Alors que le gouvernement s’obstine à appliquer dès la rentrée une quatrième année de médecine générale précipitée et mal préparée, nous, internes en médecine, refusons de servir de variable d’ajustement. Cette réforme bâclée, menée sans gouvernement stable depuis deux ans, va à l’encontre de la volonté des internes et contre l’amélioration de l’accès au soin.
Déguiser une politique d’aménagement du territoire en réforme de formation bâclée est une hypocrisie à la fois pour les internes et pour les patients.
Cette année se veut pré-professionnalisante — une transition encadrée entre l’internat et l’installation dans les territoires. Mais par défaut d’anticipation, elle se transforme en une année de service hospitalier déguisé : faute de maîtres de stage universitaires (MSU) en nombre suffisant, les internes seront massivement renvoyés vers les hôpitaux, au détriment de l’apprentissage du soin de premier recours.
Comment parler de cohérence pédagogique quand la majorité des internes (83%) se destinent à un exercice libéral ou mixte, et que la réforme les enferme dans des postes salariés imposés, loin du terrain qu’ils doivent pourtant apprendre à connaître ?
Nous ne pouvons pas, une fois de plus, sacrifier la qualité de notre formation au nom de la cohérence politique. Ce n’est pas en transformant les internes en rustines budgétaires que l’on rendra la médecine générale plus attractive. Ce n’est pas en ajoutant une année mal construite qu’on redonnera du sens à un métier déjà fragilisé par la perte d’autonomie et la surcharge administrative.
Si cette dixième année doit avoir lieu, elle doit être réellement formatrice, encadrée, préparée — une réforme qui ne confonde pas apprentissage et solution palliative au manque de médecins.
Reporter la réforme d’un an ne transformera pas radicalement l’état déjà alarmant de l’accès aux soins en France. Mais cette année de plus permettra d’éviter une catastrophe sanitaire annoncée : celle d’une désertification encore plus massive de la médecine des territoires.
Madame la Ministre, cette réforme porte déjà les marques évidentes de son échec. Ne laissez pas une génération d’internes en payer le prix, car ce sont les patients qui paieront le véritable tribut d’un système mal préparé.
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