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Loi de santé : MG France publie une Lettre ouverte aux parlementaires (Communiqué)

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 « Notre système de santé traverse une période difficile, liée pour une grande part aux déficits conjoncturels et structurels de l’assurance maladie.
Au moment où démarre l’examen devant l’assemblée du projet de loi de santé, MG France souhaite vous exposer ici ses commentaires critiques et ses propositions.
38% de la dépense de santé est imputée en France aux dépenses d’hospitalisation, contre 31% en moyenne pour l’OCDE et 29% en Allemagne. Pour MG France, il n’y a pas de bon usage de l’hôpital sans un niveau de soins primaires organisés autour du médecin traitant, s’articulant avec un niveau de soins secondaires de médecins correspondants apportant leur avis de consultants et d’experts.
Ces deux niveaux de soins répondent à la majorité des demandes de soins de la population et permettent d’éviter les recours inutiles ou abusifs à l’hôpital.
Pour optimiser notre système de santé, il faut en priorité donner des moyens aux soins primaires. Les pays qui ont accompli leur « virage ambulatoire » ont investi de manière délibérée sur les soins primaires. La loi de santé devrait être l’occasion d’agir en ce sens :
  • en décidant qu’une part de l’ONDAM sera consacrée à l’investissement sur l’organisation des soins primaires.
  • en créant au ministère des affaires sociales une direction des soins primaires au même niveau de responsabilité que l’actuelle DGOS, qui reste trop centrée sur l’hôpital.
Tiers payant 
Les problèmes liés au tiers-payant ne résident pas dans la « déresponsabilisation des patients ». Si le tiers-payant, déjà régulièrement pratiqué par les professionnels[1], contribuait à augmenter les dépenses de santé, il faudrait alors en interdire la pratique en toute circonstance.
La généralisation du tiers-payant pose de nombreuses vraies questions non résolues :
  • « C’est simple, la preuve les pharmaciens le font ». Les pharmaciens mobilisent une personne au comptoir pour vérifier carte vitale, carte de mutuelle et ouverture des droits, puis pour envoyer une demande de règlement à un serveur qu’ils ont financé. Celui-ci adresse une part au régime complémentaire (RC) et une autre part au régime obligatoire (RO), puis récupère les paiements, les agrège et renvoie le tout au pharmacien. Malgré cette architecture complexe les erreurs et les impayés sont nombreux et nécessitent un secrétariat pour tenter de récupérer les sommes dues. Pour les médecins généralistes qui ne disposent pas de personnel, c’est impossible et infaisable
  • Il inquiète légitimement ceux qui le pratiquent déjà au quotidien, à cause de la grande complexité de l’assurance maladie française. Plus de vingt régimes obligatoires différents sont gérés par plus de 80 opérateurs, alors qu’il existe plus de 500 régimes complémentaires. Une vraie réforme consisterait à unifier les régimes d’assurance maladie obligatoire, et à questionner la pertinence d’un ticket modérateur qui ne modère rien et complique la vie de nos concitoyens au point que l’on invente tous les dix ans un dispositif pour en corriger les dégâts sociaux. L’exonération du ticket modérateur chez le médecin traitant serait une vraie réforme structurelle pour la population qui induirait une économie de gestion considérable
  • La simplification promise par la ministre reste à faire. Les engagements de simplification des trois familles d’assurances complémentaires (mutualité, instituts de prévoyance, assurances) ne débouchent pas sur une solution technique consensuelle et acceptable par les professionnels : pas de flux unique de facturation, droits en carte(s) ou pas, vérification des droits en ligne…
  • Qui va gérer la garantie de paiement proposée et calculer les pénalités de retard ?
  • Le dispositif technique proposé, qui oblige à quatre vérifications préalables (carte vitale, carte mutuelle, notion d’un médecin traitant, autorisation de prélèvement des franchises) avant d’accepter ou de refuser le tiers payant n’est ni réaliste ni réalisable. Le flux unique de paiement annoncé ne signifie pas un flux unique lors de l’envoi qui est une complexité supplémentaire.
