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L’accroissement alarmant des actions revendicatives des infirmières est un symptôme de la crise mondiale des systèmes de santé, pointe le CII (Communiqué)

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D’après le Conseil International des Infirmières (CII), l’augmentation alarmante du nombre d’infirmières faisant grève à travers le monde renvoie directement à l’incapacité des gouvernements à s’attaquer aux causes profondes de la fragilité, de l’affaiblissement grave et, dans certains cas, de l’effondrement de nos systèmes de santé. Partout dans le monde, le CII a relevé nombre d’exemples d’infirmières engagées dans des actions revendicatives sur une série de questions fondamentales, dont la sûreté, la sécurité et la protection, qui toutes menacent le personnel de santé et les patients.

L’une des causes fondamentales est la pénurie mondiale d’infirmières, qui crée une pression insoutenable sur les infirmières travaillant actuellement au sein de systèmes de soins de santé perturbés par les pénuries de personnel, la pandémie de COVID-19 et un sous-financement chronique et de longue date. Ces pénuries déjà observées ont entraîné une hausse inquiétante des conflits sociaux et des grèves – à titre d’exemple, un rapport de l’ILR Worker Institute de l’Université Cornell montre qu’en 2021, la moitié des grèves aux États-Unis concernait les agents des établissements de soins de santé, et ce samedi 18 juin, il y aura une manifestation nationale des infirmières en Espagne. Parmi d’autres exemples, le CII attire le regard sur des actions d’infirmières en Europe, dans les Amériques et en Afrique.

Pamela Cipriano, la Présidente du CII, a déclaré : « L’action revendicative des infirmières constitue toujours un dernier recours, mais il n’est pas surprenant que cela se produise, étant donné l’état des systèmes de santé où elles exercent ; ils ne leur permettent pas de dispenser les soins de qualité qu’elles souhaitent. Cela s’explique par la pression à laquelle elles sont soumises, au manque de considération et de reconnaissance dont elles font l’objet, aux inégalités historiques liées au sexe, ainsi qu’aux mauvaises conditions de rémunération et de travail. »

« Ces deux dernières années ont montré aux yeux du monde à quel point les soins infirmiers sont importants pour notre santé et notre bien-être socioéconomique, mais les enseignements tirés sont ignorés par les personnes qui sont en mesure de changer l’état de leur système de santé, la qualité des soins aux patients et la vie des infirmières partout dans le monde. »

Avant une réunion avec Abdulla Shahid, le Président de l’Assemblée générale des Nations Unies, au Palais des Nations à Genève, Howard Catton, le Directeur général du CII, a déclaré :

« Le CII tient grief aux gouvernements de ne pas s’attaquer aux racines du malaise dans nos systèmes de santé, qui sont fragiles, sérieusement affaiblis et, dans certains cas, au bord de l’effondrement. Plutôt que de colmater les brèches, ils doivent traiter les problèmes fondamentaux de l’inégalité et du financement largement insuffisant ayant conduit à l’absence de rémunération juste, à des pénuries et à des risques accrus pour la sécurité des patients. »

Dans sa déclaration à M. Shahid, M. Catton a révélé que :

« Le CII estime que la pénurie de personnel constitue actuellement la plus grande menace pour la santé mondiale. Avec une pénurie mondiale de six millions d’infirmières et de 18 millions d’agents de santé antérieure à la pandémie, nous constatons aujourd’hui une augmentation des taux de roulement et de démission risquant fort d’accentuer ces chiffres. Ce n’est pas anodin car il n’y a pas de soins de santé sans personnels de santé. »

« La pandémie a amplement démontré que notre santé et notre bien-être économique sont intimement liés. Les dépenses de santé ne sont pas un coût, mais un investissement en or massif ayant de très fortes retombées. Si nous ne faisons pas les investissements requis pour développer et renforcer nos effectifs de santé dans le monde, nous continuerons de souffrir sur le plan économique, et l’accès à des soins de santé de qualité pour tous ne sera qu’un vœu pieux. » Cliquez ici pour lire la déclaration complète.

