Le 7 novembre 2013, le groupe de travail « Relations entre les acteurs se réunissait pour débattre autour de la question de « la place des Conférences de territoires dans la démocratie sanitaire ».
Alexandre Farnault, Responsable du Pôle Innovation et démocratie sanitaire à l’ARS d’Ile-de-France et membre de la Conférence de Territoire de Paris est venu nous livrer son éclairage à la fois en tant qu’acteur institutionnel et politique.
Ces échanges ont permis de mettre en avant le chemin déjà parcouru par la dynamique de la démocratie sanitaire mais aussi un certain nombre de freins et d’écueils qui empêchent les Conférences de territoires, et plus largement les instances de démocratie sanitaire, de trouver une vraie place dans la construction des politiques de santé.
Proposition 1 : Donner aux Conférences de territoire une vraie compétence décisionnelle pour impliquer davantage les acteurs
La Conférence de territoire, à l’instar de la Conférence Régionale de Santé et de l’Autonomie, est une instance à vocation strictement consultative. Que les avis sollicités par les tutelles soient obligatoires ou non, leur portée est toujours limitée et fait l’objet d’une adaptation et d’une réinterprétation par ses destinataires.
Pour impliquer les acteurs dans ces instances, notamment les élus, il est important que chacun ait conscience de l’utilité du rôle joué par les Conférences de territoire. Pour ce faire, il faut donner une compétence décisionnelle aux Conférences de territoires, même sur une partie seulement de leurs attributions. De la même manière les institutions qui reçoivent les avis devraient être tenus d’y répondre et la synthèse des débats tenus dans les Conférences de territoires devraient être rendus publics sur le site de l’ARS exprimant simplement quelques recommandations sur le ou les sujet(s) débattus lors de la conférence de territoire.
Proposition 2 : Diversifier les acteurs représentés au sein des instances de démocratie sanitaire
Les Conférences de territoires ont eu le mérite de permettre à des acteurs qui ne se connaissaient pas et ne travaillaient pas ensemble d’apprendre à se parler, se connaitre et se reconnaitre. Pour autant, il manque encore un certain nombre d’acteurs. Au banc des absents, il faut notamment remarquer l’ensemble des acteurs économiques du champ de la santé : industriels, entreprises du secteur santé/bien être, universités, écoles de formation des soignants… Autant d’acteurs qui sont indissociables du système de santé et sans qui il n’est pas possible d’avoir un point de vue réellement
large et diversifié sur les problématiques abordées dans les Conférences de territoires. Sans même les intégrer de façon permanente, il est possible d’imaginer des interventions ponctuelles pour permettre à ces acteurs de faire entendre leurs points de vue.
Proposition 3 : Rendre autonome les Conférences de territoires en leur donnant les moyens humains et financiers pour fonctionner
Pour permettre aux Conférences de territoires de fonctionner et de jouer leur rôle, il est aussi nécessaire de leur en donner les moyens. Si l’argent constitue un levier incontournable, il n’est pas le seul vecteur de valorisation attendu par les acteurs. Quelle qu’en soit la forme, les acteurs ont besoin d’être reconnus et valorisés pour accepter de s’impliquer et de donner de leur temps pour participer à ces échanges. Cette reconnaissance passe d’abord par une indemnisation, ne serait ce que pour permettre à chacun de libérer son temps de travail ; mais aussi une reconnaissance des tutelles ou une offre de formation, qui permettrait non seulement une certaine contre partie mais qui favoriserait également la constitution d’une culture commune entre l’ensemble des acteurs siégeant dans ces Conférences de territoires.
En revanche, dés lors qu’un financement est alloué et que la démarche de démocratie sanitaire se « professionnalise », il est nécessaire de mettre en place une démarche d’évaluation de l’impact et des retombées économiques ou organisationnelles visibles.
Enfin, pour donner du poids aux Conférences de territoires, il faut qu’elles soient connues des acteurs (qui y sont pourtant représentés) et des citoyens. Pour ceci il faut développer une vraie stratégie de communication, utilisant les réseaux sociaux, pour objet de rendre publiques les recommandations émises.
Proposition 4 : Donner aux Conférences de territoires un droit d’interpellation ou de questionnement des tutelles, assortie d’une obligation de réponse
Les Conférences de territoires sont des relais de proximités pour les malades et usagers du système de santé ainsi que pour les différents professionnels de santé et offreurs de soins. A ce titre, elles ont toute légitimité à devenir des « lanceurs d’alerte » et des vecteurs de diffusion des bonnes pratiques et initiatives singulières d’acteurs de terrain. Les Conférences de territoires devraient ainsi avoir un droit d’interpellation direct ou de questionnement à l’égard des tutelles, notamment les ARS, avec une obligation de réponse pour ces dernières.
Pour ce faire, les Conférences de territoires devraient dans un premier temps avoir accès à un certain nombre de données (#OpenData) afin de mieux analyser l’offre et les besoins de la population au niveau « micro-local ». D’autre part, les Conférences de territoires devraient pouvoir être saisies par la population, soit pour alerter sur des carences ou des ruptures de parcours de santé, soit pour faire remonter des initiatives ou des projets menés par des acteurs, citoyens, associations, usagers du système de santé.