  • Les médecins ne veulent pas faire la vérification préalable des droits.  Celle-ci ajouterait une cinquième condition au tiers-payant qui deviendrait donc une possibilité non systématique et pas un droit, alors que la population, trompée par le message politique de « généralisation » arrivera dans nos cabinets sans moyen de paiement.
  • L’obligation de fait inscrite dans le projet de loi est une mesure inutile qui nourrit des soupçons et des inquiétudes. La garantie proposée par la loi vient en réponse à l’infaisabilité technique actuelle et rend toute obligation de fait dangereuse pour nos cabinets.
Soins primaires
MG France demande des modifications du projet de loi pour qu’il devienne un outil opérationnel pour la construction d’un étage territorial de soins primaires. Son article 12 doit créer des Communautés territoriales « de soins primaires », et non « de santé », car il est très important de donner une visibilité et donc une légitimité aux organisations territoriales des professionnels des soins primaires.
Cette communauté territoriale de soins primaires se constitue à l’initiative des professionnels, est accompagnée et non dirigée par les ARS. Son organisation de déploie progressivement en fonction des besoins locaux à partir des ressources humaines et financières existantes. Les communautés territoriales professionnelles de soins primaires ont vocation à cogérer les outils collectifs que sont les coordinations territoriales d’appui et réseaux spécialisés d’appui, en partenariat avec les autres acteurs du territoire (établissements de soins, équipes de soins spécialisés secondaires, secteur médico-social).
Prévention
La loi doit confier aux professionnels de soins primaires, sous la responsabilité du médecin traitant, la mise en œuvre de la prévention, du dépistage et de l’éducation à la santé.
Formation continue des médecins généralistes.
Cette formation doit être spécifique car la palette des compétences à entretenir est très large pour la spécialité de médecine générale. La loi HPST qui a étatisé sa gestion politique avec un résultat opérationnel et qualitatif désastreux doit être corrigée. La gestion doit revenir aux professionnels et être organisée paritairement avec les pouvoirs publics. Pour les généralistes en secteur 1 à 94%, la formation continue est depuis 1991 un droit conventionnel. La loi HPST a fait disparaître ce droit. Il doit être rétabli pour les médecins du secteur 1.
MG France rappelle sa détermination à contribuer aux réformes nécessaires.
La réforme des soins primaires est essentielle et doit être abordée et traitée avec la même force et la même volonté que la réforme de 1958 qui a créé notre système hospitalo-universitaire. Notre système de santé doit être rééquilibré. La loi d’organisation du système de santé doit promouvoir les soins primaires sur chaque territoire autour du médecin généraliste traitant.
Dans ce but, la médecine générale doit bénéficier de moyens pour remplir ses missions. Ce n’est pas le cas aujourd’hui. La médecine générale doit être confortée dans son rôle et dans ses missions et soulagée du travail administratif qui l’étouffe. La maltraitance institutionnelle, conventionnelle et tarifaire que subissent les médecins généralistes est insupportable. Il en résulte une chute de la densité de notre profession qui devient visible dans nombre des circonscriptions de notre pays.
Le virage ambulatoire est une nécessité pour notre système de santé. La médecine générale et les soins primaires articulés avec les soins spécialisés secondaire de ville sont au cœur de la réorganisation attendue. Ces réformes demandent de la clairvoyance et de la volonté. Il en va de l’intérêt de tous. Notre profession a besoin de reconnaissance et de moyens pour remplir ses missions. Cette loi doit les lui donner.
Je vous prie de croire, Mesdames, Messieurs les parlementaires, à l’expression de mes salutations distinguées ».
[1]  Pratique du tiers-payant : médecin traitant 37%, pharmacien 100%, médecin correspondant : 9% chez le dermatologue, 92% en radiologie – radiothérapie, 62% en cardiologie, 77% en gastro-entérologie, 82% en chirurgie, 98% pour la biologie.

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