d’objectiver un impact favorable du dépistage sur un échantillon, même très important, la HAS recommande aujourd’hui la mise en place d’un dépistage du DICS chez tous les nouveau-nés, sous conditions. Elle préconise ainsi une période d’évaluation obligatoire à cinq ans, qui devra permettre de lever les incertitudes qui subsistent aujourd’hui, assortie d’évaluations intermédiaires régulières à prévoir en amont par les commissions épidémiologie et biologie du Centre national de coordination du dépistage néonatal.
Une organisation qui devra garantir la mise en place du traitement dans les deux mois après la naissance
L’intérêt du dépistage à la naissance est conditionné par la rapidité de la prise charge de l’enfant avant la survenue d’infections. Le délai optimal établi à partir des différents programmes étrangers est de parvenir à greffer l’enfant avant deux mois de vie si l’on veut prévenir le risque de survenue d’infections graves, en particulier celles à cytomégalovirus.
La HAS considère ainsi que ce dépistage ne pourra être mis en place, même sous forme conditionnelle, que si toutes les étapes menant à la greffe de cellules souches hématopoïétiques, traitement de référence, peuvent permettre sa réalisation dans les deux mois après la naissance.
Dans cet objectif, la prise en charge médicale doit débuter dans les 30 jours maximum après la naissance. La HAS recommande donc en premier lieu aux maternités de transmettre quotidiennement les papiers buvards contenant les prélèvements sanguins aux Centres régionaux de dépistage néonatal (CRDN). Elle recommande également que le résultat du test de quantification des TRECs soit rendu dans un délai maximum de 9 jours après la naissance de l’enfant, 15 jours si un second buvard est nécessaire. Et ce afin que le diagnostic puisse être rendu dans un délai maximum de 15 jours de vie et de 30 jours maximum en cas de nécessité d’un second buvard.
La HAS souligne que le respect strict des délais de chacune des étapes dans la séquence complète du dépistage à la greffe est indispensable.
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