Grève des infirmières en Espagne

Ce samedi 18 juin, des milliers d’infirmières manifesteront à Madrid (Espagne) pour exiger des améliorations urgentes du système de santé espagnol et des conditions de travail des professionnels qui y exercent. Elles dénonceront également l’apathie et le désintérêt des autorités publiques et politiques. La manifestation, convoquée par Unidad Enfermera, attirera l’attention sur les risques que l’on fait peser sur les patients à cause du manque de sécurité dans les soins de santé lié au nombre insuffisant d’infirmières.

Les infirmières espagnoles dénonceront également le grave problème des agressions, tant physiques que verbales, dont elles sont victimes au quotidien en Espagne, et exigeront des cadres de travail sûrs protégeant leur intégrité physique, psychologique et psychique.

Démissions en masse en Finlande

En parallèle, les infirmières en Finlande se préparent à une action encore plus déterminée après un long conflit avec les employeurs sur les salaires et les conditions de travail, et à cause d’une nouvelle législation du Gouvernement finlandais qui rendrait illégale l’action revendicative des infirmières.

Les syndicats Tehy et SuPer en Finlande ont organisé une grève en avril pour des salaires et des conditions de travail décents. Cliquez ici pour en savoir plus. Une deuxième grève de deux semaines, prévue en avril, a été annulée en raison de la menace d’une nouvelle loi, dont le processus d’adoption par le Parlement finlandais est suspendu.

Aujourd’hui, au lieu de programmer de nouvelles grèves, les syndicats finlandais des soins infirmiers prévoient des démissions en masse, peut-être plus tard en automne, si des solutions négociées et acceptables ne sont pas trouvées avant, afin de montrer la force de leurs convictions et leur détermination à ne pas laisser la situation actuelle perdurer.

Les deux syndicats d’infirmières affirment que si la nouvelle loi sur la sécurité des patients est adoptée, les infirmières en grève pourraient se voir ordonner de reprendre le travail au motif de garantir la sécurité des patients.

Les employeurs ont déclaré que les syndicats n’ont pas assuré des niveaux sûrs de dotation en personnel lors des précédents conflits, qualifiant leur projet de démissions en masse de « totalement irresponsable ». Les syndicats rejettent cette affirmation et déclarent que durant la grève, les niveaux de dotation en personnel étaient, dans certaines unités, meilleurs qu’en temps normal. Ils affirment que la sécurité des patients est menacée au quotidien par le manque actuel d’infirmières et c’est cela qui devrait être la principale préoccupation des politiciens et des employeurs, et non les grèves légales.

Anna Suutarla, la Responsable des questions internationales à l’Association finlandaise des infirmières (AFI), a déclaré au CII que certaines infirmières ont déjà démissionné, nombre d’entre elles demandant même que leur nom soit retiré du registre finlandais des infirmières. Des salles et des services ont été fermés par manque d’infirmières. Elle a déclaré que l’AFI soutient l’action revendicative de Tehy et de SuPer et fait pression pour que des solutions soient trouvées, sur la base des conclusions du rapport du CII Pérenniser et fidéliser les effectifs et des Orientations stratégiques mondiales pour les soins infirmiers et obstétricaux 2021-2025 de l’Organisation mondiale de la Santé, auxquelles le CII a largement participé.

Nina Hahtela, la Présidente de l’AFI, a ajouté : « Le manque d’infirmières a atteint le seuil critique et nous devons agir sans délai. L’action revendicative n’est pas une fin en soi, mais elle est nécessaire si l’on ne règle pas la situation autrement. Cela ne peut pas continuer, les salaires et les conditions de travail doivent être revus de toute urgence. »

Autres nouvelles sur l’action revendicative

Au Danemark, les infirmières alertent depuis des années sur le fait que les salaires et les conditions de travail ne reflètent pas leurs compétences, leurs tâches et leurs responsabilités. L’année dernière, l’Association danoise des infirmières (ADI) a demandé à ses membres de se prononcer et les infirmières ont voté pour la grève afin de faire pression sur les employeurs pour augmenter les salaires. La grève a duré 70 jours – la plus longue de l’histoire du Danemark – mais le gouvernement a imposé un accord salarial, rejeté par les infirmières.

