Santé Publique France a publié, sur son site, le BEH n°18. Il est composé de deux articles.
Résumé du contenu :
- Traumatologie routière pendant la première période de confinement pour cause de pandémie de covid-19 – registre du Rhône, Bernard Laumon, Univ Gustave-Eiffel, Lyon
La pandémie de Covid-19 a contraint la France à un confinement strict du 17 mars au 10 mai 2020. Les accidents de la route et la mortalité routière ont alors fortement diminué, mais que dire des blessés et de la gravité de leurs atteintes ? L’objectif est d’évaluer l’impact du confinement sur la morbidité routière.
Les données sont issues du Registre des victimes corporelles d’accidents de la circulation routière dans le département du Rhône. Les principales caractéristiques de l’accident, de la victime et de la gravité des blessures lors de la période de confinement sont comparées à la même période l’année précédente. Cependant, pour éviter de prêter au confinement des effets liés à d’autres sources de variation de l’accidentalité, la même analyse est réalisée sur la période précédant le confinement. Toutes les périodes sont choisies de la même durée que le confinement lui-même. Les analyses sont descriptives et univariées.
Cette période de confinement est associée à une baisse de 75% du nombre de victimes (386 vs 1 537 l’année précédente). On observe aussi une plus grande proportion de victimes cyclistes et une moindre proportion de victimes automobilistes (au point d’être équilibrés en nombre), plus d’accidents sans antagoniste, une augmentation du ratio hommes/femmes, un excès relatif des moins de 14 ans et un déficit relatif des 15-24 ans, une moindre part des victimes peu gravement blessées (et plus de victimes modérément blessées), et une moindre proportion de victimes présentant une atteinte du rachis cervical.
La moindre part d’automobilistes accidentés pendant le confinement explique la part plus faible d’accidents avec antagoniste. Ces deux phénomènes combinés expliquent le nombre moindre de victimes dans un même accident et la part plus faible des atteintes du rachis cervical. L’augmentation du ratio hommes/femmes concerne essentiellement les 25-44 ans. On peut y voir le reflet d’une gestion différenciée des contraintes imposées (domestiques et autres). L’excès relatif de victimes de moins de 14 ans est lié à l’augmentation de la pratique du vélo par des enfants encore inexpérimentés, particulièrement des filles. Le déficit relatif de victimes de 15-24 ans est lié à un moindre usage du vélo et de la trottinette. Enfin, la diminution de la part des blessés les plus légèrement atteints pourrait être expliquée par un moindre recours au réseau de soins pendant le confinement. Cette baisse ne contribue cependant que marginalement à la chute spectaculaire de l’accidentalité au cours de cette période. Ainsi, au-delà d’une réduction importante de l’accidentalité routière, ce confinement strict a révélé des caractéristiques d’accidents et de victimes qui suggèrent, globalement, une évolution des déplacements vers plus de modes doux. Cette évolution, et son accidentalité spécifique, devront être évaluées à plus long terme.
- Etude pré’violence : prévalence des violences déclarées par les femmes majeures ayant consulté dans les centres municipaux de santé des Hauts-de-Seine et de Seine-Saint-Denis entre le 7 décembre 2020 et le 28 janvier 2021, Justine Lebouc et coll., Formations sanitaires de Tahiti Nui, Papeete
Les violences faites aux femmes ont un impact majeur sur la santé, mais restent difficiles à évaluer dans leur ensemble. L’étude Pré’Violence s’intéresse aux femmes consultant dans les centres municipaux de santé (CMS), dont la population présente une précarité plus grande et un état de santé moins bon que les patients des cabinets libéraux. L’objectif était d’estimer la prévalence des violences dans cette population, quel que soit le type de violence.
L’étude a eu lieu dans 10 CMS des Hauts-de-Seine et de Seine-Saint-Denis entre le 7 décembre 2020 et le 28 janvier 2021. Un auto-questionnaire anonyme était distribué durant une semaine par les secrétaires, à toutes les femmes majeures qui venaient consulter, quel que soit le motif ou le professionnel de santé. Le questionnaire interrogeait sur les violences dans l’année, en détaillant les différents types, et au cours de la vie, tous types de violence confondus.
Parmi les 3 457 femmes ayant consulté durant l’étude, 375 femmes (10,8%) ont répondu. La prévalence des violences était de 52% au cours de la vie, et de 37% dans l’année passée. Parmi les violences dans l’année : 73% des femmes ont connu des violences verbales ; 46%, sexuelles ; et 41%, physiques. Ce sont 51% des femmes qui ont connu plusieurs types de violences à la fois. Seules 32% des femmes en avaient déjà parlé avec un professionnel de santé alors que 58% étaient favorables à ce que la question leur soit posée.
Cette étude permet d’estimer pour la première fois la prévalence des violences parmi les femmes consultant dans les CMS des Hauts-de-Seine et de Seine-Saint-Denis. Les résultats de l’étude sont limités par l’utilisation d’un auto-questionnaire, en l’absence d’un outil standardisé et validé pour le dépistage des violences. Une des difficultés était d’interroger les femmes sur les violences, dans une société marquée par la culture du viol et les stéréotypes. Toutefois, les résultats montrent que les femmes concernées sont en faveur du repérage et incitent à concevoir un questionnaire standardisé, dépistant tous les types de violences.