Par son allocution du 12 juillet, le Président de la République, omnipotent et omniscient, a fait connaître aux Français les décisions prises dans le secret d’un conseil scientifique désigné par lui, mais a aussi justifié et vanté sa politique présente et à venir dans la moitié de son intervention.
Tout d’abord en matière de santé et de lutte contre la pandémie de COVID 19, ses paroles expriment une large part d’autosatisfaction en faisant état de « la maîtrise de l’épidémie », de la « réouverture progressive et réussie », d’un « plan de vaccination inédit », ou quand est mis en avant que « la France a largement préservé l’instruction » et « a fait le maximum pour l’avenir de nos enfants et de notre jeunesse ». Non seulement tout cela est plus que discutable, mais c’est aussi oublier bien vite les pénuries de masques, de vaccins et de tests au début de la pandémie, c’est oublier les valses-hésitations et les décisions contradictoires et c’est enfin avoir ignoré les avis d’épidémiologistes qui estiment que l’allègement récent des mesures-barrières était prématuré (on l’a vu récemment dans les Landes, on le voit aujourd’hui dans les Pyrénées-Orientales, sans parler de la Réunion ou de la Martinique!).
Le président affirme avoir recherché un équilibre entre la protection et la liberté. Mais dans la pratique, il a en fait géré un équilibre entre les raisons économiques d’une part et les soins médicaux et la lutte contre la pandémie d’autre part, en penchant essentiellement du côté de l’économie.
Certes, il est indiscutable que « plus nous vaccinerons, moins nous laisserons d’espace au virus pour se diffuser, plus nous éviterons les hospitalisations. Et plus nous éviterons d’autres mutations du virus plus dangereuses encore ». Mais nous ne pouvons accepter l’obligation de vaccination pour les seuls personnels soignants, sans attendre et sous menace de sanction, alors que le président a annoncé à la fin de l’année dernière que le vaccin ne serait pas obligatoire. Nous nous élevons contre sa politique méprisante envers les personnels soignants.
Après avoir brièvement salué «leur engagement exceptionnel», il leur fait ensuite la morale en en appelant « au sens du devoir », avant d’évoquer des sanctions pour les désobéissants. Mais toujours aucune réponse aux revendications des soignants exprimées depuis plus de deux ans, rien sur la création de postes et sur l’attribution de moyens supplémentaires, aucune parole sur l’épuisement des soignants maintenant menacés de sanctions (ce qui ne peut qu’augmenter les départs de personnels excédés), aucun mot de la situation catastrophique des hôpitaux où continuent les suppressions de postes, les fermetures de lits par restructuration ou manque de personnels et les fermetures de services, notamment les services de SMUR fortement affectés cette année.
C’est cette situation des hôpitaux et du système de santé, qui, au moins partiellement, rend nécessaire les mesures-barrières contre le coronavirus, de plus en plus mal supportées par la population. Et puis les sanctions prévues -ne plus pouvoir exercer et ne plus plus être payé- sont exorbitantes et insultantes, dans la mesure où elles ne respectent pas les soignants en tant que personnes et en tant que salariés, tout en refusant de se remettre en cause.
Le président a beau affirmé que « la science nous offre les moyens de nous protéger », la France n’a pas mis au point de vaccin et n’en produit pas et la patrie de Pasteur, une des grandes puissances mondiales, est obligé d’importer des vaccins, sans que que l’on en connaisse leur prix (payés par l’Union européenne) et les conditions de leur importation. Il est fait état de 9 millions de doses pour poursuivre les vaccinations, mais il en faudra sans doute bien davantage. Non seulement il y a un manque de tests, mais ils vont être rendus payants, ce qui est inacceptable et contradictoire avec une politique de prévention.
Une campagne de rappel est évoquée pour les personnes déjà vaccinées ; cette nécessité est discutée et est affirmée quelque peu rapidement. Et la campagne de vaccination reste très largement confiée à des sociétés et opérateurs privés, ce qui est une forme supplémentaire de marchandisation de la santé.
Le président parle ensuite de « vacciner le monde, de vacciner partout, pour en finir durablement avec la pandémie ». On ne peut qu’être d’accord avec ce but. Mais rien n’est dit sur la levée des droits sur les brevets pour produire des vaccins au moindre coût et l’enrichissement des sociétés pharmaceutiques n’est pas remis en cause. Il est prévu de « donner aux pays les plus pauvres davantage de vaccins » ; cette démarche apparaît plus comme une forme de charité, que marquée par une recherche d’équité et de solidarité dans la lutte contre la pandémie, qui doit se faire sur un plan international dans le cadre de l’OMS.
Pour la Coordination nationale des comités de défense des hôpitaux et maternités de proximité, les mesures annoncées ne sont pas à la hauteur des enjeux. C’est pourquoi nous demandons :
- Des moyens humains et matériels accrus pour les hôpitaux publics pour qu’ils puissent faire face efficacement à la pandémie, sans que soient différés des soins ou des opérations pour d’autres affections ;
- La réquisition des établissements privés pour participer à la lutte contre la pandémie ;
- L’organisation des vaccinations par le service public et dans le cadre de celui-ci pour un accès plus facile et pour qu’elles ne soient pas une source de profit pour des sociétés privées ou pour des praticiens libéraux ;
- Des moyens réels pour la mise au point d’un vaccin en France et pour le développement de sa production dans le pays, où n’est fait actuellement que du flaconnage;
- La publication du prix d’achat des vaccins aux société productrices et des conditions de passation des marchés, ainsi que leur composition exacte, afin de faire reculer les réticences d’une partie de la population;
- La levée des droits sur les brevets des vaccins, avec un rôle actif et réel de la France dans ce but, au niveau européen, comme au niveau mondial, la mise en commun des technologies et des connaissances, et le développement d’unités de production pour produire des vaccins en quantité suffisante (l’Inde, l’Afrique du Sud et d’autres peuvent le faire; Moderna l’a fait en 6 mois en Suisse) ;
- L’abandon des mesures autoritaires et répressives en matière de vaccination et l’abandon de l’obligation de vaccination pour une partie seulement de la population, ou pour une profession ou un groupe de professions déterminés.
Contact: cda12550@coordination-nationale.org