Aujourd’hui, près de 10 % des postes d’infirmières (5 000) sont vacants et le pays connaît une grave pénurie de personnel. Il y a moins de jeunes que par le passé et moins de candidats à la formation infirmière. L’ADI a publié un document formulant 12 recommandations à l’intention du gouvernement et des employeurs pour résoudre ce problème. Grete Christensen, la Présidente de l’ADI, a déclaré au CII : « Il est urgent de rendre le travail d’infirmière plus attractif, et les infirmières l’ont dit et répété, il faut avant tout de meilleurs salaires et de meilleures conditions de travail. »

Le 7 juin, les agents de santé en Franceont fait une grève d’un jour pour protester contre des revendications non satisfaites réclamant le recrutement de personnels, de meilleurs salaires et de remédier à la pénurie. En Rhénanie-du-Nord-Westphalie, en Allemagne, les infirmières des cliniques universitaires manifestent à cause de conditions de travail inacceptables. Aux États-Unis, les infirmières de plusieurs hôpitaux de l’Oregon, de Californie et du Minnesota ont fait grève pour obtenir de meilleurs salaires et une augmentation des effectifs.

Le CII a récemment transmis une déclaration de solidarité à ses deux associations membres au Mexique, le Colegio Nacional de Enfermeras, A.C. et la Federación Mexicana de Colegios de Enfermería, AC, au sujet des récentes grèves dans l’État du Chiapas.

En Nouvelle-Zélande, les infirmières se sont prononcées contre une offre historique d’égalité salariale de l’Employment Relations Authority, car elles craignent que la proposition actuelle n’intègre pas le versement rétroactif de leur pleine rémunération. L’Association néozélandaise des infirmières a déclaré que bien que les infirmières ne se mettront pas en grève, le personnel continuera de se sentir négligé tant que la question ne sera pas réglée.

En Ouganda, les infirmières ont récemment suspendu leur mouvement de grève. Justus Kiplangat Cherop, le Président de l’Ugandan Union of Nurses and Midwives (UNMU), a expliqué qu’après avoir reçu une lettre du Ministre du service publique assurant que la hausse des salaires des infirmières et des sages-femmes sera intégrée au budget, ils ont décidé de suspendre leur action revendicative. Il a néanmoins ajouté que « parfois, le gouvernement fait des promesses qu’il ne tient pas. » L’UNMU va à présent analyser le budget devant entrer en vigueur le 1er juillet pour savoir si leur augmentation de salaire y figure.

La prise de position du CII de 2011 relative à l’action revendicative indique que le « CII estime que les infirmières ont droit à une rémunération juste ainsi qu’à des conditions de travail décentes et sûres. En tant qu’employées, les infirmières ont le droit de se syndiquer, de négocier collectivement et d’entreprendre des actions revendicatives. On considère que faire grève constitue la mesure de dernier recours et que cette décision ne doit être prise qu’après que tous les autres moyens possibles de parvenir à un accord ont été explorés et utilisés. »

* * *

Note : le Conseil International des Infirmières (CII) est une fédération de plus de 130 associations nationales d’infirmières, représentant les millions d’infirmières et d’infirmiers dans le monde. Géré par des infirmières et à l’avant-garde de la profession au niveau international, le CII œuvre pour des soins de qualité pour tous et pour des politiques de santé solides, partout dans le monde.

Pour de plus amples informations, veuillez contacter Gyorgy Madarasz, attaché de presse, madarasz@icn.ch

www.icn.ch

 

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