Financement de la sécurité sociale : face à un projet attentiste, la commission des affaires sociales du Sénat engage des réformes structurelles
Réunie le 5 novembre 2014 sous la présidence d’Alain Milon (UMP – Vaucluse), la commission des affaires sociales du Sénat a examiné le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015.
Par la voix de son rapporteur général, Jean-Marie Vanlerenberghe (UDI-UC – Pas-de-Calais), la commission a constaté que la politique menée depuis 2012 en matière de comptes sociaux s’était traduite par :
– 30 milliards de prélèvements obligatoires supplémentaires ;
– une absence de réformes structurelles sur les dépenses et des décisions coûteuses (départ anticipé en retraite) ;
– la persistance de déficits élevés, réduits de moins de 4 milliards d’euros.
La commission a marqué son désaccord avec les équilibres financiers pour 2015 tels qu’ils résultent du PLFSS adopté par l’Assemblée nationale, qui comporte à ses yeux trois faiblesses majeures :
– une évaluation des recettes optimiste au regard de l’atonie de la croissance ;
– le recours à des ressources en partie non pérennes, 1,5 milliard sur 6,3 milliards, pour compenser les allègements de cotisations ;
– un effort d’économies insuffisant dont le chiffrage est approximatif (1,8 milliard au moins manquent à l’appel), et qui repose sur certains choix contestables, notamment en matière de politique familiale.
Ce PLFSS se borne à attendre du redémarrage de la croissance le redressement des comptes sociaux.
C’est pourquoi la commission, après avoir, en recettes, aligné la fiscalité du tabac à rouler sur celle des cigarettes et adopté une mesure de soutien à l’emploi déclaré à domicile, a souhaité imprimer des inflexions marquant plus fermement la nécessité d’agir sur les dépenses.
S’agissant de l’assurance maladie, Jean-Marie Vanlerenberghe a déploré que le Gouvernement se satisfasse d’un déficit qui sera de nouveau proche de 7 milliards en 2015, pour le seul régime général. Sur sa proposition, la commission a approuvé une série d’amendements et d’orientations qui permettront de réaliser une économie d’un milliard d’euros sur l’Ondam. Cet effort supplémentaire résulte : d’une action plus résolue pour garantir la pertinence des actes tant à l’hôpital qu’en ville ; des mesures renforçant les conditions d’évaluation des médicaments; de la réforme de la tarification des urgences hospitalières ; de la mise en place d’un jour de carence pour les personnels hospitaliers ; de la renégociation des accords relatifs au temps de travail au sein des établissements.
La commission a prévu une réforme du mode d’évaluation du caractère remboursable des médicaments. A compter du 1er janvier 2016, la Haute Autorité de santé évaluera l’intérêt thérapeutique relatif (ITR) des médicaments qui sera mieux à même de prendre en compte le caractère innovant d’un produit. Dès le 1er janvier 2015, seules seront remboursées les indications pour lesquelles les industriels auront fourni des études comparatives garantissant le plus haut niveau de preuve scientifique de l’intérêt thérapeutique.
Par ailleurs, la commission a créé une procédure d’achat groupé pour les vaccins utilisés par l’ensemble des structures publiques de vaccination. Cette évolution permettra d’ouvrir un égal accès à la vaccination sur l’ensemble du territoire tout en réduisant sensiblement les coûts d’achat.
Dans le secteur médico-social (rapporteur : René-Paul Savary, UMP, Marne), elle a préconisé un « choc de simplification » portant sur les financements, la coordination entre les différents acteurs et la gouvernance. Elle a également adopté des amendements tendant à préserver les ressources propres de la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie et la mise en œuvre d’un plan pluriannuel d’investissement sur la période 2015-2017.
S’agissant de l’assurance vieillesse, le rapporteur, Gérard Roche (UDI-UC – Haute-Loire), a rappelé que dans un contexte dégradé, le Gouvernement avait procédé en 2012 à un élargissement du dispositif de retraite anticipée pour carrière longue qui représentera pour le seul régime général un surcoût de 838 millions en 2015. Il a également souligné le faux-semblant que constitue le redressement temporaire des comptes de la caisse nationale d’assurance vieillesse dans la mesure où le Fonds de solidarité vieillesse est maintenu dans une situation de déficit structurel. Sur sa proposition, la commission a adopté un amendement poursuivant le mouvement de relèvement progressif de l’âge légal de départ en retraite pour le porter à 64 ans en 2024.
Dans le domaine des accidents du travail et des maladies professionnelles, le rapporteur, Gérard Dériot (UMP – Allier), s’est inquiété du niveau sans précédent du versement à l’assurance maladie au titre des sous-déclarations et a déploré le désengagement de l’Etat du financement du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante.
Caroline Cayeux (UMP – Oise), rapporteur, a dénoncé la gestion empirique et comptable de la branche famille, avec une réforme du congé parental guidée par le recherche d’économies et, surtout, l’introduction par voie d’amendement de la modulation des allocations familiales pourtant écartée l’an passé au profit d’une nouvelle réduction du plafond du quotient familial. Elle a estimé que sa réintroduction rompait un engagement pris sur la seule prestation familiale hors condition de ressources. Cette remise en cause du principe d’universalité porte en germe une fragilisation de la politique familiale. La commission, sur sa proposition, a adopté un amendement visant à supprimer l’article 61 A introduit par l’Assemblée nationale.
Au total, la commission a adopté 55 amendements. Le Sénat examinera le projet de loi en séance publique à compter du lundi 10 novembre.
Contact presse : Juliette Elie – 01 42 34 25 03 – presse@senat.fr
Le rapport et les amendements seront prochainement disponibles en ligne dans le dossier législatif :
http://www.senat.fr/dossier-legislatif/plfss2015.html