L’application des sanctions contre les dépassements de tarifs des intérimaires à l’hôpital (« loi Rist ») sera en application le 27 octobre 2021, entraînant la fuite des intérimaires vers d’autres modes de remplacement. Déjà, des établissements publics de santé annoncent des fermetures de services d’urgences, des déprogrammations opératoires : l’hôpital ne pourra supporter cette énième attaque. L’application de cette mesure brutale, sans préalable visant à augmenter réellement l’attractivité hospitalière, c’est l’abandon de la santé de la population !
L’intérim hospitalier, c’est le dada de notre ministre, depuis qu’il a rédigé, député, un rapport sur le sujet en 2013. Il est scandalisé par les rémunérations excessives demandées par certains intérimaires pour venir remplacer, dans des établissements peu attractifs pour des conditions géographiques ou d’équipements, à certaines dates compliquées de l’année etc. Nous aussi.
Il crie haut et fort que le Ségur est une réussite. Après le scandale du reclassement des praticiens hospitaliers, qui prive les praticiens « fidèles au poste » d’une bonification de 4 ans d’ancienneté, après une réforme – pourtant nécessaire – de la gouvernance d’une telle timidité que tout est fait pour que rien ne change, c’est maintenant la réforme du statut de praticien hospitalier qui est sur le point de sortir : elle n’a pour but que de libéraliser l’exercice en incitant les praticiens à aller à la clinique et à morceler leur activité sur plusieurs établissements. C’est le « beurre dans les épinards » de notre précédente ministre, c’est la mort du service public hospitalier. Notre ministre sait-il au fond de lui que le Ségur n’était pas à la hauteur de ses ambitions ? Nous, nous le savons, nous le vivons, les patients en souffrent.
Les mesures de plafonnement de l’intérim ne peuvent s’appliquer qu’après avoir restauré une attractivité hospitalière pour les praticiens. D’ailleurs, c’était le deal : faire en sorte que le taux de vacance de postes soit réduit drastiquement pour ensuite limiter les tarifs de l’intérim. Nous le répétons depuis des mois, nous l’avons encore répété lors d’une réunion en urgence le 1er octobre avec la DGOS : impréparation, absence d’étude d’impact… mais maintien du dispositif ! C’est maintenant le Premier Ministre lui-même qui est obligé d’intervenir pour arrêter le massacre organisé, dans l’intérêt de la population.
Rappelons tout de même que le gouvernement a payé des médecins à des tarifs dignes du mercenariat pour vacciner la population depuis début 2021. Que les praticiens hospitaliers ont été exclus de ces tarifs. Que des services d’urgence et d’anesthésie-réanimation ont eu des difficultés aiguës à recruter des intérimaires cet été. Silence radio du ministère. Que la permanence des soins des libéraux atteint ces tarifs – et que la mission IGAS sur la permanence des soins n’a pas auditionné les organisations syndicales des praticiens hospitaliers. Incompréhensible.
Ce 12 octobre 2021, notre président déclare que les Français ne travaillent pas assez. Les praticiens hospitaliers doivent jusqu’à 48 heures par semaine à leur établissement, et en font beaucoup plus. L’intensification du travail a conduit à augmenter de 30 % son activité en quelques années. En anesthésie-réanimation, nous avons en charge désormais de manière quasi systématique deux salles d’opérations, sans compter la salle de réveil et l’accueil des patients à opérer… La reconnaissance de notre travail est une urgence pour l’attractivité hospitalière !
Alors, que faut-il faire ? La réforme du statut de praticien hospitalier passe à côté des vraies préoccupations des praticiens. Les solutions existent !
- Bien sûr, il y a un problème de rémunération : une perte de 30 % de pouvoir d’achat en 30 ans, des écarts de rémunération du simple au triple (voire bien plus) entre une activité publique et l’activité libérale, une permanence des soins qui est valorisée à des tarifs inférieurs à ceux des personnels paramédicaux.
- Mais il y a aussi tout ce qui se vit à l’hôpital !
- La gouvernance, qui doit être démocratique, avec des responsables managériaux élus par leurs pairs, des projets de service construits en équipe, une CME décisionnaire et non consultative.
- Une stabilité des équipes pluriprofessionnelles, gage de qualité et sécurité des soins
- Une réflexion sur le temps de travail des praticiens hospitaliers : temps total de travail, décompte du temps de travail pendant la permanence des soins (24 h = 5 DJ !)… tous ces excès qui minent la vie personnelle des praticiens et détruit leur santé.
Ces solutions, le SNPHARE les porte depuis des années et les portera jusqu’à ce que le Ministère retrouve un vrai courage politique : c’est l’intérêt des patients et de ceux qui les soignent.
Contact : Anne Wernet – anwernet.snphar@gmail.com